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Histoires de Hendaye

16 septembre 2013

Loti San Martial

LOTI

SAN MARTIAL      I

HENDAYE, huit heures du matin, le 30 du beau mois de juin. Un peu tard pour me rendre dans la montagne espagnole, au gai pèlerinage du jour. Les autres pèlerins, j'en suis sûr, sont déjà en marche et j'arriverai le dernier.

Tant pis ! En voiture, afin de regagner le temps perdu, je pars pour Saint-Martial, espérant rattraper encore la procession qui m'a certainement beaucoup devancé.

Au sommet d'un coteau pointu, en avant de la grande chaîne pyrénéenne, la vieille chapelle de Saint-Martial est perchée, et, d'ici, des bords de la Bidassoa, on l'aperçoit en l'air, toute blanche et toute seule, se détachant sur le haut écran sombre des montagnes du fond. C'est là que, depuis quatre siècles à peu près, il est d'usage de se rendre tous les ans à même date, pour une messe en musique et en costumes, à la mémoire d'une ancienne bataille qui laissa sur cette petite cime nombre de morts couchés dans la fougère.

L'ermitage de Saint-Martial un quart de siècle avant l'érection de sa nouvelle tour.

Il a plu toute cette nuit ; les campagnes mouillées sont vertes à l'infini, vertes de ce vert frais et printanier qui dure à peu près jusqu'à l'automne, en ce pays d'ombre et d'averses chaudes. Surtout cette montagne de Saint-Martial est verte particulièrement, à cause des fougères qui la recouvrent d'un tapis, et il y croît aussi des chênes, aux feuilles encore tendres, qui y sont clairsemés avec grâce comme, sur une pelouse, les arbres d'un parc. Puisque je suis en voiture cette fois, c'est par la nouvelle route carrossable que je monte vers la chapelle blanche de la cime. Mais d'autres chemins, - d'étroits sentiers, des raccourcis à peine tracés dans l'herbe et les fleurettes sauvages, - conduisent plus directement là-haut. Et tout cela qui, en dehors de ce jour consacré, reste d'un bout de l'année à l'autre solitaire, tout cela est plein de monde à cette heure, plein de pèlerins et de pèlerines en retard comme moi, qui se dépêchent, qui grimpent gaiement avec des rires. Oh ! les gentilles toilettes claires, les gentils corsages roses ou bleus des jeunes Basquaises, toujours si bien attifées et si bien peignées, qui aujourd'hui promènent des nuances de fleurs sur tout ce manteau vert de la montagne !

Par les sentiers ardus grimpent aussi des marchands de bonbons, de sucreries, de vins doux et de cocos, portant sur la tête leurs marchandises, en édifices extravagants. Et des bébés, des bébés innombrables, grimpent par troupes, par familles, allongeant leurs petites jambes, les plus jeunes d'entre eux à la remorque des plus grands, tous en béret basque, bien entendu, et empressés, affairés, comiques. On en voit qui montent à quatre pattes, avec des tournures de grenouilles, s'accrochant aux herbes. Ce sont du reste les seuls pèlerins un peu graves, ces petits-là, les seuls qui ne s'amusent s'amusent pas : leurs yeux écarquillés expriment l'inquiétude de ne pas arriver à temps, la crainte que la montagne ne soit trop haute ; et ils se dépêchent, ils se dépêchent tant qu'ils peuvent, comme si leur présence à cette fête était de nécessité capitale.

Hendaye et la Bidassoa vues de Saint-Martial au milieu du siècle dernier.

La route carrossable, en grands lacets, où mes chevaux trottent malgré la montée roide, croise deux, trois, quatre, cinq fois les raccourcis des piétons, et à chaque tour je rencontre les mêmes gens, qui, à pied, arriveront aussi vite que moi avec ma bête de voiture. Il y a surtout une bande de petites jeunes filles de Fontarabie, en robes d'indienne rose, que je rencontre tout le temps. Nous nous connaissions vaguement déjà, nous étant vus à des fêtes, à des processions, à des courses de taureaux, à toutes ces réunions de plein air qui sont la vie du pays basque, et ce matin, après le deuxième tournant qui nous met l'un en face des autres, nous commençons de nous sourire. Au quatrième, nous nous disons bonjour. Et, amusées de cela, elles se hâtent davantage, pour que nos rencontres se renouvellent jusqu'en haut. Mon Dieu ! comme j'ai été naïf de prendre une voiture pour aller plus vite, sans songer que ces lacets n'en finiraient plus ! Aux points de croisement, elles arrivent toujours les premières, un peu moqueuses de ma lenteur, un peu essoufflées aussi, mais si peu ! la poitrine gentiment haletante sous l'étoffe légère et tendue, les joues rouges, les yeux vifs, le sang alerte des contrebandiers et des montagnards en mouvement dans toutes leurs veines...

*
* *

A mesure que nous nous élevons, le pays, qui alentour paraît grandir, se révèle admirablement vert au loin comme au près. A notre altitude, tout est boisé et feuillu, c'est un monde d'arbres et de fougères. Et, plus verte encore que la montagne, la vallée de la Bidassoa, déjà très bas sous nos pieds, étale, jusqu'aux sables des plages, la nuance éclatante de ses maïs nouveaux. Au delà ensuite, vers l'horizon du nord, le golfe de Biscaye se déploie, infiniment bleu, le long des dunes et des landes de France, dont on pourrait suivre la ligne, comme sur une carte, jusqu'aux confins de la Gascogne.

Mais, tandis que toute cette région des plaines et de l'Océan s'aime en profondeur, au contraire les Pyrénées, du côté opposé, derrière le coteau que nous gravissons, nous font l'effet de monter avec nous, toujours plus hautes et plus écrasantes au-dessus de nos têtes ; au pied de leurs masses obscures, encore enveloppées des nuages et des dernières averses de la nuit, on dirait un peu des jouets d'enfant, cette petite montagne où nous sommes et cette petite chapelle où nous nous dépêchons d'aller.

Décidément, je suis en retard, car j'aperçois, en levant les yeux, la procession bien plus prés d'arriver que je ne croyais ; elle est déjà dans le dernier lacet de la route, presque à toucher le but, la multitude de ses bérets carlistes chemine en traînée rouge, dans le vert magnifique des fougères. Et voici la cloche de la chapelle qui, à son approche, entonne le carillon des fêtes. Et bientôt voici les coups de fusil, signalant qu'elle arrive ! C'est fini, nous aurons manqué son entrée.

A part quelques pauvres bébés, restés en détresse parmi les herbes, nous sommes les derniers ou à peu près, ces petites filles et moi, ces petites filles en robe rose ou bleue, qui n'ont pas perdu leur distance dans les raidillons de la fin. Ma voiture en va qui semble lointaine. Quelque chose peut-être monte à ce moment vers le ciel, quelque chose de cette prière dite sur une montagne, au-dessus des clochers et des villages, au milieu de la magnificence des verdures de juin, entre les Pyrénées sombres et le déploiement bleu de la mer...

Mais l'impression religieuse est furtive ici, avec toute cette jeunesse excitée. La fanfare, qui d'abord jouait des morceaux presque lents et pensifs, ne peut longtemps s'y tenir passe bientôt à des rythmes plus gais - et tout à coup se lance délibérément dans un air de fandango.

 

 

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16 septembre 2013

L'Ile des Faisans

L'Ile des Faisans

 ou de la Conférence       I  

Le courrier reçu ci-dessous a suscité la curiosité des historiens d'Oroitza qui tentent d'y apporter une réponse. Deux d'entre eux ont formulé un avis que vous pourrez trouver ci-dessous : d'une part Pedro Sanchez Blanco et Axel Brücker. Si vous pensez pouvoir indiquer des compléments ou d'autres éléments de réponse, vous pouvez prendre contact avec notre association par le biais du formulaire Contact.

L'ILE DES FAISANS ou DE LA CONFERENCE

APPARITION ET SIGNIFICATION DU NOM « FAISANS »



(Réponse à Mme. THERESE RAFFAUD d’Anglet)

D’'Après Luis de Uranzu dans « Lo que el rìo viò » la dénomination Île des Faisans apparaît pour la première fois dans le «Compendio Historial» de Esteban de Garibay publié à Anvers en 1571 «..la isleta llamada de los Faisanes que el río hace junto a la orilla de Francia....» (…la petite île appelée des faisans que la rivière fait du côté de la rive de France…) et ceci en parlant de la Bataille de Saint Martial de 1522 entre Charles V et François 1er qui appuyait la dynastie de Bourbon-Albret pour reconquérir la Navarre conquise en 1512 par Ferdinand le Catholique, grand-père de Charles 1er d’Espagne et V d’Allemagne.

Antérieurement l'Ile (ou l’ensemble des îles voisines) a été connu sous le nom de île ou des îles «de l'Hôpital» en raison de son appartenance au Prieuré-Hôpital de Saint Jacques de Subernoa situé à gauche de l'actuel Pont Santiago entre Irun et Hendaye (selon Jean Fourcade). Dans quelques cartes élaborées lors de la célébration de la Conférence de la Paix apparaît le nom « d’Île de l’Hôpital », mais plus nombreuses sont les cartes de l’époque où figure le nom d’Île des Faisans qui se maintiendra jusqu’à aujourd’hui en même temps que le nom d’Île de la Conférence.

A partir de 1659 en raison de la Conférence de la Paix qui, sur cette île, réunit la France et l'Espagne, on la connaîtra en France comme l'Île de la Conférence (Luis de Uranzu et Jean Sermet).

D'où provient le nom des « faisans » donné à l'île dans l'oeuvre de Garibay ?

Luis de Uranzu recense trois possibles origines et significations du nom « faisans » appliqué à la petite île :

- les outardes et les vanneaux, oiseaux très présents dans les marécages seraient appelés faisans dans le Pays Basque d'outre- Bidassoa.

- le terme faisan aurait son équivalent hasan en langue gasconne et donc le nom de l’île serait un apport de plus du gascon à la toponymie des côtes du Labourd et du Guipuzcoa.

- Le gérondif faisant -s- s’emploierait comme substantif dans le langage juridique ; comme sur l’Île on aurait fait des faceries, le nom faisans dériverait des « faisants des faceries » (Philippe Veyrin)

Un livre, pas encore identifié par Mme Raffaud, présenterait deux possibilités :

- le terme faisant équivaudrait à pontonnier (celui qui s’occupe d'un bac, un passeur, qui reçoit le pontonnage)

- le terme faisance peut signifier redevance due pour un bien appartenant à autrui, le faisant pouvait être le péager chargé de recouvrir la redevance due pour le passage de la Bidassoa, soit par le gué de Béhobie soit par celui du Prieuré.

A la vue de ce qui précède on peut :

- affirmer que le nom faisans désigne depuis le XVIe siècle la petite île qui à partir de 1659 sera aussi appelée « de la Conférence »

- refuser que « faisans » (faisanes en espagnol) puisse dériver de « faisans de faceries » (ceux qui font des faceries) pour trois raisons :

1° Le terme faceries est la traduction en français des « facerias » terme espagnol qui aurait donné en tout cas la dénomination « d’Île des Faceries » ;

2°Les faceries sont encore aujourd’hui des traités entre communes pyrénéennes portant sur la jouissance partagée des pacages limitrophes ou pour résoudre les problèmes propres aux sociétés montagnardes, or, rien de cela n’est vraisemblable entre les deux rives de la Bidassoa en aval de Vera de Bidassoa car il n’y a pas de pacages. On peut d’autre part constater que les affrontements à propos de navigation et pêche ont été constants du XVe au XXe siècle. En plus, il n’y a aucune preuve que dans l’île en question des faceries (et encore moins des Traités de bonne Correspondance –identifiés sans raison par Philippe Veyrin aux faceries) auraient été conclues C’est seulement à partir de 1659 que l’Île des Faisans accueillera les réunions des commissionnaires français et espagnols pour résoudre sans succès jusqu’en 1856 la délimitation frontalière dans la Bidassoa et les conflits entre les habitants des deux rives. (Selon René Cuzacq, cité par J. Sermet).

3° Il est douteux que l’on ait pu substantiver le terme « faisant » appliqué aux faceries terme qui appartient au droit coutumier.

- refuser l’équivalence faisant-pontonnier, hasardeuse et par manque de preuves documentaires et linguistiques.
- admettre comme hypothèse que le nom faisans appliqué à l’île en question procède de l’abondance des outardes et des vanneaux dans l’estuaire de la Bidassoa.
- douter de l’hypothèse que « faisans » dérive du mot hasan gascon.
- suivant la proposition de Mme Rafaud, émettre une hypothèse : le passage de la Bidassoa par les gués en aval de Biriatou impliquerait une redevance en nature ou en argent, une faisance ; à partir de ce fait, soit on s’acquittait de la redevance en passant par l’île, soit l’ensemble de faisances perçues étaient gardées dans l’île qui, dans les deux cas, pourrait être appelée Île des Faisans dont la prononciation espagnole donnerait faisanes.

Quelques questions à résoudre pour vérifier les hypothèses émises antérieurement :

Est-ce que l’on peut expliquer phonétiquement le passage de la prononciation « e » de faisan en français à « aï » de faisan en espagnol ?

La même interrogation se pose à propos du pluriel « faisans » en français et en espagnol « faisanes » ( « s »final prononcé).

Si d’après le « Dictionnaire Historique de l’ancien langage françois ou Glossaire de la langue françoise : depuis son origine jusqu’au siècle de Louis XIV, par La Curne de Sainte-Palaye 1875 1882 », faisan s’écrivait « faisant » et le terme « faisance ou fesance » signifiant redevance apparaît au XIVe siècle en Normandie, comment expliquer le pluriel « faisanes » en espagnol ? L’arrivée d’un terme normand aux abords de la Bidassoa est-il vraisemblable?

CONCLUSION

Jean Sermet dans La Controverse artificielle sur l’identification de l’Île des Faisans écrit: « il faut se résigner à ne pas mettre en rapport les Faisans de notre île avec les usages des faceries et se résoudre pour le moment à ne pas apporter de solution à l’origine de ce nom ».

La collaboration de linguistes et d’experts en ornithologie pourrait aider à éclaircir quelques unes des interrogations signalées plus haut, et surtout la découverte du livre dont le souvenir de Mme Raffaud a déclenché ces pages.

BIBLIOGRAPHIE

Pour les controverses sur la signification du nom des « faisans » et l’identification toponymique mise en question par certains :

Jean Sermet, Île des Faisans, Île de la Conférence, Annales du Midi, Toulouse LXXIII, n° 3 1961 &

La controverse artificielle sur l’identification de l’Île des Faisans, Bulletin d’études de la Bidassoa n° 4 Irun 1987

Luis de Uranzu, Lo que el rìo viò, edit. La Gran Enciclopedia Vasca, Bilbao 1975, p. 189-228

Jean Fourcade, Île des Faisans, Île de la Conférence, S.S.LA. de Bayonne, nouvelle série, n° 118, 2ème trimestre 1968, p. 775-780

Philippe Veyrin, Les Basques de Labourd, de Soule et de Basse Navarre, leur histoire et leurs traditions, Musée Basque Bayonne 1942 ? p. 148-150

Pedro Sanchez Blanco  d’OROITZA

Dans son livre, Fulcanelli et le Mystère de la Croix d’Hendaye (Editions Séguier) Axel Brücker (membre de l’association Oroitza) consacre un chapitre entier à la signification possible de l’Ile des Faisans, basée sur la langue française, la langue de la diplomatie, et sur son rapprochement possible avec l’appellation qu’elle prit par la suite d’Ile de la Conférence sans jamais s’installer vraiment dans le langage courant.

Les « faisans » de l’île des Faisans

« Point de faisans dans l’île ! » écrit Victor Hugo, en traversant la Bidassoa, avec Juliette Drouet, pour se rendre à Irùn. « C’est la règle générale. A Paris, au Marais, (où habitel’écrivain), il n’y a pas de marais ; rue des Trois-Pavillons, il n’y a pas de pavillons ; rue de la Perle, il y a des gotons (des prostituées en argot) ; dans l’île des Cygnes (près de la Tour Eiffel), il n’y a que des savates naufragées et des chiens crevés. Quand un lieu s’appelle l’île des Faisans… il y a des canards ! O voyageurs, curieux impertinents, n’oubliez pas ceci ! »

Mais alors, où sont passés les faisans de l’île aux Faisans ?… ils sont passés, justement, dans la langue française… dans la « diplomatique », comme dirait Grasset d’Orcet, la langue des diplomates, comme le rappelait Fulcanelli.

Contrairement à une légende, bien entretenue, il n’y a jamais eu de faisans dans cette île minuscule. Ils eussent vite été dérangés et attrapés ! Rappelons que cette île, située en plein milieu de la Bidassoa, en aval du pont de Béhobie, est minuscule, à peine trente mètres de large et une centaine de long, minuscule, mais immense par son importance historique. Historique et politique, puisqu’elle bénéficie d’un statut unique en Europe !

En effet, l’Ile de la Conférence, de son nom officiel, ou Ile des Faisans, appartient en commun aux royaumes de France et d’Espagne. Indivision perpétuelle, seule exception en droit international, ce qui fut ratifié par le Traité de Bayonne du 2 décembre 1856. Enfin, une convention du 27 mars 1901 établit « les droits de police et de justice » sur l’île !

C’est ainsi que l’île des Faisans, une vingtaine d’arbres, est devenue un « condominium de droit international » ! Le droit de police et de justice sur l’île incombe depuis 1901, alternativement tous les six mois, au Royaume d’Espagne, non au Guipúzcoa mais à Madrid, et à la République française. Les gouvernements respectifs, qui ne manquent pas de fonctionnaires, en prennent, alternativement, chaque semestre, la lourde responsabilité.

La France, représentée par le capitaine de frégate commandant la station navale de la Bidassoa, lointain successeur de Pierre Loti, en prend le commandement chaque 12 août à 0 heure, jusqu’au 11 février à minuit. Pourquoi, le 12 août ? Pourquoi le 11 février ? Écrivez à l’administration ou au Quai d’Orsay, en joignant une enveloppe timbrée pour la réponse !

Prévenons donc les « malfaisants » qu’ils risquent, s’ils volent un sac, de se retrouver emmenés à la prison d’Hendaye, jusqu’au onze février, mais, plus grave, de se retrouver dans une prison madrilène, à partir du 12 février et ce jusqu’au 10 août ! Sauf qu’il n’y a pas de sac, ni même de faisan, à voler sur l’île des Faisans.

Et comme rien n’est simple sur la Bidassoa, il y a deux îles des Faisans ! Une, plus grande, proche de la rive française, collée à Hendaye et, la plus célèbre, celle qui a gardé ce drôle de nom, malgré toutes les tentatives pour la nommer Ile de la Conférence, en souvenir de la Paix des Pyrénées, le traité de l’Ile des Faisans signé en 1659.

Pourtant, ce nom d’Ile de la Conférence n’est pas un mauvais nom, mieux, il est une bonne « traduction » d’Ile des Faisans.

Cette île aurait pu s’appeler « Ile du Traité », ou, « Ile de la Paix ». Et, si elle s’appelle vraiment « Ile de la Conférence », les Espagnols devraient alors l’appeler parfois « Isla de la Conferencia », mais ils l’ont toujours appelée « Isla de los Faísans » ou Faísanos. Pourtant, tous les noms des lieux que nous partageons avec l’Espagne sont les mêmes, à l’orthographe près.

Mais alors, les Espagnols, eux, auraient-ils vu des faisans sur cette île ? Des faisans qu’ils n’auraient pas partagés avec nous, qui se seraient envolés de leur côté ?

Non, Ile des « Faisans », parce que, depuis des temps très anciens, cet îlot était, comme d’autres lieux du Pays Basque, un des endroits où les représentants des communes voisines se retrouvaient, en terrain neutre, pour discuter des affaires communes : Pâturages, pour des communes de chaque côté des Pyrénées, pêches et navigation pour les communes de chaque côté de la Bidassoa. Chaque commune dépêchait des représentants qui discutaient, parlementaient et parvenaient à des accords, des droits et des obligations, des limites, que l’on nommait des « faceries ». Quand on parvenait à un accord, on se serrait la main de part et d’autre de la table des négociations. Ces accords particuliers entre communes des royaumes de France et d’Espagne, ne concernaient pas les nations, mais seulement ces communes, et, par un droit coutumier, avaient force de lois. Ces faceries auxquelles les Basques sont très attachés ont duré, pour la plupart, jusqu’à nos jours. On peut encore voir au col de Lizuniaga, là où passe le « tracé » de la frontière entre les deux nations, au lieu dit « Luzuniako Mugarria », la monumentale table de pierre, sorte de menhir renversé, sur laquelle se négociaient les faceries entre Sare et ses voisines de Navarre.

Rappelons que les Basques ne connaissaient pas l’écriture. Ils en gardent encore, de nos jours, un profond respect de la parole donnée, de la chose dite !

Les « facerios » entre Andaye, Irùn et Fontarabie, qui délimitaient les droits de passage, de fermage et de pêche se traitaient sur l’ « Ile des Faceries » ou « Isla de los Facerios ».

Comme le rappelait Alain Lamassoure dans son discours au Sénat sur le projet de Traité avec l’Espagne relatif à la coopération transfrontalière, alors qu’il était ministre délégué au Budget et porte-parole du Gouvernement : « Ce traité fait suite à un traité précédent passé entre nos deux pays en 1856, soit voilà plus de cent ans. A l'époque, il s'agissait de régler des problèmes de bornage et des droits de pacage entre éleveurs par ce que l'on appelait un traité de bonne correspondance : certains éleveurs frontaliers avaient le droit de jouissance de pâturages, soit pour toute la durée de la saison - l'estive - soit, comme le disait joliment le traité, « de soleil à soleil », c'est-à-dire avec l'obligation de regagner son propre territoire à la nuit tombante. Il existait déjà une originalité par rapport à notre droit international classique : les communes pyrénéennes étaient, en France, les seules habilitées à passer des accords internationaux, les « faceries », et les élus locaux de l'époque étaient considérés comme des « faisans », au sens, non pas des volatiles , (sourires dans l’assemblée) mais des acteurs qui agissent, qui « font », traduction française du mot espagnol « faceros ». L'île des Faisans, sur la Bidassoa, était, en fait, l'île des diplomates.

On retrouve également ce mot « faisan » en argot, ce parler imagé si cher à Fulcanelli. On dit « méfiez-vous, c’est un faisan » d’un homme qui vous « roule dans la farine », qui vous « entourloupe » en argumentant très habilement, d’un bon vendeur qui vendrait n’importe quoi, d’un parlementaire ou d’un diplomate très rusé. De là à voir dans le plumage rouge du faisan une allusion à la couleur de la robe du cardinal Mazarin, l’un des plus grands diplomates et des plus corrompus de l’Histoire de France, il n’y a qu’un pas qu’un Hendayais ne saurait franchir !

Personnellement, je pencherais volontiers pour une autre interprétation, une interprétation encore plus diplomatique et relevant plus de la tradition, de la coutume, et, de la langue française, ainsi que de l’observation des îlots sur la Bidassoa.

On trouve dans les dictionnaires anciens le mot « faisances », au pluriel justement : « Tout ce qu’un fermier s’oblige par son bail de faire ou de fournir », les faisances, sont, en termes paysans, les droits et obligations sur les terres. Elles sont souvent coutumières, mais ont force de règlements.

Il suffit, là encore, pour comprendre, de se promener le long de la Bidassoa, entre Irùn et Hendaye, pour voir les petites parcelles des îlots cultivés par les riverains. Ces îlots, recouverts parfois, par très grande marée, sont extrêmement fertiles. Ils y cultivent des tomates, des petits pois, des fleurs que les femmes iront vendre au marché.

Ces petites îles n’appartiennent à personne. Elles ne sont sur le territoire d’aucune nation. Elles ont été, depuis des générations, réparties en petites parcelles. Tous ensemble, les riverains veillent à l’entretien commun des parcelles et au renforcement permanent des petites digues en terre qui empêche la Bidassoa d’inonder les plantations.

L’occupation et l’entretien de ces terres relèvent d’un droit coutumier, de « faisances », respectées à la lettre.

Encore une fois, c’est la langue française qui l’emporte, la langue de la diplomatie :

La plus petite des îles sur la Bidassoa, celle qui servit de tout temps de lieu de rencontre, de négociations, celle qui n’était pas cultivée, mais laissée en jachère, s’appelle, en réalité, «l’Ile des Faisances ».

C’est donc diplomatiquement que cette île fut choisie pour abriter les fréquentes négociations entre les communes riveraines, mais aussi entre le Labourd et la Navarre, autrefois souveraine jusqu’à la mer, comme entre les royaumes de France et d’Espagne, et, plus tard, la négociation historique entre Mazarin et don Luis de Haro.

« L’Ile des faisances », devint alors, par déformation, par ignorance, l’Ile des Faisans, appelée aussi Ile de la Conférence. Mais c’est bien le nom d’Ile des Faisans qui est resté de nos jours et nul ne saurait porter le snobisme à l’appeler « Ile de la Conférence ».

Il ne reste que la fable de La Fontaine « Les Deux Chèvres » pour nous rappeler ce nom très diplomatique :

« L'une vers l'autre allait pour quelque bon hasard.
Un ruisseau se rencontre, et pour pont une planche.
Deux belettes à peine auraient passé de front

Sur ce pont :
D'ailleurs, l'onde rapide et le ruisseau profond
Devaient faire trembler de peur ces amazones.
Malgré tant de dangers, l'une de ces personnes
Pose un pied sur la planche, et l'autre en fait autant.
Je m'imagine voir, avec Louis le Grand,

Philippe Quatre qui s'avance

Dans l'île de la Conférence.
Ainsi s'avançaient pas à pas,

Nez à nez, nos aventurières,
Qui toutes deux étant fort fières,
Vers le milieu du pont ne se voulurent pas
L'une à l'autre céder. »

Point de faisans, monsieur Hugo, sur l’Ile des Faisans, mais deux chèvres, monsieur de La Fontaine… deux chèvres qui :

« Faute de reculer, leur chute fut commune :

Toute deux tombèrent dans l’eau.

Cet accident n’est pas nouveau

dans le chemin de la fortune. »

Point de faisans, mais des moustiques !

Des moustiques et une humidité qui coûtèrent à l’Espagne, et au monde entier, la perte d’un des plus grands peintres de tous les temps.

En effet, à cet endroit, la Bidassoa, qui n’est qu’un tout petit fleuve, se remplit et se vide selon les marées. Une eau devenue saumâtre, arrêtée par la baie de Chingoudy qui monte avec les marées. Certaines grandes marées retiennent l’eau, au niveau de l’Ile des Faisans, jusqu’à la limite du recouvrement. D’ailleurs, cette île n’est qu’une formation d’alluvions du fleuve, un mélange de terres et de bois qui se sont échoués jusqu’à former un îlot, qui, aujourd’hui aurait, peut être, disparu s’il n’avait pas été renforcé par des pierres.

A marée basse, et très basse par grande marée, on passerait presque à pied depuis la rive espagnole. Le lit est fait de vase qui, par grandes chaleurs, dégage une odeur épouvantable. Cette humidité et les moustiques eurent raison de bien des gentilshommes qui suivaient les négociateurs du Traité de Paix. Certains mêmes ne revinrent jamais de ce voyage.

Quand on contemple cet endroit, il est difficile d’imaginer le faste qui fut déployé sur cette parcelle de terre… et de vase.

Jamais un traité politique ne fut entouré d’une telle splendeur depuis le Camp du Drap d’Or.

La France détacha pour l’organisation et la décoration l’un des hommes les plus élégants, et des plus fastueux, le Marquis de Chouppes et l’Espagne, le Baron de Watteville.

Deux appartements privés, l’un espagnol, l’autre français, ouvraient sur la salle des négociations dont chaque moitié rivalisait en splendeur.

Pour la décoration de la « partie espagnole », le Roi envoya Velázquez. Oui, Velázquez, le magnifique, que l’on reconnaît sur la tapisserie des Gobelins, dessinée par Le Brun. Velázquez fut terriblement incommodé pendant les travaux par l’humidité de la Bidassoa. Il attrapa, comme d’autres, une sorte de paludisme.

Il eut le bonheur de se voir félicité et remercié par les deux grands rois, d’assister au mariage le 9 juin, où il se fait, une fois encore, remarquer par sa belle élégance. Mais il n’eut que le temps de rentrer, avec son roi, à Madrid pour y mourir… le 7 août. Le Roi commanda des funérailles grandioses pour celui qui fit tant pour la grandeur de l’Espagne. Et, pour la petite histoire, sa veuve, l’amour de sa vie, doña Juana, ne lui survécut que de sept jours et fut enterrée près de lui, dans la paroisse de Saint-Juan.

L’année suivante, mourraient également les deux artisans de la paix, Mazarin et Luis de Haro…les deux « faisans » de l’Ile des Faisans, que Victor Hugo, pour lui laisser le mot de la fin, avait surnommés « Mazarin, l’athlète de l’astuce et Louis (sic) de Haro, l’athlète de l’orgueil. »

Aujourd’hui encore, les rives de ce petit fleuve, écrivent de jolies pages de l’histoire de France et d’Espagne, mieux, de l’Europe… puisque, bravant tous les obstacles administratifs et politiques, surmontant des siècles de jalousies, de rivalités et de guerres, les villes d’Irùn, Fontarabie et Hendaye se sont rassemblées dans un cadre juridique extraordinaire, unique en Europe, le « Consorcio transfrontalier Bidasoa-Txingudi ».

Ce consorcio, inspiré du droit espagnol, entre trois communes de deux nations n’a pas nécessité moins d’un traité entre le royaume d’Espagne et la République française et d’une reconnaissance juridique par le Parlement Européen.

Il est extraordinaire de constater que c’est dans cette petite baie de Chingoudy que se construit véritablement l’Europe dont ont rêvée ses pères fondateurs.

Pour avoir tant souffert de nos divisions, de nos royaumes ennemis, les rives de la Bidassoa continuent d’écrire la Paix.

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Ceux qui trouvent qu’Hendaye n’est pas la plus basque des villes du Labourd, au mépris de son histoire, de sa tragédie, ne savent pas qu’elle est la seule à vivre et à se gouverner à l’intérieur d’un Pays Basque débarrassé de ses frontières « historiques ».

A Hendaye, comme l’avait déjà remarqué dans son voyage Victor Hugo, on ne parle pas plus le Français que le Basque et l’Espagnol. Oui, on y parle les trois langues. Ici, on ne parle pas de l’Europe, on est un peu loin de Strasbourg et de Bruxelles, non, on fait l’Europe !

La Bidassoa n’est plus une frontière, elle est redevenue, après tant de siècles, le cœur du Pays des Basques.

Le Conseil de l’Europe, à Strasbourg, dans son comité directeur sur la démocratie locale, en 2002, relevait et citait en exemple l’agglomération trinationale de Bâle (France-Allemagne-Suisse) et le Consorcio Bidassoa-Txingudi, comme les deux exemples les plus parfaits de coopérations transfrontalières.

Pourtant, il n’y a pas si longtemps, en 1936, les riverains de la Bidassoa étaient, une fois encore, les témoins horrifiés de la folie des hommes avec la Guerre civile espagnole, triste répétition, « mise en bouche », de ce qui allait devenir la Seconde Guerre Mondiale, la plus monstrueuse guerre de tous les temps.

Irùn fut rasée par les nationalistes, et ceux qui trouvent qu’Irùn « n’est pas très belle » feraient mieux de se découvrir devant les restes de ce qui était, en effet, une jolie ville…

Le Pont d’Hendaye est un lieu de mémoire que traversèrent, en larmes, les survivants de cette tragédie et les défenseurs de la République.

Ils traversaient le pont pour y déposer les armes. Certains d’entre eux profitaient de la France pour tâcher de reprendre le combat sur la Catalogne, jusqu’à… « la muerte ! »

Parmi eux, un jeune combattant basque des Bataillons d’Amuategui de 18 ans, Luis Ecenarro. Il était loin de croire, bien sûr, qu’il ne pourrait plus jamais revenir dans la patrie qu’il défendait courageusement. Il ne pouvait imaginer, non plus, que son fils deviendrait un jour le premier citoyen de la ville, et mieux, en tant que Maire d’Hendaye, l’un des premiers présidents du Consorcio d’Irùn-Fontarabie-Hendaye.

Que ceux qui trouvent qu’Hendaye n’est pas « très basque », pas très « typique », se taisent !

Et cette même année 1936, Hendaye, malgré le triste voisinage de la guerre civile et l’arrivée ininterrompue des réfugiés, inaugure, dans la joie et la fraternité, sa deuxième église, l’église Sainte Anne, « l’église de la plage » , comme on l’appelle aujourd’hui.

Joli nom, sainte Anne, sainte patronne de tous les marins, pour une église au bord de la plage. Le premier « curé de la plage », l’abbé Paul Simon, ancien professeur du Lycée Janson de Sailly, reçoit chaleureusement, ce jour là, le maire « radical-socialiste » Léon Lannepouquet qui vient s’asseoir au premier rang de l’église. Dieu seul sait alors que la guerre d’Espagne va bientôt s’étendre au monde entier, comme une épidémie, comme une sorte de guerre civile mondiale… Dieu seul sait que le jeune curé et le maire se retrouveront bientôt, tous les deux, dans le même camp…à Dachau, en Allemagne, et n’en reviendront jamais.

Hendaye… « sa belle plage de sable fin aux portes de l’Espagne »… son histoire

aussi, au cœur de la France !

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16 septembre 2013

Seconde guerre mondiale

seconde guerre mondiale

  

 

La Seconde Guerre mondiale, ou Deuxième Guerre mondiale est un conflit armé à l'échelle planétaire qui dura du 1er septembre 1939 au 2 septembre 1945. Ce conflit planétaire opposa schématiquement deux camps : les Alliés et l’Axe.

 

Provoquée par le règlement insatisfaisant de la

 

Première Guerre mondiale et par les ambitions expansionnistes et hégémoniques des trois principales nations de l’Axe (Allemagne nazie, Italie fasciste et Empire du Japon), elle consista en la convergence, à partir du 3 septembre 1939, d’un ensemble de conflits régionaux respectivement amorcés le 18 juillet 1936 en Espagne (la guerre d'Espagne), le 7 juillet 1937 en Chine (la guerre sino-japonaise), et le 1er septembre 1939 en Pologne (campagne de Pologne), puis par l'entrée en guerre officielle de l'ensemble des grandes puissances de l'époque : France, Royaume-Uni et leurs empires dès le 3 septembre 1939, URSS à partir de l'invasion allemande de juin 1941, États-Unis le 7 décembre 1941 dans un conflit impliquant la majorité des nations du monde sur la quasi-totalité des continents. La Seconde Guerre mondiale prit fin sur le théâtre d'opérations européen le 8 mai 1945 par la capitulation sans condition du IIIe Reich, puis s’acheva définitivement sur le théâtre d'opérations Asie-Pacifique le 2 septembre 1945 par la capitulation sans condition de l'Empire du Japon, dernière nation de l’Axe à connaître la défaite.

 

La Seconde Guerre mondiale constitue le conflit armé le plus vaste que l’

 

humanité ait connu, mobilisant plus de 100 millions de combattants de 61 nations, déployant les hostilités sur quelque 22 millions de km², et tuant environ 62 millions de personnes, dont une majorité de civils. N’opposant pas seulement des nations, la Seconde Guerre mondiale fut aussi la plus grande guerre idéologique de l’Histoire, ce qui explique que les forces de collaboration en Europe et en Asie occupées aient pu être solidaires de pays envahisseurs ou ennemis, ou qu’une résistance ait pu exister jusqu’en plein cœur de l’Allemagne nazie en guerre. Guerre totale, elle gomma presque totalement la séparation entre espaces civil et militaire et vit, dans les deux camps, la mobilisation poussée non seulement des ressources matérielles économiques, humaines et scientifiques mais aussi morales et politiques, dans un engagement des sociétés tout entières.

 

                                                                                                                                         wikipedia

 

 

1940. 22 juin,

 La France signe l’armistice avec le III Reich.

 La frontière voit passer tous ceux qui cherchent à fuir l’occupant nazi.

Avant l'Occupation

ALLEMANDE

  De  Souza Mendes

 

 

 


22 au 25 juin 1940 :

 Aristides de Souza Mendes

Consul du Portugal


Retrouvaille avec le pont ......  quelques années après

 

 

Plaque commémoratrice au jardin des Déportés

Sur la route d’Hendaye, faisant fi de la convention d'armistice et des ordres de l'occupant, Aristides de Sousa Mendes continue de délivrer les précieux visas à tous les réfugiés qu’il croise à l’approche de la frontière.

 

 

 

 

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Sur la route d’Hendaye, faisant fi de la convention d'armistice et des ordres de l'occupant, Aristides de Sousa Mendes continue de délivrer les précieux visas à tous les réfugiés quil croise à lapproche de la frontière.

 

 

En 1940, à 55 ans, il approche de la fin de sa carrière et est père de quatorze enfants. Politiquement, il ne s'est alors jamais fait remarquer.

 

Aristides de Sousa Mendes est toujours consul à Bordeaux au déclenchement de la Seconde guerre mondiale et pendant la bataille de France avec l'avancée rapide des troupes d'Adolf Hitler. Salazar parvient à maintenir la neutralité du Portugal, mais ses opinions personnelles sont plutôt favorables à Hitler. Par la circulaire 14, il ordonne aux consuls de refuser l'octroi de visas aux catégories suivantes : « les étrangers de nationalité indéfinie, contestée ou en litige ; les apatrides ; les Juifs expulsés de leur pays d'origine ou du pays dont ils sont ressortissants ».

 

Cependant, à Bordeaux où le gouvernement français s'est réfugié, affluent des dizaines de milliers de réfugiés qui veulent fuir l'avancée nazie et parvenir au Portugal  ou aux Etats - Unis. Pour cela, il leur faut un visa du consulat portugais, que Sousa Mendes est donc chargé de dispenser avec parcimonie. Or, le consulat est envahi de réfugiés désirant atteindre Lisbonne.

 

Fin  1939, Sousa Mendes désobéit et donne quelques visas. Parmi ceux qu'il décide d'aider se trouve le rabbin anversois Jacob Krugerqui lui fait comprendre que ce sont tous les réfugiés juifs qu'il faut sauver.

 

Le 16 juin 1940il décide de délivrer des visas à tous les réfugiés qui en font la demande : « Désormais, je donnerai des visas à tout le monde, il n'y a plus de nationalité, de race, de religion ». Aidé de ses enfants et neveux, ainsi que du rabbin Kruger, il tamponne les passeports à tour de bras, signe des visas sur formulaires, puis sur des feuilles blanches et tout morceau de papier disponible. Aux premiers avertissements de Lisbonne, il aurait déclaré: « S'il me faut désobéir, je préfère que ce soit à un ordre des hommes qu'à un ordre de Dieu ».

 

Alors que Salazar a déjà demandé des mesures contre lui, le consul poursuit, du 20 au 23 juin, son activité à Bayonne dans le bureau du vice-consul médusé, alors même qu'il est entouré par deux fonctionnaires de Salazar chargés de le 'rapatrier' d'autorité. Le 22, la France a demandé un armistice. Sur la route d'Hendaye, il continue à écrire et signer des visas pour les réfugiés d'infortune qu'il croise à l'approche de la frontière. Or, le 23, Salazar l'a démis de ses fonctions.

 

Après la fermeture du poste frontière d'Hendaye et en dépit des fonctionnaires envoyés pour le ramener, il prend avec sa voiture la tête d'une colonne de réfugiés qu'il guide jusqu'à un petit poste de douane où, côté espagnol, il n'y a pas de téléphone. Le douanier donc n'a pas encore été informé de la décision deMadrid de fermer la frontière avec la France. Sousa Mendes use du prestige de sa fonction de consul (théorique puisque démis de ses fonctions) et impressionne le douanier qui laisse passer tous les réfugiés qui pourront ainsi, munis de leur visa, gagner le Portugal.

 

Le 8 juillet1940, il est de retour au Portugal. Salazar s'acharne : il prive Sousa Mendes, père d'une famille nombreuse, de son emploi diplomatique pour un an, diminue de moitié son traitement avant de le mettre en retraite. De surcroît, Sousa Mendes perd le droit d'exercer la profession d'avocat. Son permis de conduire, émis à l'étranger, est refusé.

 

Le consul déchu et sa famille survivent grâce à la solidarité de la communauté juive de Lisbonne : celle-ci permet à certains des enfants de Sousa Mendes de faire leurs études aux Etats - Unis. Deux de ses fils participent au débarquement en NormandieIl doit fréquenter, avec les siens, la cantine de l'assistance juive internationale et, bien qu'il impressionne par sa mise soignée et sa prestance, il doit confirmer un jour : « Nous aussi, nous sommes des réfugiés ».

 

En 1945, tout en se félicitant hypocritement de l'aide que le Portugal a apportée aux réfugiés pendant la guerre, Salazar refuse néanmoins de réintégrer Sousa Mendes dans le corps diplomatique. La misère se fait alors plus pressante : vente des biens, mort de son épouse en 1948, émigration de tous ses enfants sauf un.

 

Aristides de Sousa Mendes meurt dans la misère, le 3 avril 1954, à l'hôpital des pères franciscains de Lisbonne. N'ayant plus de vêtements propres, il est enterré dans une robe de bure

 

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L'APPEL A LA RESISTANCE DEPUIS LONDRES                        

 

 

 

 

 

 

 

VIDEO

 

 

 

               

 

 

 

     

 

 

 

OCCUPATION

 

 

 

 

 

25 juin, les forces du III Reich prennent le contrôle de la frontière.Le 23 octobre Hitler et Franco dans la gare de Hendaye maintiennent une entrevue qui finalement ne déboucha que sur la « Division Azul » qui passa par la gare de Hendaye dans son chemin jusqu’au front russe.

 

 

L'APPEL A LA RESISTANCE DEPUIS LONDRES


 

 

 

occupation

L'arrivée des Allemands au Pont International 


 

Les forces hitlériennes  arrivèrent et le 27 juin en fin d'après midi le Herr Doktor Wist Brandt se trouva être le premier militaire d'occupation à parvenir au pont Santiago. Le 29 juin vers 11 heuresle général allemand parvenait à son tour au même endroit et il allait saluer son homologue espagnol le général Lopez Pinto, puis les deux généraux de concert traversèrent la frontière du côté français pour aller passer en revue un bataillon d'éclaireurs SS

Oihenart

Le jour de l'entrevue Hitler-Franco renforcement de la sécurité

 

Avion Allemand abattu par la R.A.F. anglaise


1946. Les Allemands étendent leur mur de l'Atlantique jusqu'à l'extrémité de la France occupée et installent à Hendaye une batterie complète en block­haus avec conduite de tir et souterrains au-dessus des Jumeaux, plus un blockhaus isolé à la pointe de la plage et plusieurs réduits à tourelles. Les Espagnols fortifient ensuite des crêtes en arrière d'Irun.


LE QUOTIDIEN


 

 

entrevue hitler franco

 

 

      

1940  Cette année-là, Hendaye est le théâtre d'un événement qui appartient à la grande histoire : l'entrevue que le général Franco et Hitler eurent en sa gare.

Ici, Hitler, au point culminant de sa force, a buté ! L'astucieux gallego, avec une finesse que nous dirions paysanne ou normande, a su lui refuser toute alliance et contrer ses projets; il rendit ainsi à la France et à l'Angleterre un immense service qu'il serait injuste et ingrat d'oublier.                   (F)

 

 

 

 

 

 

Cette année-là, Hendaye est le théâtre d'un événement qui appartient à la grande histoire : l'entrevue que le général Franco et Hitler eurent en sa gare.

 

Ici, Hitler, au point culminant de sa force, a buté ! L'astucieux gallego, avec une finesse que nous dirions paysanne ou normande, a su lui refuser toute alliance et contrer ses projets; il rendit ainsi à la France et à l'Angleterre un immense service qu'il serait injuste et ingrat d'oublier.

 

Deux divisions hitlériennes attendaient, dans les Landes, l'ordre de franchir la frontière; elles reçurent celui de s'en retourner.

 

Les habitants du quartier de la gare n'ont pas oublié le sinistre train, gris et camouflé, aux wagons plats, en tête et en queue, hérissés de canons anti-aériens, qu'ils purent entr'apercevoir en bravant la défense qui leur était faite de se mettre à la fenêtre. Ils se souviennent encore des coups de fusils tirés par les S.S. sur les fenêtres entr'ouvertes.

 

Pour notre part, nous avons eu la bonne fortune de rencontrer une personnalité française, ayant pu disposer de documents officiels, et qui a bien voulu rédiger la note ci-dessous publiée, avec son accord, in extenso.

 

Bien que son auteur ait eu la délicatesse de ne vouloir inclure sa signature dans un livre ne lui devant rien d'autre, nous sommes en mesure d'affirmer la qualité de l'information, sa source d'une valeur historique incontestable.

 

L'entrevue Hitler-Franco en gare de Hendaye eut lieu le mercredi 23 octobre 1940, entre les deux rencontres à Montoire, près de Tours, de Hitler avec les dirigeants français (le 22 avec Laval seul, le 24 avec le Maréchal Pétain accompagné de Laval). Hitler voyageait à bord de son train blindé personnel. Il avait avec lui son ministre des Affaires Etrangères Ribbentrop.

 

Hitler venait demander à Franco son entrée en guerre aux côtés de l'Allemagne et de l'Italie dans le cadre d'une opération dite « Plan Félix », mise au point durant l'été notamment par l'amiral Raeder, commandant en chef de la flotte allemande. L'opération était destinée à fermer la Méditerranée aux Anglais par la prise de Gibraltar, et à prévenir une intervention anglaise et gaulliste en Afrique du Nord. Les Allemands se proposaient également d'établir des bases aux Canaries. L'affaire aurait lieu dans les premiers jours de 1941. Les forces motorisées allemandes traverseraient l'Espagne de Irun à la Linea.

 

L'attaque sur Gibraltar, prévue pour le 10 janvier, serait conduite par 2 000 avions de la Luftwaffe, des mortiers géants et les troupes d'élite, qui avaient déjà enlevé les forts de Liège. La vieille forteresse anglaise, mal armée, dépourvue d'une D.C.A. suffisante, ne pourrait pas opposer de résistance sérieuse à de tels moyens. Gibraltar, reconquise, serait aussitôt restituée à l'Espagne. En même temps, un corps blindé allemand occuperait le Portugal pour y prévenir un débarquement anglais.

 

Des contacts avaient déjà eu lieu à ce sujet à Berlin, au mois de septembre, entre Hitler, Ribbentrop et Serrano Suner, beau-frère de Franco, chef de la Phalange, considéré comme le n° 2 du régime espagnol et l'homme le plus favorable à l'Axe. Serrano Suner admirait Hitler, mais avait été choqué, durant son séjour à Berlin, par la brutalité de Ribbentrop, qui menaçait l’Espagne d’une occupation militaire si elle contrecarrait les plans du Führer.

 

La position de Franco était très délicate. Il ne pouvait pas oublier l'aide que lui avait apporté l'Allemagne durant la guerre civile avec les avions et les spécialistes de la Légion Condor. Une partie de l'opinion publique espagnole était très favorable à une entrée en guerre aux côtés de l'Allemagne victorieuse. D'autre part, le pays était ruiné par trois années de batailles, presque au bord de la famine. II dépendait pour son ravitaillement en vivres, en pétrole de l'Angleterre et des Etats-Unis. Londres et Washington, malgré leur hostilité idéologique pour le régime franquiste, entretenaient avec lui des rapports corrects, afin de sauver Gibraltar. L'Angleterre exerçait, en outre, une forte pression sur les milieux financiers les plus influents de Madrid.

 

Le 23 octobre, le train de Hitler arriva, le premier, à Hendaye. Celui de Franco avait une heure de retard, que Hitler et Ribbentrop passèrent en déambulant et causant sur le quai. Franco arriva à trois heures de l'après-midi. Il était en petite tenue de général, avec le calot à glands. Les entretiens commencèrent dans le wagon de Hitler. On les connaît surtout par le récit du traducteur habituel de Hitler, Paul Schmidt, qui assista à toute l'entrevue.

 

La tactique de Franco était de ne rien refuser, mais de poser à son intervention des conditions, qui feraient reculer le Führer. II laissa Hitler monologuer longuement, sans montrer la moindre réaction. Quand Hitler eut développé son plan, fixé la date du 10 janvier pour l'attaque de Gibraltar, Franco parla à son tour, « d'une voix calme, douce, monotone et chantante, rappelant celle des muezzins », dit Paul Schmidt.

 

II protesta de l'amitié et de la reconnaissance de l'Espagne pour le IIIè Reich et revendiqua pour elle l'honneur de reconquérir Gibraltar. Mais il fallait qu'elle s'y préparât. Or, son armée était réduite à 300 000 hommes sans aucun équipement moderne. Son entrée en guerre aux côtés de l'Axe posait, en outre, un très grave problème de ravitaillement. Il fallait que l'Allemagne pût lui fournir 100 000 tonnes de céréales, du carburant. Franco réclamait, en outre, la majeure partie du Maroc français, le littoral algérien jusqu'à Oran et un agrandissement des colonies espagnoles en Afrique noire.

 

Les revendications espagnoles sur l'Afrique du Nord étaient particulièrement inadmissibles pour Hitler, qui, à ce moment-là, ne voulait pas « désespérer la France » et la faire basculer dans le clan gaulliste au Maroc et en Algérie, où le prestige de Pétain était considérable.

 

Le ton monocorde, la placidité de Franco portaient sur les nerfs du Führer. II faillit à un moment donné rompre l'entretien, puis se ravisa. Un dîner eut lieu dans son wagon-restaurant, à la suite duquel le dialogue des deux dictateurs se poursuivit encore pendant plus de deux heures.

 

Seul résultat de cet entretien de neuf heures, si désagréable à Hitler, qu'il aurait préféré, disait-il, se faire arracher trois ou quatre dents plutôt que de recommencer: les deux parties convenaient d'établir un vague traité, portant sur le principe de l'intervention espagnole, mais sans en fixer la date, et en la subordonnant à des livraisons d'armes et de ravitaillement, dont le détail n'était pas abordé. Les clauses restaient non moins imprécises pour ce qui concernait la possibilité de satisfaire les visées territoriales de l'Espagne en Afrique. Ribbentrop et Serrano Suner, devenu depuis peu ministre des Affaires Etrangères d'Espagne, étaient chargés de la rédaction de ce pacte, qui n'alla pas sans heurts violents entre eux.

 

A Hendaye, l'antipathie avait été réciproque entre les deux dictateurs. Pour Franco, Hitler était un comédien, qui montrait trop ses procédés. Pour Hitler, Franco était un homme courageux, mais sans envergure politique...

 

Comme Franco n'avait opposé aucun refus, les Allemands ne tardèrent pas à relancer

 

l'affaire. En novembre, Hitler invita Serrano Suner à Berchtesgaden, pour n'obtenir de lui que des réponses aimablement dilatoires. Au cours de cette entrevue, Hitler parla, sans doute également, de son intention de faire passer au Maroc Espagnol au moins deux divisions allemandes. Il exposait, quelques jours plus tard, à Mussolini la nécessité de cette mesure.

 

En décembre, l'amiral Canaris, chef de l'Abwehr, rendit visite à Franco à Madrid, lui annonça l'intention de Hitler d'attaquer Gibraltar le 10 janvier, après que l'Espagne ait laissé libre passage à ses troupes. Franco, nullement intimidé, répondit qu'il était impossible pour l'Espagne d'entrer en guerre à cette date, et que sa cobelligérance dépendrait du ravitaillement et des armes que l'Axe pourrait lui fournir.

 

Hitler demanda alors à Mussolini de servir d'intermédiaire pour fléchir Franco. L'entrevue du Duce et du Caudillo eut lieu le 1er février à Bordighera. Elle fut très cordiale. Mais Franco maintint sa thèse : l'Espagne ne pouvait entrer en guerre qu'après que l'Allemagne lui eût apporté une aide effective. Il se plaignait, en outre, que l'Allemagne eût choisi de collaborer avec la France plutôt que de satisfaire les revendications espagnoles sur l'Afrique du Nord. (Ce qui ne l'empêcha pas, en revenant d'Italie, d'avoir une rencontre cordiale avec Pétain à Montpellier et d'envisager avec lui la meilleure méthode pour résister aux Allemands sans les irriter.)

 

Rentré à Madrid, il dénonça le protocole de Hendaye, qu'il considérait comme dépassé par les événements. Il contestait, en outre, comme il l'avait déjà fait, que la prise de Gibraltar pût avoir une valeur décisive pour la conduite de la guerre si le canal de Suez restait ouvert aux Anglais. ( F )

 

 

 

 

 

 

Résistance

 

 

 

 

 

 

 

 

la suite dans mes

DOCUMENTS

 

resistance

 


 

 

Réseau

Libé Nord

 

D'abord journal clandestin, dès décembre 1940, Libération-Nord se transforma en novembre 1941 en un mouvement de résistance. Se voulant l'expression des mouvances syndicales CGT non communiste, CFTC et de laSFIOclandestine, il s'est formé autour de Christian Pineau et de l'équipe du Manifeste des douze. Sans être seuls, les socialistes sont hégémoniques dans ce mouvement.

 CARRICABURU  .  PAUL PUJO

Résistance Fer . Marc

Le mouvement est créé au début de l'année 1943 par Jean Guy Bernard et Louis Armand secondé par tJean Marthelot, avec l'aide des directeurs de la SNCF Albert Guerville du réseau Cohors Asturie et Emile Plouviez. Résistance–Fer est considéré comme Réseau des Forces Françaises Combattantesqui sera rattaché à la Délégation Générale. Après l’arrestation de Jean-Guy Bernard en janvier 1944 c’est Armand qui prend la direction de Résistance Fer, sous le contrôle de Jacques Chaban Delmas


Réseau Castille

Fondée en septembre 1940, la Confrérie Notre-Dame est un réseau de renseignements ralliée à la France libre. C'est l'un des premiers réseaux du (BCRA). Ce réseau français libre est sans doute le plus important réseau de renseignements militaires de la Résistance. Il est aussi l'un des tout premiers créés en France, grâce à un agent exceptionnel envoyé vers la métropole dès l'été 40 par le 2e Bureau de la France Libre, Gilbert Renault dit « Raymond » (plus tard « Rémy »), qui donnera à son organisation le nom de Confrérie Notre-Dame afin de la placer sous la protection de la Vierge.

 À l'automne 1943, la trahison de deux radios, « Tilden » et « Alain », a des conséquences catastrophiques : elle entraîne une centaine d'arrestations, et Rémy doit se réfugier en Angleterre. Mais en décembre 1943, le réseau est reconstitué par Marcel Verrière (alias « Lecomte») à partir des cellules encore actives sous le nom de « Castille » et continuera à fonctionner jusqu'à la Libération. D'après les recherches effectuées, CND-Castille aura compté au total 1544 agents.

Henri dit Dominique PEYRESAUBES ( Résau Belge " Marc- France )arrété le 6 mars 1943 Déporté Buckenwald 14/9/1943 Mort au camp 26/10/43

André HATCHONDO ( +( Réseau CND, puis CND Castille après mars 1943) Parvenu jusqu'a la Libération sans arrestation malgré les hécatombes du réseau. Maire socialiste de Hendaye à la Libération

Pierre DETCHEPARE  ( Réseau LibéNord + Castille-1943 organisé par le Capitaine ( futur général )Bergé.. Organise des passages pour ces Réseaux..Comité Local de Libération

Pierre HARGOUET : Renseignements la frontière.Lieutenant FFI à la Libération.Liaison avec le commandant Passicot ( Réseau Ossau )

Philippe LARRAMENDI Pharmacien à Hendaye Réseau OSSAU

Commant Jean PASSICOT

Denise CALLAU Pharmacienne à Hendaye

Melle MONTAIGNE de ENA médecin à Hendaye

Jean GabrieL MONDET

 Ce relevé de Résistants  n'est évidemment pas exaustif il ne peut que   s'ajouter  au relevé des déportés.

 

 

 

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RESEAU NIVELLE BIDASSOA

Réseau  très local

Implanté à Saint Jean de Luz et dirigé par Jean Louis DUPREUIL industriel luzien originaire de Saint Etienne de BaïgorryLe réseau recueille des renseignements transmis au consulat anglais de Saint Sébastien.  le Réseau sera démantelé lors des rafles les 8 9 et 10 juin, plus d'une vingtaine de personnes seront arrêtées par les rafles de la Gestapo sur  les communes de Saint Jean de Luz  Ciboure dont le maire Mr Aberry et de Hendaye

Peu en reviendront

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Réseau NANA

Réseau Américain

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Réseau OSSAU

Comandant PASSICOT

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Réseau

 

O.R.A

 

Organisation Résistance Armée

 

principal réseau de résistance francais organisé par le général de Gaulle depuis Londres,  et son représentant en France le colonel Rémy

 

.Ce réseau devait recueillir, le plus de renseignements possibles, sur les mouvements  des troupes d'occupation, et faciliter l'acheminement vers l'Angleterre des volontaires et des personnalités voulant rejoindre les Forces Françaises Libres.

 

Correspondant à Hendaye, 

 

Père Armand FILY

 

qui fournit un gros travail pour le réseau.

Père Joseph  Fily (juin 1969 :

Il s’engage en 1939, (deuxième Bureau) et poursuit après l’armistice ses activités d’agent de renseignements (en particulier sur la Côte Cantabrique espagnole). 1941: Réseau Vengeance. Renseignement, organisation de passages clandestins de la frontière pour les réfractaires au S.T.O., résistants, aviateurs abattus. Il ne sera arrêté qu’au mois de juin 1944. À Dachau, le père Joseph sera choisi par Edmond Michelet pour devenir l’homme de confiance des intérêts français. C’est à ce titre, qu’il siège dans le Comité clandestin international en particulier dans le domaine de la solidarité permettra de sauver plusieurs centaines de déportés. Le père Fily reste pour tous les survivants de Dachau, une grande figure.

 

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RESEAU COMETE

 

Le réseau Comète est un groupe de résistance lors de la Seconde Guerre Mondiale. Actif en Belgique et en ,France ses membres ont aidé les soldats et aviateurs alliés abatuts par la DCA allemande à retourner au Royaume uni.

La ligne commençait à Bruxelles où les hommes étaient nourris, vêtus et recevaient de faux papiers d'identité avant d'être cachés. Le réseau les guidait ensuite vers le sud par France  occupée jusqu'en  Espagne neutre et Gibraltar (sous contrôle britannique).

L'Histoire de Comête sera racontée en détail .DEPUIS URRUGNE ET LES FERMES DE BIDEGAINBERRI ,  TOMAS ENEA  et JATXU BAITA , rejoignant la ferme de SAROBE en Espagne point de destination , en ayant fait  de nuit le tour des  3 couronnes , suivi du film racontant cette histoire.

 

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KEPA  ORDOKI

 

Pedro Estaban Ordoki Vazquez  ( Kepa )

 

Défenseur d'Irun, futur commandant du Bataillon Gernika

 

Né le 3 Août 1912 à Irun quartier Meaca, dans la ferme Ibarla. En poursuivant ses études, il pratique divers métiers, en particulier dans le bâtiment. Il milite tout jeune au syndicat STV, puis à l'organisation de gauche ANV. Son service militaire terminé, il se marie au mois de mai 1936. Autant dire que le soulèvement franquiste  du 18 juillet le surprend en pleine lune de miel.Dès le premier jour  Kepa se jette pleinement dans le combat. Quoique nationaliste, il sera l'un des proches  du lieutenant Ortega et de Manuel Cristobal Errandonea. Dès les premières heures c'est lui qu'Antonio Ortega charge d'apporter une lettre à son homologue , le lieutenant des carabineros de Véra de Bidassoa, afin qu'il affirme, avec ses hommes, son engagement pour le camp de la république, ce qu'il obtient .Ordoqui fait partie du groupe de volontaires civils qui,pratiquement dépourvu d'armes de guerre, se trouve pris à Lesaca, dans le premier engagement avec les avant-gardes rebelles. Il sera par la suite de tous les combats, en particulier à San Martial, lors des héroîques journées de fin Août et début septembre 1936.

 

Irun perdu il n'abandonne pas le combat. Il ne passe pas  en France, mais fais retraite avec les derniers combattants par le Jaïzquibel. Après la chute de Saint Sébastien, il est blessé lors des durs combats du Sollube. En mars 1937, sa famille est capturée sur le tristement célèbre navire << Galdames >>. En juin, Pedro Ordoqui est nommé commandement du Bataillon Saint Andrès. Fait prisonnier ,il est successivement interné aux prisons de Larrinaga, Santona et Burgos., et le 3 septembre il est condamné à mort.Son exécution est reportée plusieurs fois.Le 28 juillet 1939 il s'évade de prison. Après un mois de marche clandestineil réussit à atteindre Biriatou.Arrêté par la gendarmerie française. interné au camp de Gurs, il s'évade à nouveau et passe dans la clandestiné.Mais une nouvelle arrestation survient, Kepa est cette fois arrêté avec des journeaux interdits déclarés subversifs.Lors de l'invasion Allemande de 1940, il passe en zone non occupée ( jusqu'au 11 novembre 1942 )Après cette date, à Luchon la Gestapo l'arrête. Torturé il doit être conduit à Peyresourde pour y être exécuté.. Et là encore miraculeusement Kepa réussit à s'enfuir..Repéré et intercepté dans un village, lors des fêtes locales, il trompe une fois de plus ses poursuivants par la promptitude dans sa fuite - 1 -

 

 

 

En 1944, Kepa met sur pied le bataillon Gernika, lequel avec 130 combattants volontaires d'Euskadi, mènera les durs combats pour éliminer les réduits bétonnés des poches allemandes de l'Atlantique.Du 14 avril 1945, jour du débarquement de l'offenssive, au 20 avrille bataillon Gernika participe à ces combats, écrivant une nouvelle page de la lutte des basques pour la démocratie et de la liberté, contre ceux là même qui, il y a 8 ans, presque jour pour jour, écrasaient sous les bombes la ville symbole de leur liberté.Près d'un tiers des << gudaris basques >> seront tués ou blessés. La guerre terninée, Keta Ordiki se retire à Hendaye. Entre temps, en son absence d'Irun une juridiction militaires l'a condamné à la peine de mort . En mars 1960 , il préside les funérailles du

 

   <> - 2 - Puis,  à son tour , meurtri à la fois par le cancer et par les douloureuses divisions du peuple basque, il s'éteint à l'âge de 81 ans, à l'hôpital de Bayonne, le 28 novembre 1993.

 

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1 Récit dans la collection en 7 volumes 1936 La guerra civil en Euskual Herria

 

( Directeur INAKI Egana ) tomre IV

 

2  Premier président de la République Basque

 

 

 

 

 

 

evades de france

 

 

Mes camarades, Raoul LANOT  en 1   , et  Jean RACHOU  en 2 . ont  franchi la Bidassoa , ont été fait prisonniers par la Guarda civil , enfermés au camp de Miranda et après quelques mois de détention , dirigés vers le Maroc.

Là ils se sont engagés dans la deuxième DB du Maréchal Leclerc , fait le débarquement de Normandie et Libéré Paris. Ils ont continué  leur  course vers  Strasbourg pour terminer au nid d'aigle de Hitler à Bertesgaden   dont ils se sont emparés. Tout celà sans jamais cesser de combattre. 

Joli parcours pour nos deux Hendayais de vingt ans.

 Il doit y en avoir beaucoup d'autres  que nous ignorons et que nous voudrions bien connaître.

A la libération nous nous sous nous retrouvés tous les trois à Paris. Nous  n'avons pas parlé de la guerre.

 

En 3 Je pense à Roger Caubet que rencontrais par le plus grand des hasards sur la place qui fait  façe à la grande poste d'Alger. Nous nous croisions, j'ai vu un marin avec son bérêt et son popon rouge.  Stupeur,.. venir de si loin et se retrouver si près,. Un grand moment pour nous deux

.Nous avons parlé longuement dans le café le plus proche .Il devait retrouver son navirre de guerre qui patrouillait en Médierranée à la recherche de sous marins allemands ou italiens ,assez nombreux. Ils nettoyaient le chemin que nous emprunterons lors du  débarquement en Provence.

Roger de retour sera facteur à la poste de Hendaye.

En 3  Loulou Rivière résistant de la première heure qui sera déporté et écrira le livre de ses souvenirs

En 4  le conteur.  

 

photo

   

ffi

 

 

second guerre m

 

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deportation

Etat des Déportés-de L.Rivière

 


Etat des déportés par  Gérard Lafon

 

LISTE COMPLETE DANS

 DOCUMENTS  

a faire

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Hendaye toujours occupée par l'armée allemande allait connaitre une de ces journées les plus noires de son histoire . Une rafle de la Gestapo à  l'aube des  9 et 10 juin 1944 permit d'emmener vers les camps de déportation le Maire de Hendaye, son adjoint, ainsi que divers conseillers municipaux, le curé. de Hendaye-plage . Il faut souligner le courage de ces hommes, pour la plupart résistants et membres du groupe LibéNord qui, prévenus  de l'imminence de leur arrestation, après une décision commune, ne s'échappère pas, évitant à leur famille des représailles.

Léon Lannepouquet , maire depuis 1925, Jérome Faget adjoint, Dominique Testavin, secrétaire,Joseph Artola et et Jean Darbouet conseillers municipaux, Jean Courrège hôtelier, moururent à Dachau

A cette liste s'ajoutent L'abbé Simon  Paul ,curé de la plage.Seuls Julien Carricaburu, et le père Fily revinrent vivants .

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Notre commune peuplée de 6436  habitants paya un lourd tribut pour la victoire du 8 mai 1945

63 déportés se composant en 60 hommes et de 3 femmes dont une de 19 ans

10 hommes de moins de 20 ans 

 combattants  : 37 sont morts en martyrs 

3 internés en vue de déportation dont 1 fusillé 

34 combattants " Morts pour la France"

63 évadés de France  dont 2 sont morts 

165 prisonniers de guerre 

63 évadés de France " morts pour la France "

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Plaque à la mémoire des déportés

 

les camps d'internement

 

Auswitch

 

Auswitch


Ravensbruck


fours crématoires


 

 

Buchenwald


Nourriture du camp de DACHAU

Matin : 350 grammes de pain, 1 demi-litre de succédané de café

Midi : 6 fois par semaine 1 litre de soupe (avec carottes ou choux blanc)

1 fois par semaine i litre de soupe aux pâtes. 20 à 30 grammes de saucisson ou fromage et 3 quart de litre de thé

3 fois par semaine : 1 litre de soupe

 

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BORDABERRY Résidence du Général Brutinel

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Churchill à la plage

 

 

 

 

 

Retour au sommaire

 

 

 

 

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10 septembre 2013

Guerre civile au Pays Basque 1936

Harrieta171

 

4 ème PARTIE..


1936 GUERRE d'ESPAGNE -- IRUN 

voir documents  VIDEO

 

 

Le RESEAU COMETE  film VIDEO

                                                                                                           

1946/1954La guerre d'Indochine  

                                                      

1954/1962La guerre d'Algérie     

                                                          

1972  1974  Fête HENDAYE AUTREFOIS Gaztelu- Zahar    VIDEO                                                                                                                                                                            

 

 

guerre civile au pays basque 1936

 

La célèbre photo de CAPA


 

Le remarquable livre de l'Hendayais  Jean Serres " ETE 36 " raconte avec minutie, compétence.

 

Avec

Mes souvenirs

.Il   fut envisagé en 1928 la construction d'un pont qui relierait Hendaye

à  Fontarrabie. Ce projet devait être bien avancé car  cette année    vit la pose  de la première pierre. Le roi Alphonse XIII s'était déplacé, et d'avion un bouquet de fleurs avait été lancé au milieu de la Bidassoa. Evènement fondamental pour Hendaye  , une grande partie de la populaion s'était déplacée à  " la pointe " de la plage..  J'avais 9 ans et je voyais pour la première fois voler un avion. J'en ai gardé un vif souvenir.

Il n'y eut pas de seconde pierre.

 .Sept ans plus tard je verrai entre Hendaye et Fontarrabie des avions semblables   lâcher non des fleurs mais des bombes.

 C'était en 1936 et la guerre fratricide était pour bientôt.

Pendant cette période - qui dura 7 ans - et qui vit Primero de Ribera prendre et perdre le pouvoir, la situation ne cessa de se dégrader, la révolution industrielle avec ses grèves, ses mouvements sociaux , politiques et anarchiques, les guerres hispano américaine, la lutte incessante entre les paysans miséreux et les grands propriétaites fonciers, les nationalisme , la lutte contre l'église toute puissante,  et à la suite d'élections  l'avènement de la  Deuxième République le 14 avril 1931 et ses déchainements, l'Espagne    tomba dans le désordre.

Pourtant je me souviens que l'arrivée de cette deuxième république avait crée  une grande émotion.  Le Maire de Hendaye Léon Lannepouquet et une grande partie  de sa population, le Maire de Irun suivi d'une foule en liesse, se recontrèrent sur le pont international.

Embrassades, tapes  sur le dos, tous ce monde se dirigeat vers la place de la Mairie pour continuer la fête.

 Pas moi  car mes parents jugèrent que j'en avais assez vu.


Celà dura peu de temps
 Car la folie de la TERREUR ROUGE embrasa l'Espagne
. Pour l'historien français Guy Hermet, le massacre des prêtres espagnols représente « la plus grande hécatombe anticléricale avec celles de la France révolutionnaire  . Des groupes  anarchistes s'en prennent à des prêtres et à des églises dans les premiers mois de la guerre civile, le clergé catholique étant souvent vu comme un bastion du conservatisme et de l'ordre établi. L'historien britannique Antony Beevor cite le chiffre de 13 évêques, 41 814 prêtres, 2 365 membres d'ordres divers et 283 religieuses, pour la plupart tués au cours de l'été . . Des prêtres sont brûlés vifs dans leurs églises, et on signale des cas de castration et d'éviscération. Les violences contre le clergé ont lieu à peu près partout sauf au Pays basque  d'Espagne.

La TERREUR BLANCHE eut lieu conjointement avec la même violence.
Au Pays basque, la répression visa notamment le clergé et les milieux catholiques, des listes de prêtres accusés de sympathies séparatistes ayant été dressées.
Dès l'été 1936, des militants laïcs et des syndicalistes chrétiens sont exécutés en nombre, sans que le nombre des victimes soit exactement connu . Les figures de l'intelligentsia catholique progressiste ou simplement libérale sont traitées en ennemies. Le 15 août, à Pampelune, des Phalangistes et des Requetés font cinquante ou soixante prisonniers, dont des prêtres soupçonnés de séparatisme basque : les otages sont tous fusillés, les phalangistes refusant de laisser aux prêtres le temps de les confesser. 2789 victimes seront plus tard identifiées dans la province. A l'arrière du front, dans les zones nationalistes, la Phalange organise des escadrons mobiles pour mener à bien des opérations de nettoyage, afin de réaliser l'amputation des « membres gangrénés de la nation >
Au cours de la journée du 19 juillet se déroule à Pampelune la grand-messe du Carlisme et du Franquisme prélude au départ pour une croisade sous les auspices du "  "  Christ Roi "

Tout est prêt pour un affrontement

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L'annonce du " Pronunciamento"

Le 18 juillet dès 6 heures du matin Mola décrète l'état de guerre

 -Une déclaration l'annonce sur les murs

 .Moi Emilio Mola

déclare : hésiter une minute de plus serait un crime .....  L'Espagne offre aujourd'hui le spectacle de la misère du sang et de la douleur....L'Armée, la Marine , fidèles à leur vocation de se sacrifier pour la Patrie, se soulèvent pour empêcher l'Espagne de sombrer dans l'abime

Le    17 juillet 1936 dès l'annonce codée  ,  le Tercio et les Régulares se soulèvent à Ceuta   le 18         Franco quitte Las Palmas pour Casablanca, le 19 à Tétouan ,et par radio il  annonce le soulèvement         

Les officiers  fidèles à la République sont fusillés.

 Et la guerre civile commença   avec le message codé avertissant que la rébellion à commencé

 

                  Sur toute l'Espagne le ciel est sans nuage ! 

 

L'Armée : le Tercio et les Régulares se soulèvent à Ceuta
  le 18    Franco quitte Las Palmas pour Casablanca,
 le 19 à Tétouan ,et par radio il  annonce le soulèvement         
Les officiers  fidèles à la République sont fusillés.

 Et la guerre civile  commence

En Navarre ,les nationalistes basques seront soumis à des arrestations et à d'insoutenables pressions sur eux et leur famille pour qu'ils interviennent auprès de leurs frères de Biscaye et du Guipuzkoa afin que ces derniers optent pour la neutralité dans ce conflit.
 Ces deux provinces resteront fidèles à la République.
 Mola lance une violente répression dans toutes les villes de Navarre  ou 2728 républicains sont fusillés et aussi en Alava , où des exécutions massives ont lieu en particulier chez les syndicalistes.
Mola incorpore plusieurs centaines de jeunes soupconnés d'être de sensibilité républicaine ou nationaliste. .Un grand  nombre d'entre eux seront fusillés,avant  que de combattre,sur simple suspicion
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Rapidement l'inquiétude grandit et avec des accents solennels, des appels pathétiques sont lancés par les leaders politiques
 .Dolorès Ibarburri la " Passonaria " lance "No pasaran  "
A Irun les militants des partis composant le " frente popular " se réunissent dans la soirée et lançent un appel commun.
 Les militants ouvriers se rassemblent .Beaucoup sont venus avec leur fusil de chasse, réclament des armes
. Puis des groupes s'organisent par affinités politiques .Les premières " Juntas de Defensa local " sont mises sur pied.
A Fontarrabie, Renteria, Pasajes, l'ambiance  est identique à celle d'Irun. Le Guipuzcoa s'organise.

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A Pampelune les rues se remplissent de volontaires qui vont défiler sur la Plaza Mayor avant de partir à l'assaut des provinces restées fidèles à la République
Au côtés des bataillons militaires disciplinés et bien encadrés, il y a  les réquetés volontaires Carlistes coiffés de la " boina roja " , le traditionnel béret rouge, portant un brassard vert marqué d'une croix, et sur la poitrine, le Sacré Coeur de Jésus accompagné de nombreuses médailles. Les religieux défilent un par un pour  faire au drapeau franquiste sang et or , le baiser symbolique du ralliement et donner la bénédiction à ceux qui vont partir pour la grande croisade contre l'odieux matérialisme républicain, contre l'antéchrist " Et le journaliste poursuit  : "  Ils haïssaient l'idée même d'une éducation laïque. Les maîtres envoyés par Madrid pour instruire leurs enfants leur paraissaient de monstrueux agents qui devaient être éliminés. Jusqu'aux maitresses qui furent fusillées ou promenées dans les rues de Pampelune le crâne rasé."
                                                                                                                         


 

La guerre commence sans combattre à Saint Sébastien .

La rébellion  , compte sur loyalisme de  de la caserne de Loyola qui est une pièce maitresse dans le rapport de forces  de cette province  .
L'état de guerre est proclamé   .  Les soldats et leurs chefs aidés  de partenaires civils de la phalange , de groupes armés,  tentent de prendre la capitale du Guipuzcoa : DONOSTIA  .( St Sébastien )

Ils se heurtent à une mobilisation massive unie et spontanée des forces populaires ,  des apports des  ouvriers ,de socialistes , communistes ,  de syndicalistes ,de nationalistes basques  , de volontaires d'Eibar ou de Bilbao , de mineurs de Galice   .Trois journées de combats   les 21,22,23 juillet   les militaires atteints dans
leur moral  rentrent dans leur caserne.
 Saint Sébastien est sauvée   , les franquistes emprisonnés.
Les représailles seront impitoyables .

La Grand-messe terminée, très vite, tout  est prêt pour que les premiers éléments, bien encadrés, se lançent à l'assaut de la vallée de la Bidassoa
Une colonne  placée sous le commandement  du colonel Béorlégui s'oriente vers Véra de Bidassoa, une autre contournera  le massif de la Haya  en passant  par Pagona,Erlaitz, le Castillo del Ingles  Oiartzun et Donostia, et une autre  vers San Martial

DANS L'ESPAGNE REPUBLICAINE
TOUT EST IMPROVISATION AMATEURISME ET EMPIRISME

la défense de Irun un revolver à la main

 

A Irun, dont l'une des premières mesures prises par  le Maire Jaime Rodriguez Salis , est  l'annulation des fêtes du quartier d'Elizachu, et  lance un appel aux adhérents de toutes les formations républicaines pour qu'ils se rassemblent auprès des sièges de leur organisations.

Pour nombre de  ces hommes et de ces femmes, la nuit de veille qui débute sera le point de départ d'une longue épopée. Leur préocupation première est de mobiliser leurs compatriotes de rassembler le maximun d'armes individuelles, fusils de chasse pour la plupart.

 Les premiers  groupes armés commencent à se former." Ils se constituent par affinités, par sympathies, sous le commandement improvisé du plus décidé, du plus charismatique ou de celui qui a été le plus en vue dans les luttes sociales. Il n'existe aucun sens des valeurs  et de l'organisation militaire.Tout est improvisation et empirisme.

A Irun l'enthousiasme populaire et le désir d'affronter l'ennemi sont tels que des groupes autonomes de jeunes s'avancent jusquà Lesaca, dans le but d'attendre  la troupe rebelle au niveau du pont d'Enderlaza . Sans  chef , sans sans encadrement, armés de fusils de chasse, leurs  munitions  se limitant  à dix cartouches par homme. Arrivés sur les lieux et  n'ayant pas constaté d'ennemis ils s'en retournent sur Irun.

Mais l'urgence pour Ortega et son embryon d'état - major, est en ce jour de faire sauter au plus tôt le pont  d'Enderlaza , lequel laissé en l'état, offrirait un boulevard vers Irun. Appel lancé aux camarades des Asturies  rodés aux pratiques,des explosifs,pour réaliser cette  opération réussie , l'explosion coupe le pont en deux parties

Béorlegui colonel de l'armée rebelle réléchit à la solution du problème posé par la destruction du pont d'Enderlaza, Heureusement pour lui les jeunes Irunais avaient pour un court laps de temps  pour faire sauter le pont suivant. La voie était toujours ouverte

Malhereusement  ce ne put être fait

Jaimé Rodrigues Salis , neveu du Maire de Irun, luis Salis, apporte un témoignage d'ambiance sur le secteur  d'Enderlaza: " A 500 mètres du parapet, et dissimulé derrière la première courbe, une cantine était installée .Une espèce de tente avec des tables en planche comme celles installées à San Martial  les jours de fête.Une abondance de chorizos, de jambon, d'oeufs et de ventrêches assurait l'alimentation (.....) C'était le populaire Goyenechea d'Irun, dit  " El Cope " qui assurait la fonction de cuistot .

 

DU COTE DES REBELLES PROFESSIONELS DE LA GUERRE


- le Tercio étranger venu d'Afrique , une armée de métier et habituée aux affrontements au Maroc

-Les Carlistes et les volontaires   réquétes ivres de revanche

-des mitrailleuses, des fusils dernier modèle,des chars italiens

 -des avions Italiens Caproni  et des avions allemands Junker

 -un encadrement de professionels,

 

Malgré l'immense courage des premiers, leur attachement à la République,  la lutte était inégale et inscrite dans le temps

Pourtant, il aura fallu cinquante jours pour abattre la résistance héroîque des Gipuzkoans, pour gagner mêtre par mêtre  la vingtaine de kilomètres qui  séparaient les rebelles de la victoire,au prix de milliers de blessés et de morts, de monstruosités qui sont encore dans toutes les mémoires  : salut à ces héros ordinaires .

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 l'exode

 

28 Août  une partie de la population est déjà partie pour la   France 

Le 30   l'exode par les ponts internationaux de Hendaye et de Béhobie  s'accentue au fil des heures, pour arriver massif  à partir de 22 heures. Jusqu'à une heure avancée de la nuit un interminable cortège de pauvres gens traînant leurs enfants en bas âge, leur poussette ou voiture à bras,  leurs matelas sur lesquels, ils s'allongent parfois  épuisés

.A minuit ils étaient 1500 à deux heures 4500. Hendaye est envahie de réfugiés

Le 31 Août  L'exode massif se poursuit. Dès 8 heures du matin le flot bruyant et désordoné  reprend  intensément et dure toute la journée fuyant les bonbardements , les combats, ils sont vite 5000 autour de la gare de Hendaye ou les secours débordés, s'organisent, entre Bidassoa et Adour un grand élan de solidarité  qui va se développer.Les blessés quitent les hôpitaux d'urgence pour Bayonne, Tarbes ou Bordeaux

Déclanchement de l'offensive générale

 

Le mardi 1er septembre irrité par une surprenante résistance républicaine, le Général Franco radiodiffuse à ses troupes du front nord, l'odre du jour suivant  "Ce mardi et sans  qu'aucune raison contraire puisse être alléguée, il faut que Irun soit en notre pouvoir "

 Et la guerre va reprendre de plus belle avec tous les moyens possibles

 

 

Curieux j'avais eu envie d'aller voir. Dès l'enfance j'avais été nourri par cette guerre de 14/18 , mon père avait été gazé à Verdun, des oncles étaient morts  , le magazine " L'Illustration " , des journaux d'enfants  , des bandes déssinées comme "Un poilu de 13 ans " avaient parcouru mon adolescence. Donc j'étais allé au dessus de Béhobie  à la redoute Louis XIV qui domine  la vallée d'une centaine mètres.

 La Bidassoa me séparait de l'Espagne.   Soudain venant de Irun, je vis arriver  quelque chose de  mobile  entouré de toutes parts, même sur le toit, de matelas. Je devinais un train réduit à une locomotive et un vagon qui cheminaient poussivement et  disparurent au premier  tournant.

J'ai su plus tard que c'était le tortillard qui servait à transporter du minerai.  Celà paraissait de prime abord dérisoire, et pourtant il partait courageusement  combattre  l'ennemi.

Il aura lutté pendant toute cette période, ne capitulant jamais.

Les rebelles étaient parait-il sur le point de  paraître.

 Des balles commençaient à siffler je pris le chemin du retour.

 Dans la nuit, Béhobie aprés de féroces combats , capitula.

le croiseur Canarias

croiseur Almirante Cervera

San Martial offrit une très grande résistance


Le mont Saint Martial, de 220 mètres de hauteur, à 3 Kms de Irun constituait la dernière ligne de défense de la villle.

 IL avait été fortifié de façon très sommaire avec des tranchées et des fils de fer barbelés.

 Les canons lourds des forts de la  Guadalupe et de Saint Martial essayaient tant bien que mal de contribuer à sa défense, mais le défaut d'officiers artilleurs insuffisament compétents rendaient nuls la plus part de leurs coups.

 Depuis le 26 août Saint Martial résistait aux attaques frontales et aux bombardements par l'artillerie et l'aviation. Les assaillants étaient des volontaires réquétés, la légion des unités de goumiers marocains, et des centuries de la Phalange .

 La Presse du Sud-Ouest  décrit ainsi les premières opérations de cette vaste offensive

 " Ce  matin  à 7 heures débute le bombardement sur Irun  , San Martial  et les hauteurs environnantes. Une mitraille considérable  est déversée par l'aviation - Capronis et Fokers -, l'artillerie et les mitrailleuses  Sous un tel déluge, la réaction des gouvernementaux semble faible  Ce fut le signal de l'offensive la plus acharnée.  "

mais  une fois de plus , l'infanterie sera dépassée

Vers 10 heures les rebelles  s'infiltrent et  en fin de matinée, les assaillants réussisent la pénétration dans le premier rang défensif de San Martial . au prix de lourdes pertes

Kepa Ordoki fait ainsi le réçit de ces heures terribles :" Sans troupes de relève, affamés, sans munitions,épuisés nous commençons à céder nos positions."

Après être allés jusqu'aux limites de la résistance, à 16 heures les républicains se repliaient ,les insurgés hissaient le drapeau rouge et jaune sur l'Ermitage, le sort d'Irun en était jeté "

 

San martial prise, Irun en vue directe , ne pouvait plus résister

Mercredi 2 Septembre

 

La Journée décisive

Irun et toute la vallée de la Bidassoa sont ce matin recouverts d'un intense brouillard. Pourtant, cette huitième journée de  l'offensive rebelle va connaître le paroxysme des combats ; elle restera dans l'histoire de la bataille d'Irun, comme le point culminant,  la journée charnière où tout va basculer.

A 11 heures, sous un déluge de feu, c'est le déclenchement de l'offensive générale.Tout  à coup se déchaine avec une violence jamais connue jusque là.

La Presse du Sud-Ouest écrira : " Entre 12 et 14  heures la fusillade  et la canonnade

atteignent une intensité jamais connue à ce jour.

 

 

Jeudi 3 Septembre

Les combats de Béhobia

Si la journée du 2 septembre, fut, celle déterminante, de l'effondrement de toute de défense d'Irun de Zubelez à Puntta, ce jour est essentiellement marqué par les combats pour la défense de Béhobia

 En plein centre d'Irun " de  violents combats de rues se livrent dans la ville

 

Vendredi 4 Septembre

Assaut final sur Béhobia

Agonie dIrun

 

A Irun règne la désolation et la nervosité d'une ville sur le point d'être abandonnée.

Elle est  avec une cadence rapprochée, constamment bombardée par les croiseurs Canarias et Almirante Cervera . et aussi par les tirs des canons de San Martial maintenant occupée

 Toute la nuit , les ponts de Béhobie et de Hendaye sont traversés par un flot de civils avec leurs animaux familiers,, il parait ce soir évident à tous que le sort de Irun vient de se jouer.

Ce Vendredi 4 septembre dès 1 heure du matin,déferlant des pentes dominant  Béhobia ,légionaires et marocains pènétrent dans les zones périphériques est et sud d'Irun. A 2h30 l'ordre de l'assaut final contre Béhobia est donné

Dans l'obscurité tolale, une pluie torrentielle transforme le champ de bataille en bourbier.

 Béhobia est le théatre d'une lutte acharnée, allant jusqu'au corps au corps.  

Les républicains résistent juqu'a la limite de leurs munitions

Cette terrible bataille de nuit réveille en sursaut les habitants de Hendaye et les tient angoissés jusqu'au jour .

 Le Sud -Ouest Républicain de ce jour écrit :" N'ayant plus de rubans de mitrailleuses ni  de cartouches dans leurs fusils, leur artillerie faute d'obus ne tirant plus qu'à de faibles intervalles, les enfants du peuple se seront défendus comme des lions et n'ont cédé le terrain que mètre par mètre. " au corp à corp, à l'arme blanche

A 5 heures du matin Mola est présent.

A 6 heures , trois colonnes composées de légionaires et de réquetés déployés en tirailleurs reprennent leur avance le long de la Bidassoa et sur toutes les pentes descendant de San Martial.

  Elles atteignent les premières maisons des quartiers périphériques  d'Irun désertées de leurs habitants. Aux approches de la ville ses défenseurs creusent fébrilemment des tranchées et édifient des barricades.

 Le correspondant du journal " la Dépèche "  écrit  :"Terrible fusillade. La  bataille poursuivie avec le plus sauvage acharnement par les troupes de la Légion étrangère du Tercio, les réguliers marocains et les Carlistes., a repris dès avant l'aube

.A 7 heures à la pointe du jour, un semblant de sursaut des miliciens se dessine sur la route Béhobia-Irun. Quelques maisons pourront  être prises, mais vite reprises par les assaillants. L'artillerie rebelle, pilonne sans cesse, intensèment

Les croiseurs,à intervalles réguliers, causent des dégas considérables

C'est semble -t-il l'un de ses obus qui a fait mouche sur la fabrique d'allumettes transformée maintenant en un immense et spectaculaire brasier..

 Depuis Hendaye on voit ces hautes colonnes de fumée noire montant vers le ciel...Pourtant c'est là que les miliciens tentent de résister jusqu'à leur dernière cartouche.  Le petit  "Torpedero " garde- côtes espagnol qui stationnait au bas de Fontarrabie tente une sortie aventureuse, avec un bruit tel que les

Hendayais l'appelaient le Taraparaka; Il s'échouera sur le premier banc se sable de la baie .

 A 8 heures les avant-gardes franquistes reprennent leur avance., progressant irresistiblement

A 9 heures, en cette matinée pluvieuse, la Légion et les régulares marocains avancent vers le centre ville  d'Irun, suivis de près par les réquetés. Les rebelles progressent irrestiblement.

 La bataille de rues commence, mais la résistance des miliciens faiblit d'heure en heure. Le crépitement de la fusillade  est bientôt général . Le temps et la pluie ajoutent encore à l'affreux spectacle.. Les  gouvernementaux reculent   pied à pied " .Dans la ville martyr, submergée de balles, d'éclatement d'obus, de bombes incendiaires, mitraillé par les tanks et les canons d'accompagnement, le spectacle dépasse aujourd'hui toutes les horreurs que l'on pourrait décrire  <>

Un important stock de dynamite en gare d'Irun ,mis en feu  par une balle perdue provoque une gigantesque explosion. L'effet sur la population est considérable

.La panique atteint son paroxysme.

.Paris soir  -   " Dites bien que nous tiendrons jusqu'à l a mort et que nous ne capituleront pas  "    En vain .  Alors certains éléments  commencent à allumer des   incendies avant d'abandonner la ville. Un spectacle surréaliste et effrayant débute. Un à un les foyers se multiplient. Très vite tout le ciel est obscurci par les colonnes de  fumée

 La France de Bordeaux et du Sud Ouest  décrit ainsi la situation . << Irun est en cendres.Les cadavres des miliciliens, travailleurs, soldats armés pour la République, jonchent les rues. >> Le premier soin des franquistes sera de piller les magasins. Leur deuxième occupation  de fusiller, les républicains faits prisonniers. Les rues ressemblent maintenant à un abattoir ( Dailly Herald )

 

C'est le début du grand incendie d'Irun


juste avant


que la frontière ne se ferme

 

refugie devant la gare hendaye

 

SOKOBURU " la pointe "


La pointe devenue Sokoburu

A droite côté Baie de Txingudi, langue de sable  ou accostaient les bateaux chargés de fugitifs angoissés, soldats blessés, civils, femmes et enfants

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A gauche  à une centaine de mètres la plage,  où  les enfants jouaient ou se baignaient, et où les estivants et Hendayais prenaient le soleil en  toute quiètude


Incendie et bombardement de Irun

 

 

 

 

 

 

 

LA GUERRE CIVILE

VUE DE HENDAYE

 

Le samedi 15 Août, à 19h30, un avion trimoteur Junker immatriculé ECAAY survole Biriatou à 200  mètres d'altidude il largue quatre bombes sur la commune.

La première sur la terrasse du restaurant Etchandia pleine de touristes , la deuxième sur le restaurant Contresténia, défonçant la toiture, la troisième sur une maison attenante au fronton, et la quatrième devant la ferme Candide située à un bon kilomètre de la frontière

On ne signale pas de victimes Dans la journée du 19 Août, des excuses sont adressées à la France par le gouvernement espagnol.

 Le  mercredi 26 Août, dès le déclenchement de l'offensive générale rebelle, de nombreuses balles perdues ou d'éclats d'obus sifflent un peu partout à Hendaye, Béhobie et Biriatou. Plusieurs édifices sont touchés, dont le poste de douane de Béhobie où le contrôleur Dussert est atteint d'une balle dans la jambe

Sur Hendaye, un premier civil M.Laporte, ( 50 ) ans, se trouvant dans son jardin, est blessé d'une balle à l'épaule. Il a été transporté à la clinique Delay à Bayonne.

Vers 14 heures le commerçant du centre ville M. Lacoste est également atteint d'une balle à l'épaule. Le projectile lui a été extrait à la même clinique

 , les retombées de projectiles divers s'accentuent, tout particulièrement sur le quartier de Santiago et sur Béhobie

.Le journal la presse du Sud-ouest du vendredi 28 écrit :<< Beaucoup de balles perdues un peu partout à Hendaye : aux allées Santiago,  route de Béhobie à Aizpurdi. La circulation vers Béhobie est déviée par la rue du Commerce. Les stationnements de promeneurs sont interdits en haut de la côte de la gare.(....)

On signale plusieurs obus tombés en territoire français, au delà de la Bidassoa

Ce même jour à 14 heures, Madame Abadie ( Antxonie ) née Argoitia est atteinte d'une balle dans la cuisse devant la maison de son père,le  boulanger de Béhobie. Un médecin lui extrait le projectile ..

Le vendredi 28 Août à 19 heures, un obus tombe à trente mètres de la gare de Hendaye, dans le jardin de la villa Gabardenia sans éclater. Les services artificiers se rendent sur place pour désamorcer  et retirer l'engin

Le mercredi 2 septembre , < Béhobie est criblée de balles et parait être en pleine en pleine zone d'hostilité.

Pas une maison qui n'ait reçu de balles .Des obus sont tombés.   Le mari de la receveuse de la Poste a été blessé au bras >> écrit la Presse du Sud - Ouest du lendemain  3 septembre. Deux obus tombent dans le jardin du présbytère..Le jeudi 3 septembre, un citoyen de Biriatou est mortellement blessé par un éclat d'obus.

 C'est un peu avant 8 heures que M José Angel Zubiarren, 64 ans de la  maison Arrupé , est touché à la jambe. Transporté à l'hôpital de Bayonne. il y décède le même jour à 14 heures.

 On compte déjà à Hendaye une vingtaine de blessés, soit soignés sur place, soit transportés à Bayonne.

Le vendredi 4 septembre , Jean Andueza de Béhobie chauffeur de M.Pucheu, adloint au maire de Urrugne, est tué par un obus à Irun où il s'était rendu dans un appartement dont il était propriétaire, pour récupérer quelques affaires. Il sera enrerré à Irun.

 

 Je crois que ces balles " perdues " ne l'étaient pas pour tout le monde

Il suffit de regarder la direction des combats.  De Béhobia à Irun  la ligne est parallèle à la  frontière et longe la Bidassoa, c'est à dire vers l'ouest. Hendaye se trouve au nord donc à  l'abri des balles.

La France était l'ennemie qui soutenait et ravitaillait les républicains.Ces balles perdue en telle quantité, étaient plutôt des balles de représailles .

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Au bout  de la plage un très petit bois , des tamaris, quelques buissons ,une baraque en planches, un petit bar qui servait  de la bière et des sandwichs au paté de foie,  tenu par Madelon Bassagaitz . Nous y allions tous les jours après nous être baignés.  Quelques tables , des chaises métalliques, sur le sable, des oeillets sauvages, et des "puces de mer" tranlucides et inoffensives . Un endroit paisible, où nous buvions des "panachés", et attendions la rentrée.

Une étroite langue de sable qui séparait la baie de la mer .Un endroit désert en hiver peu fréquenté en été parce que trop loin de tout .A Hendaye la  plage est couverte de tentes et de parasols. Des centaines de joyeux vacanciers s'adonnent  insouciants au plaisir de la baignade. Ceux qui viennent de traverser la frontière ont l'impression qu'il s'agit de deux planètes différentes. Comme pour ajouter encore à ce contraste s'est déroulée dimanche 23 la récente fête basque défilant en bandas joyeuses, derrière les chars de la cavalcade.

Entre le côté mer et le côté Bidassoa une centaine de mètres, guère plus.

 

La guerre n'était encore qu'un bruit qui brusquement se transforma. Au large deux taches sombres se mirent  à tirer des obus,  on voyait distinctement  l' éclair de départ, on entendait au dessus de nos têtes comme le frottement  de l'air , et une ou deux secondes après du côté de l'Espagne  une explosion violente, soit sur la montagne en direction de San Martial soit à Fontarrabie au fort de la Guadeloupe. La guerre nous avait rattrapés. Plus tard les tirs se rapprocheront et viseront directement Irun dans un déluge de feu ,des débuts d'incendie et un fracas de bruit.  La guerre était là et allait durer plusieurs jours.

Et l'exode allait commencer Tous les petits  bateaux de pêche  de Fontarrabie déversèrent sans arrêt , des  flots de vieux de jeunes d'enfants , et de soldats

Très peu  tentèrent de traverserà la nage car le courant est dangereux.  Les photos , mieux que de longues phrases, nous décrivent cet épisode.  Ce qu'elles ne disent pas c'est le désespoir des familles, les blessés à même le sol  .Et puis de jour en jour en augmentant, la foule de toutes sortes de gens : des curieux de toute la région, quantité de journaliste français mais aussi étrangers, des responsables  ,médecins, infirmiers pour les soins immédiats, les taxis pour évacuer les blessés dans les hôpitaux, ou les répartir dans les villes voisines, pour les loger, leur donner à boire ou à manger.  des observateurs de différents pays .

Parmis ces curieux , j'ai vu un homme, s'adressant à un blessé couché sur le sol. Il l'injuriais, le traitant de sale communiste et l'invitant à retourner chez lui Le soldat ivre de fatigue hébété, le regardait sans comprendre

Le flot incessant des  vieillards, des enfants des femmes , des combattants dura jusqu'à la prise de Irun par les insurgés de Franco

. Hendaye eut pendant toute cette période, un comportement exemplaire. De nombreux blessés , avant d'être dirigés vers les hopitaux de Bayonne ou de Bordeaux étaient soignés au grand magasin  Boka maintenant " A l'élégance " où sont accueillis, le 4 septembre   120 blessés  dont 20 grièvement. A ce sujet je me souviens avoir été réquisitioné par Madame Carricaburu l'épouse du directeur d'école pour distribuer -entre autres - du " vin chaud " en pleine chaleur de Septembre. Les blessés couchés à même le sol buvaient ce breuvage sans comprendre et sans grande conviction. <<C'est un cortège ininterrompu de miliciens couverts de pansements sanguinolants écrit le correspondant du journal  La Dépêche. >>

Outre les réfugiés et blessés Hendaye est envahie par un flot de miliciens vaincus, décidés à reprendre le combat sur le front Catalan.

Un grand élan solidaire , généreux et spontané de la population a répondu  l'appel pressant de la municipalité en ce sens.  Hendaye  est une ville qui de tout temps a accueilli  nos voisins ,en particulier pendant les guerres Carlistes mais aussi pour toutes  autres raisons.  Ma grand mère était née à Goizueta en Navarre et mon grand père venait du Gipuzkoa, et ils ont eu six enfants nés ici.

 Comment ne pas être solidaire

 En quelques semaines la ville reçoit près de 20.000 personnes et le nombre de réfugiés hébergés chez l'habitants est d'environ 4000.

Du 31 Août au 10 Septembre 13.510 repas furent servis gratuitement . Pendant quelques jours 9428 réfugiés ont été hébergés et alimentés à Hendaye.

Hendaye avait alors 6.436 habitants

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Incidents frontaliers

 après le 7 septembre 1936


 

Nous venons de voir que le territoire français, de Biriatou à Hendaye, n'a pas été sans souffrir des conséquences directes des combats de la rive gauche de la Bidassoa.

 Loin de prendre fin avec la chute du Guipuzkoa, les retombées de cette guerre sur le territoire français, vont au contraire s'accentuer.

 Dès le 7 septembre, découlant d'un amalgame politique dans leur esprit , entre le front populaire au pouvoir en France et le gouvernement Espagnol  d'un type comparable, l'agressivité des nouveaux riverains de la Bidassoa ne va pas tarder à se manifester vivement.

 Ainsi dans la nuit du 16 au 17 octobre 1936 se déroule l'un des incidents les plus graves.

 Les franquistes déclenchent sur Béhobie une véritable

fusillade. A partir de 23h30 entre 200 et 300   coups de fusil sont tirés en direction de la bourgade frontalière française . Puis la fusillade s'est étendue sur plusieurs kilomètres, côté Hendaye et côté Biriatou..( c'est à dire en tout des milliers !  ) A Béhobie une balle a frappé l'intérieur du poste de douane et une autre celui de l'appartement privé de Madame Raspail, qui lui est proche.

 A Hendaye des pêcheurs de crevette qui selon les autorités espagnoles interpellées <<  ont été prises pour un commando de débarquement >>  sic, ont servi de cible aux tireurs espagnols .

Le dimanche 18 octobre, la fusillade se poursuit

 Vers 18 heures la receveuse des postes de Béhobie essuie un coup de feu, aissi qu'un couple promenant un bébé

 Le lendemain 19 c'est le plombier local Jullien Ramirez qui sert de cible, tandis qu'il effectue une réparation sur la voiture de Mme Halzuet, propriétaire des carrières.

 Le mercredi 21 plus d'un millier d'espagnols franquistes manifestent agressivement sur le pont international aux cris de  << vive l'allemagne ! vive l'italie vive l'espagne.  etc  etc...

Lors de l'exposé sommaire des dangers mortels et des centaines de balles qui n'étaient pas << perdues pour tout le monde >> sont tombées sur les trois bourgades, il a été demandé aux spectateurs qu'ils rapportent - pour les témoins de l'époque ce qu'ils ont vu - pour les autres ce que les parents et grands parents ont pu leur dire. Etrangement tous et toutes avaient tout oublié.

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Réunion de Mendi zolan

TEMOIGNAGES

 

M. ARGOYTI


Ce soir là, une conférence devait avoir lieu au théatre des Variétés,

 conférence portant  je pense sur les évènements présents  Ma mère avait tenu à m'y accompagner.Cette conférence tourna court  car arrivés à la hauteur de l'épicerie de Monsieur Guillard, juste avant le passage sur le pont du chemin de fer- pont qui d'ailleurs n'existe plus - remplacé par les constructions de Zubi Etan - , un bruit métallique violent nous fit stopper. Une voiture automobile  à l'arrêt ,  venait d'intercepter une balle de fusil, la balle était là,sur le trottoir à quelques dizaine de centimètres de nous.

Nous fimes rapidement demi tour.

La conférence fut annulée. Effectivement les balles tombaient un peu partout dans la ville  jusque sur la place de la République ou M Lacoste , l'épicier fut blessé.

 


Raphaël Lassallette

« Je suis né le 4 août 1936. Ce que je vais vous dire là je ne l’ai ni vu, ni entendu. Je rapporte simplement ce que m’ont dit mes parents. Le 4 août 1936, je suis né à la rue des Réservoirs qui est toujours aujourd’hui la rue des Réservoirs, la rue que je n’ai jamais quittée dans mon existence puisque le 4 août prochain cela fera 76 ans que j’y vis et j’espère bien y mourir. Le 4 août 1936, à l a rue des Réservoirs deux naissances étaient imminentes à 100 m d’intervalle : la mienne et celle de Jacqueline Artola dont les parents tenaient la conciergerie de ce qui est aujourd’hui la villa Concha. Nous étions donc séparés par 100 m de distance et ce jour-là, la sage-femme avait fort à faire parce qu’elle devait faire des allées et venues entre les deux domiciles. Les naissances à l’époque ne se faisaient pas de manière aussi aisée et rapide qu’elles se font aujourd’hui.

 


Mme DICHARRY


« Il y a eu des balles perdues. A la rue d’Irandatz, à ce moment-là, il y avait des meules de foin. Là, il y a eu quelques balles perdues. Il y en a une qui est arrivée à la maison. Il n’y a pas eu de bombardement.

Il y a eu de l’accueil dans toutes les maisons. Chez nous, une famille entière est venue de Fontarrabie. Ils sont restés quelque temps. On posait des matelas par terre et je me souviens que notre tante faisait des sauces de veau.

A l’Elégance, là où se trouve la Concha actuellement, il y a eu quelques blessés. Des dames de la rue du Port et de la Place de la République allaient leur apporter un peu de café et les réconforter. Il y avait des gens partout. Les gens étaient affolés. C’était l’exode.

C’était l’été. Nous avions le bal tous les dimanches sur la place de la République. Notre maire, M. Lannepouquet, par respect, avait voulu supprimer le bal. Les réfugiés ont refusé. Ils voulaient que le bal ait lieu et il a donc repris normalement.

Il y avait beaucoup de journalistes. L’hôtel Imatz était rempli de journalistes de tous les pays du monde. Ils montaient sur la terrasse pour voir les bateaux qui bombardaient la Guadalupe. Je connais un homme, dont je ne veux pas dire le nom car il était franquiste, qui montait la garde à la Guadalupe. Il devait y avoir des armes ou des personnalités à protéger. »

 

 

Ramuncho SAGARZAZU


« C’est au sujet des balles perdues. Je suis né en 40. Je vais vous dire ce que m’a raconté mon grand-père. C’était Ramuntcho, le taxi. A cette époque il avait été loué par des journalistes parisiens pour voir la bataille de la Bidassoa. Sur le côté du taxi il avait placé des matelas et les journalistes étaient protégés dans le taxi par ces matelas. Ils photographiaient et mon grand-père, arrivé à Biriatou, changeait les matelas de côté pour pouvoir faire le retour. »

 


Mme IRASTORZA

« J’ai plusieurs souvenirs de cette guerre de 36.

J’avais onze ans. J’allais à l’école à cheval et en carriole. Avec ma grande sœur, on allait vendre le lait. Mon travail avant d’aller à l’école, c’était de porter avec deux petits bidons au port de Caneta le lait à deux clients : le receveur des douanes et Mme Correja.

J’avais donc porté le lait, versé le lait dans la casserole et je vois Fontarrabie en feu, des bateaux à rame, des enfants, des jeunes mamans, des amatxis, des atatxis qui traversaient la Bidassoa à Caneta. Alors je me suis mise à pleurer et à regarder ça. J’ai laissé passer le temps et ma sœur m’attendait pour m’envoyer à l’école. Elle m’attendait à côté du cheval et de la carriole, du côté de chez Isidori. Quand je suis arrivée avec du retard, elle me dit : « qu’est-ce que tu as fait jusque là ? Mais l’heure de l’école est passée ! » Alors, je lui ai dit : « écoute, je n’irai pas l’école. » Je pleurais de voir cette misère.

 

Mme PEYRELONGUE

« Mes souvenirs ne sont pas aussi abondants que ceux de ces messieurs. Quelquefois, il y a eu des réflexions indignes, blessantes de gens qui disaient : « esos rojos ». C’était inadmissible.

Beaucoup d’habitants, des chefs de famille du quartier de la Gare, se rendaient devant la Gare où affluaient généralement tous ces réfugiés. Il s’établissait un dialogue entre les Hendayais et ces familles à l’issue duquel dialogue chacun des Hendayais qui se trouvait là, emmenait des réfugiés chez lui ou chez elle.

C’était le cas chez moi aussi et je me souviens, ce sont des images qui se sont imprimées dans ma mémoire, qu’on ne peut pas oublier, beaucoup de gens pleuraient, notamment des femmes et des enfants. On mettait par terre des couchages de fortune. Il y avait un petit jardin, il y avait un petit poulailler, un petit clapier et mon père disait : « il faut partager parce qu’ils sont malheureux, ils en ont moins que nous. »

A table, mon père parlait de filière qui conduisait ces réfugiés vers Montauban ou Toulouse. Il y avait des points d’accueil. Alors, je ne sais pas comment ils se débrouillaient mais en plus de la filière, il devait y avoir aussi des aides parce qu’ils n’avaient pas d’argent. Ils arrivaient cependant à partir. Et quand ceux-là étaient partis, il y avait une rotation qui s’établissait, d’autres arrivaient.

Je vais rendre un hommage à mon amie de l’association Maïté Faget parce que son père a fait un travail énorme. Il avait réussi à établir un accord avec des gens de la SNCF. Officieusement, il avait une filière qui conduisait au nord de la Loire et c’est peut-être pour cela qu’il y a des réfugiés en Normandie et aux alentours. »

 


M. Sallaberry, Maire d’Hendaye


« Je remercie Oroitza de relancer toute cette histoire d’Hendaye. Je crois que c’était une initiative vraiment magnifique.

Agissant ainsi, citoyens, réfugiés, élus, autorités s’inscrivaient dans la continuité des traditions ancestrales de partage, d’entraide et de continuité de vie entre Irun, Hondarribia et Hendaye.

D’ailleurs, ces traditions sont inscrites au cours du temps dans les symboles. Sans vouloir remonter loin, je me permets de souligner les trois faits qui ont été indiqués tout à l’heure : la suspension de l’alarde d’Irun, c’est quand même quelque chose d’important pour la ville d’Irun et puis l’hommage rendu le 14 juillet 1931 en mairie d’Hendaye par M. Salis, maire d’Irun, accompagné de son conseil municipal, porteur d’un message du Ministre espagnol des travaux publics. Il s’agissait de remercier, à travers leur maire, les Hendayais pour avoir accueilli entre 1924 et 1931 une grande partie de l’intelligentsia républicaine espagnole. Et puis la présence de nombreux réfugiés aux cérémonies

M. Sallaberry, Maire d’Hendaye

« Je remercie Oroitza de relancer toute cette histoire d’Hendaye. Je crois que c’était une initiative vraiment magnifique.

Agissant ainsi, citoyens, réfugiés, élus, autorités s’inscrivaient dans la continuité des traditions ancestrales de partage, d’entraide et de continuité de vie entre Irun, Hondarribia et Hendaye.

D’ailleurs, ces traditions sont inscrites au cours du temps dans les symboles. Sans vouloir remonter loin, je me permets de souligner les trois faits qui ont été indiqués tout à l’heure : la suspension de l’alarde d’Irun, c’est quand même quelque chose d’important pour la ville d’Irun et puis l’hommage rendu le 14 juillet 1931 en mairie d’Hendaye par M. Salis, maire d’Irun, accompagné de son conseil municipal, porteur d’un message du Ministre espagnol des travaux publics. Il s’agissait de remercier, à travers leur maire, les Hendayais pour avoir accueilli entre 1924 et 1931 une grande partie de l’intelligentsia républicaine espagnole. Et puis la présence de nombreux réfugiés aux cérémonieM. Sallaberry, Maire d’Hendaye

« Je remercie Oroitza de relancer toute cette histoire d’Hendaye. Je crois que c’était une initiative vraiment magnifique.

Agissant ainsi, citoyens, réfugiés, élus, autorités s’inscrivaient dans la continuité des traditions ancestrales de partage, d’entraide et de continuité de vie entre Irun, Hondarribia et Hendaye.

D’ailleurs, ces traditions sont inscrites au cours du temps dans les symboles. Sans vouloir remonter loin, je me permets de souligner les trois faits qui ont été indiqués tout à l’heure : la suspension de l’alarde d’Irun, c’est quand même quelque chose d’important pour la ville d’Irun et puis l’hommage rendu le 14 juillet 1931 en mairie d’Hendaye par M. Salis, maire d’Irun, accompagné de son conseil municipal, porteur d’un message du Ministre espagnol des travaux publics. Il s’agissait de remercier, à travers leur maire, les Hendayais pour avoir accueilli entre 1924 et 1931 une grande partie de l’intelligentsia républicaine espagnole. Et puis la présence de nombreux réfugiés aux cérémonies du 11 novembre au monument aux morts d’Hendaye lors des années 36, 37, 38 et 39. Ces constats prennent encore plus d’importance si on les insère dans une perspective d’avenir ?

Je suis certain que ces entraides respectives élevées à un tel niveau par la population de la Baie de Txingudi, sont des exemples à suivre dans notre territoire pour gagner des batailles induites par la crise économique et la mondialisation des échanges.

Pour terminer, je remercie toutes les personnes ici présentes, volontaires pour cet exercice de réminiscence utile à la vie de la cité et les personnes elles-mêmes comme l’a souligné le professeur Paez Rovira. Enfin, je souhaite remercier en particulier le Président d’Oroitza, Monsieur Marcel Argoyti en lui remettant la médaille d’Hendaye. Ce geste ne récompense pas seulement un doyen mais il honore surtout un homme amoureux de sa cité pour avoir su fédérer des Hendayais de toutes origines, et de toutes opinions d’ici et de la diaspora autour d’un projet rassembleur et utile pour la réflexion des élus dans leur action publique. »

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Le 13  Septembre 1936 les rebelles contrôlent Saint Sébastien

Le 11 juin le général Mola est tué lors d'un accident d'avion

Le 19 juin 1937 Bilbao est aux mains des Italiens et des Franquistes

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La reconnaissance de l'autonomie d'Euskadi 

Le  novembre 1933, le référendum sur le statut des Provinces Basques  avait donné  84%  de oui pour les trois provinces de Biscaye, Guipuzkoa et Alava. Mais depuis , le débat était resté  bloqué à l Assemblée des Cortés jusqu'au 12 mai 1936, date à laquelle l'Assemblée se prononce pour le règlement de cette question.

Le 26 septembre suivant, le député du P.N.V, Manuel de Irujo fait son entrée au gouvernement Largo Caballero à Madrid

Le 1 er Octobre 1936, l'Assemblée des Cortés approuve le Statut du Pays Basque et le 7 du même mois, le premier gouvernement d'Euskadi est formé. Le député nationaliste josé Antonio Aguirre, avocat et maire de Guécho en Biscaye en est élu le premier président

.Cette autonomie durera un peu plus de 8 mois


 

 

 

 

 

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19 août 2013

LE FAUX MARTIN GUERRE

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LE FAUX MARTIN GUERRE    I

Par Gayot de Pitaval
« Causes célèbres et intéressantes, avec les jugements qui les ont décidées »
(T.I, page 1, Paris 1735)

C’est probablement l’affaire la plus curieuse
qu’il ait été donné à un tribunal français de juger.
On peut observer sur le vif que les anciens juges,
dont on a beaucoup médit sans tenir compte
des connaissances et des mœurs de leur époque,
cherchaient d’abord scrupuleusement à cerner la vérité,
ensuite à statuer en accord avec le droit et l’équité.

N.B. Afin de faciliter la lecture de ce document,
nous avons ajouté des titres qui ne figurent pas dans l’original,
et remplacé quelques termes obsolètes par des mots contemporains.

Rien n’est plus admirable que cette variété prodigieuse que Dieu a mis dans les visages des hommes, dans l’air qui résulte de l’assemblage des mêmes traits. Un auteur a dit que la Nature, lasse quelquefois de diversifier ses portraits, fait des copies où elle imite parfaitement ceux qu’elle a tracés. C’est ce qu’elle a exécuté dans Arnaud du Tilh, qu’elle fit très semblable à Martin Guerre. Il se prévalut si bien de cette ressemblance, qu’il aurait remplacé pendant sa vie Martin Guerre absent, si celui-ci ne fût revenu, et n’eût dissipé l’illusion. Encore Arnaud du Tilh , après avoir été confronté à Martin Guerre sous les yeux d’un Parlement, balança-t-il quelque temps les lumières des Juges, même après la confrontation.

L’Histoire, qui nous présente plusieurs célèbres imposteurs qui ont abusé de la ressemblance qu’ils avaient avec les personnes dont ils voulaient usurper le nom, les biens et l’état, ne nous en offre point qui ait poussé l’impudence et l’effronterie plus loin que le faux Martin Guerre.

Source de ce document : Rapport du Conseiller Coras

Voici toutes les circonstances de cette histoire merveilleuse, dont Monsieur Coras, rapporteur du procès, a fait part au public : il l’a enrichi de savantes observations. Il serait à souhaiter que les Juges nous fissent l’histoire des procès extraordinaires dont ils ont fait le rapport : ils nous apprendraient, à l’exemple de Monsieur Coras, les véritables motifs des jugements qui ont été rendus.

Quelque curieuses que soient les observations de Monsieur Coras, comme il promène son lecteur dans des recherches qui ne sont pas de son sujet, je ne m’égarerai point avec lui. Je ne le suivrai point dans ces traits d’érudition déplacés, qui étaient alors en usage parmi les savants, et que le bon sens, qui met chaque chose à sa place, retranche à présent de nos ouvrages.

Martin Guerre, avant sa disparition

Martin Guerre, né à HENDAYE dans le Labourd , âgé d’environ onze ans, épousa, au mois de Janvier 1539, Bertrande de Rols de la Ville d’Artigues, au Diocèse de Rieux : ils étaient à peu près de même âge ; elle unissait la sagesse à la beauté, suivant le témoignage de Monsieur Coras, qui dit que dans le temps du procès elle était jeune, sage et belle. Ces deux époux jouissaient d’une fortune honnête : on ne parle point de leur naissance ; mais on juge qu’ils étaient d’une condition un peu au-dessus de celle du simple paysan. Dès que le paysan n’est pas assujetti absolument à gagner sa vie, il prend l’essor au-dessus de son rang ; et c’est ce que la Fontaine appelle un demi-bourgeois, un demi-manant.

Martin Guerre demeura avec sa femme neuf ou dix ans : les huit ou neuf premières années il eut le sort de Tantale : quelque brûlant désir qu’il eût, il ne pouvait posséder sa femme ; il se croyait maléficié, ensorcelé. La crédulité, qui régnait davantage en ce temps là que dans celui-ci, le confirmait dans cette opinion. Il devait plutôt penser que l’âge tendre où il était lui refusait des plaisirs qui lui étaient réservés dans un âge plus avancé. En effet, lorsqu’il approcha de vingt ans, il fut en état de faire usage des appâts de sa femme. Bertrande de Rols, qui se croyait ensorcelée aussi bien que son mari, s’imagina que le charme était rompu ; parce que, suivant le conseil qu’on lui donna, elle fit dire quatre messes, mangea quelques hosties et fouaces. Ainsi on se sert de la crédulité même pour guérir le mal qu’elle a causé.

Un trait de la sagesse de cette femme fut la résistance qu’elle fit à ses parents, qui lui conseillèrent, dans le temps de cette disgrâce, de se séparer en justice d’avec son mari. Elle fit voir que sa tendresse n’avait pas besoin d’être soutenue par les plaisirs des sens. Un fils, appelé Sanxi, fut le fruit de leur mariage dans la dixième année. Martin Guerre, ayant fait à son père un larcin de blé qui n’était pas considérable, s’absenta pour se dérober à sa colère. Il fut tenté de voyager, soit qu’il commençât à se lasser de sa femme, car celles qui sont les plus charmantes ne sont pas plus privilégiées que les autres, et ne mettent pas leurs maris à l’abri du dégoût que la possession traîne ordinairement après elle ; soit que le libertinage eût des attraits pour lui. Quoi qu’il en soit, il fut huit ans sans donner de ses nouvelles à sa femme. C’est alors qu’une femme négligée, pour ne pas dire méprisée par un mari absent, a besoin de toute sa vertu pour ne pas succomber. La médisance n’a pourtant rien publié contre la conduite de Bertrande de Rols, quoique l’absence de son mari ait été de huit années.

Survenance d’un imposteur : Arnaud du Tilh

Arnaud du Tilh, dit Pansette, du lieu de Sagias, se présenta. Comme il avait les mêmes traits, les mêmes linéaments de visage que Martin Guerre, il fut reconnu pour être le véritable mari de Bertrande de Rols par les quatre sœurs du mari, son oncle, et les parents de la femme, et par elle-même. Il avait étudié son rôle parfaitement, et ayant connu Martin Guerre dans ses voyages, il avait appris de lui ce qu’il avait fait de plus particulier avec sa femme, les paroles qu’ils avaient tenues, qu’ils n’avaient confiées dans leur lit qu’aux ténèbres ; les époques de certains événements secrets. Enfin Martin Guerre avait révélé à Arnaud du Tilh des mystères qu’un mari couvre ordinairement du voile du silence. L’imposteur était parfaitement instruit de mille circonstances particulières. On peut dire qu’il savait son Martin Guerre parfaitement mieux encore que Martin Guerre lui-même.

Bertrande de Rols, qui aimait son mari, et qui soupirait ardemment après sa présence, fut d’abord facilement persuadée que le faux Martin Guerre était le véritable. Elle se livra entièrement à l’imposteur, qui pendant plus de trois ans la posséda et en eut deux enfants, l’un desquels mourut peu de temps après sa naissance.

On n’a jamais mieux imité un mari, Jupiter ne joua pas mieux son rôle à l’égard d’Alcmène. Bien des gens croiront que Bertrande de Rols aida à se tromper elle-même, parce que l’erreur lui plaisait ; et ne penseront point qu’une ressemblance soit si exacte qu’elle puisse parfaitement tromper une femme à qui un mari se décèle entièrement. Qu’on ait eu une longue habitude et une grande familiarité avec une personne, non seulement ses traits, son port, sa démarche, sa voix dans ses inflexions, ses gestes ordinaires, s’imprimeront vivement dans notre esprit ; mais un je ne sais quoi dans son air, dans ses façons. On saisit ce qui serait imperceptible à tout autre. Il n’est pas possible qu’un imposteur ait ce je ne sais quoi, ces différences si délicates ; à plus forte raison une femme, à qui rien n’échappe dans un mari, doit-elle être à l’abri de l’imposteur qui veut le représenter. Son imagination la doit vite faire revenir d’une erreur qui l’aura surprise, parce qu’elle comparera l’idée du mari absent avec l’imposteur en original. Mais, comme les absents ont tort auprès de certaines femmes, on voudra peut être croire que cet original eut raison auprès de Bertrande de Rols, étant confronté avec l’idée qui représentait un absent.

Doutes des proches, notamment de Pierre Guerre

Quoi qu’il en soit, Pierre Guerre, oncle de Martin Guerre, et plusieurs autres personnes ayant ouvert les yeux, les ouvrirent à Bertrande de Rols, en lui rappelant les véritables idées de son mari. Elle mit l’imposteur entre les mains de la Justice, l’ayant fait arrêter sur la plainte qu’elle rendit, et sur l’information qui fut faite en conséquence par devant le Juge de Rieux. Elle demanda, dans une requête, qu’il fût condamné à une amende envers le Roi, à demander pardon à Dieu, au Roi, et à elle, tête découverte, et pieds nus et en chemise, tenant une torche ardente en ses mains ; disant que, faussement, témérairement, traîtreusement, il l’a abusée en prenant le nom et supposant la personne de Martin Guerre, dont il se repent, et lui demande pardon ; qu’il soit condamné envers elle à une amende de dix mille livres, aux dépens, dommages et intérêts : voilà quelles furent ses conclusions.

Ceux qui l’ont déjà condamnée diront, qu’étant lasse de l’imposteur, ou plutôt s’étant brouillée avec lui, elle prit la résolution de le perdre, et de s’en délivrer ; que les femmes passent facilement d’une extrémité à l’autre, et que, si l’imposteur avait eu plus d’adresse et de complaisance, il aurait paré son infortune.

Mais comme je ne suis point naturellement malin, j’aime mieux, en conservant la vertu de Bertrande de Rols, lui attribuer une grande facilité, et même plutôt une grande indigence d’esprit. Sur ce principe, je croirai qu’elle a pu être abusée par l’imposteur ; qu’ayant douté ensuite, elle n’a pas eu la force d’éclaircir son doute, et qu’elle a mieux aimé y persévérer que de faire un éclat. Je croirai que la vérité lui envoyait de temps en temps des éclairs, qu’elle retombait après cela dans des ténèbres qu’elle n’avait pas le courage de dissiper. Voilà l’état où elle fut pendant le règne de l’imposteur. Enfin cette même facilité qu’elle a eue à croire le faux Martin Guerre l’a entraînée à croire Pierre Guerre, et à poursuivre l’imposteur. Les gens faciles agissent ordinairement par les impressions d’autrui.

Arnaud du Tilh traduit devant le Juge de Rieux

Arnaud du Tilh allégua d’abord pour sa défense, par devant le Juge de Rieux, que nul malheur n’égalait le sien, puisqu’il avait une femme et des parents qui avaient le cœur si mauvais que de lui contester son état et son nom, pour le dépouiller de son bien, qui pouvoir valoir sept à huit mille livres ; que Pierre Guerre, qui lui intentait ce procès, était guidé par une animosité dont la cupidité était la source ; que les gendres de son oncle épousaient sa passion ; que pour satisfaire à leur avarice ils l’accusaient de prendre le nom de Martin Guerre, et d’en supposer la personne ; qu’ils avaient suborné sa femme, et l’avaient engagée aux dépens de son honneur dans cette accusation calomnieuse, inouïe et horrible dans la bouche d’une femme légitime ; accusation qui était le comble du crime le plus noir, si elle n’était pas l’ouvrage de sa facilité.

Il faisait ensuite son histoire, en racontant la cause de son absence, et rendait compte de la vie qu’il avait menée depuis ; disant qu’il avait servi le Roi à la guerre pendant sept ou huit années ; qu’il avait passé ensuite au service du Roi d’Espagne, où il avait été quelque mois ; qu’enfin brûlant du désir de revoir sa femme, son enfant, ses parents, sa patrie, il était revenu à Artigues ; que malgré le changement que le temps avait fait à son visage, puisqu’étant parti ayant du poil follet au menton, il était revenu ayant de la barbe, il avait eu pourtant la satisfaction d’être reconnu par ce même Pierre Guerre son oncle, qui avait à présent la barbarie de le vouloir méconnaître ; que ce même oncle l’avait comblé alors de caresses, et qu’il n’avait perdu son amitié que parce qu’il lui avait demandé compte de sa gestion et de ses revenus, que celui-ci avait administrés pendant son absence ; que s’il avait voulu lui sacrifier son bien, on ne le ferait pas passer pour un imposteur ; que son oncle n’avait rien oublié pour le perdre, et lui ôter la vie ; qu’après l’avoir épié plusieurs fois, il l’avait attaqué avec avantage, l’avait jeté à terre d’un coup d’une barre de fer, et qu’il l’aurait assommé, si sa femme, n’ayant point d’autre moyen pour le sauver, ne se fût étendue sur lui, et ne lui eût servi de bouclier pour recevoir les coups. Qu’enfin lui et ses gendres avaient cru qu’en ourdissant la trame de cette accusation ils viendraient mieux à leurs fins, parce qu’ils surprendraient la Justice, et tiendraient de sa main les biens dont ils le dépouilleraient.

II demanda que sa femme lui fût confrontée, persuadé qu’elle n’était pas capable d’étouffer entièrement la vérité, n’étant pas aveuglée par la passion qui transportait ses persécuteurs. Il demanda encore que ses calomniateurs fussent condamnés, suivant les lois de l’équité aux mêmes peines qu’ils voulaient lui faire subir ; que Bertrande de Rols fut tenue dans une maison où elle fût à l’abri de la subornation, et de toutes les impressions de Pierre Guerre et de ses gendres, qui ne pourraient pas l’approcher. Enfin il demandait d’être renvoyé absous de l’accusation, avec dépens et dommages-intérêts.

L’instruction devant le Juge de Rieux

Il subit un ample interrogatoire, où il rendit raison de toutes les questions que le Juge lui fit sur la Biscaye, sur le lieu de la naissance de Martin Guerre, le père, la mère, les frères, les sœurs et les autres parents du même ; sur l’année, le mois, le jour de ses noces, son beau-père, sa belle mère, les personnes qui y étaient, celles qui traitèrent le mariage, les différents habits des conviés, le prêtre qui célébra le mariage, les circonstances les plus particulières qui arrivèrent le jour de la noce et le lendemain, jusqu’à nommer les personnes qui l’allèrent voir à minuit le jour de la noce dans son lit nuptial. Il parla de Sanxi son fils, du jour qu’il naquit ; il parla de son départ, des personnes qu’il rencontra sur son chemin, des propos qu’il leur tint, des villes qu’il avait parcourues en France et en Espagne, des personnes qu’il avait vues dans ces deux royaumes, et afin qu’on pût être éclairci parfaitement de ce qu’il disait, il citait des personnes qui pouvaient confirmer ce qu’il déposait.

On fut convaincu, par les éclaircissements qu’on prit, qu’il n’avait rien avancé qui pût servir à le confondre. On ne pouvait pas mieux retracer tout ce qu’avait fait Martin Guerre. Mercure ne rappela pas mieux à Sosie toutes ses actions, que le faux Martin Guerre rappela celles du véritable.

On ordonna que Bertrande de Rols, et certaines personnes que l’accusé avait citées dans son interrogatoire seraient interrogées. Bertrande de Rols dans ses réponses rapporta tous les faits qu’avait déposé l’accusé avec une parfaite conformité ; excepté qu’elle dit l’histoire du charme qui liait la puissance de son mari, et qu’elle raconta comment au bout de huit ou neuf ans le charme fut rompu. Elle ajouta qu’elle ne voulut point se rendre aux sentiments de ses parents, qui lui conseillèrent d’obtenir une séparation de corps d’avec son mari : elle n’avait garde d’oublier ce trait héroïque de sa vertu. Elle dit que Sanxi son fils, qu’elle conçut, fut la preuve évidente qu’il n’y eut plus de fascination. Ainsi la magie blanche de l’Amour l’emporta sur la magie noire du Démon.

L’accusé ayant été interrogé sur cet ensorcellement, répondit sur le maléfice, sur les cérémonies qu’on avait pratiquées pour le rompre, comme s’il eût ajusté ses réponses à celles de Bertrande de Rols. On le confronta à cette femme, et à tous les témoins ; il requit de nouveau qu’elle fût isolée, afin que ses ennemis n’abusassent pas de sa facilité : on lui accorda ce qu’il demandait.

Il fournit des reproches contre les témoins qui déposèrent contre lui : il demanda qu’il lui fût permis de publier un monitoire pour avoir révélation de la subornation de Bertrande de Rols, et pour vérifier les reproches qu’il opposait aux témoins. II obtint encore cette demande : mais on ordonna en même temps qu’on ferait une enquête d’office sur les lieux au Pin, à Sagias, et à Artigues, de tous les faits qui pouvaient concerner Martin Guerre, l’accusé, et Bertrande de Rols, et l’honneur et la réputation des témoins confrontés. Les révélations du monitoire, et les dépositions des enquêtes constatèrent la vertu de Bertrande de Rols, qui ne s’était point démentie pendant l’absence de son mari.

À l’égard de 1’accusé, de cent cinquante témoins environ qui furent ouïs, trente à quarante déposèrent qu’il était véritablement Martin Guerre, pour avoir eu de grandes habitudes avec lui dès son enfance ; et ils le reconnurent à certaines marques et cicatrices que le temps n’avait point effacées.

D’autres témoins, en plus grand nombre, déclarèrent que l’accusé était Arnaud du Tilh, dit Pansette, pour l’avoir vu et fréquenté dès le berceau. Le reste des témoins, jusqu’au nombre de soixante et davantage, dirent qu’il y avait une ressemblance si frappante entre l’un et l’autre, qu’ils n’osaient pas assurer si l’accusé était Martin Guerre, ou Arnaud du Tilh.

On ordonna deux rapports de la ressemblance, ou dissemblance, de Sanxi Guerre avec l’accusé, et avec les sœurs de Martin Guerre. Il résulte du premier rapport que Sanxi Guerre ne ressemble point à l’accusé, et il résulte du second qu’il ressemble aux sœurs de Martin Guerre.

Arnaud du Tilh condamné par le Juge de Rieux

Enfin, par la sentence définitive du premier Juge, Arnaud du Tilh est déclaré atteint et convaincu d’être un imposteur, et condamné à perdre la tête ; et on ordonna que son corps après sa mort serait mis en quatre quartiers.

Voilà tout ce que M. Coras nous apprend de la sentence. Le premier Juge condamna l’accusé, comme s’il eût été inspiré ; car après ce qu’on vient de rapporter, à ne suivre que les lumières humaines, son jugement était téméraire. On est obligé de convenir que l’information, les révélations du monitoire et l’enquête laissaient du moins la vérité dans le doute. Or dans le doute un premier juge ne s’expose-t-il pas à être blâmé quand il franchit le pas, et condamne hardiment un accusé dont l’innocence se présente à l’esprit aussitôt que le crime ? Comptait-il pour rien la faveur du mariage et des enfants ? N’était-ce pas le cas d’ordonner du moins un plus amplement informé ?

Appel d’Arnaud du Tilh devant le Parlement de Toulouse

Arnaud du Tilh s’étant rendu appelant au Parlement de Toulouse, cette Cour crut qu’il fallait peser cette affaire plus mûrement que ne l’avait fait le premier juge. Elle ordonna d’abord que Pierre Guerre et Bertrande de Rols seraient confrontés en pleine Chambre l’un après l’autre à l’accusé.

Dans ces deux confrontations il eut une contenance si assurée, et un front si ouvert, que les juges crurent y lire qu’il était le véritable Martin Guerre, tandis qu’ils lisaient sur le front de Pierre Guerre et de Bertrande de Rols déconcertés, qu’ils étaient des calomniateurs. Mais, comme ces confrontations ne pouvaient pas être de parfaits tableaux de la vérité, on ordonna qu’on ferait d’office une enquête sur plusieurs faits importants, dans laquelle on entendrait d’autres témoins que ceux qui avaient déjà été ouïs.

Cette nouvelle enquête, au lieu de conduire à la lumière de la vérité dans l’esprit des juges, n’y apporta que l’obscurité du doute et de l’incertitude. De trente témoins qui furent ouïs de nouveau, neuf ou dix déclaraient que c’était le véritable Martin Guerre ; sept ou huit, que c’était Arnaud du Tilh ; le reste, balançant toutes les circonstances et tous les caractères de la ressemblance, disaient qu’ils ne pouvaient rien assurer de certain et de positif.

Tout cela, dit Monsieur Coras, jetait les juges dans une grande perplexité. Ils pensaient autrement que le premier juge, et ils ne se laissaient pas guider par des lueurs.

L’instruction devant le Parlement de Toulouse

En rassemblant toutes les dépositions, on trouvait que quarante-cinq témoins assuraient que l’accusé n’était point Martin Guerre, mais Arnaud du Tilh ; et ils apportaient des raisons pertinentes de leurs créances, en disant qu’ils avaient fréquenté l’un et l’autre, et qu’ils les avaient connus parfaitement, ayant bu et mangé avec eux depuis leur enfance. Parmi ces témoins, il en faut distinguer dont la qualité donne un grand poids à leurs témoignages.

Le premier témoin est un oncle maternel d’Arnaud du Tilh, appelé Carbon Bareau, qui le reconnut pour son neveu, et lui voyant les fers aux pieds pleura amèrement, en déplorant la triste destinée d’une personne qui lui appartenait de si près. On ne peut pas soupçonner qu’un si proche parent, dont le sang parle en faveur de l’accusé, ait voulu trahir la vérité. C’est à la force de cette même vérité qu’il faut attribuer ce témoignage qui condamnait son neveu : témoignage si contraire aux sentiments de la nature. Il y a d’autres témoins qui ont contracté avec Arnaud du Tilh ou qui ont été présents aux actes qu’il avait passés et les avaient signés ; et ils produisent ces actes.

Presque tous ces témoins disent que Martin Guerre était plus haut et plus noir ; qu’il était grêle de corps et des jambes, un peu voûté, portant la tête entre deux épaules, le menton fourchu et élevé dans le sommet ; que sa lèvre de dessus était pendante, qu’il avait le nez large et camus, la marque d’un ulcère au visage, une cicatrice au sourcil droit. Or Arnaud du Tilh était petit, trapu, fourni de corps, ayant la jambe grosse : il n’était ni camus ni voûté ; il avait pourtant au visage les mêmes marques que Martin Guerre.

Le cordonnier qui chaussait Martin Guerre déposa qu’il le chaussait à douze points, et que l’accusé ne se chaussait qu’à neuf. Un autre Témoin dépose que Martin Guerre était habile dans le jeu des armes et à la lutte : l’accusé n’y entendait rien. Jean Espagnol, hôte du lieu de Touges, a déposé que l’accusé se découvrit à lui, et lui dit de ne le pas déceler ; que Martin Guerre lui avait donné tout son bien. Valentin Rougie a aussi déposé que l’accusé, voyant que ce témoin le connaissait pour Arnaud du Tilh, lui fit signe du doigt de ne rien dire. Pelegrin de Liberos a fait la même déposition, et dit que l’accusé lui avait donné deux mouchoirs, à la charge d’en donner un à Jean du Tilh son frère.

Monsieur Coras observe que la Loi qui ne veut pas qu’on ajoute foi à un témoin qui parle par ouï-dire ne comprend pas ceux qui disent avoir ouï-dire aux accusés. Une histoire qui passe par différentes bouches est sujette à être altérée : on la brode, et on l’embellit ; mais le témoin qui l’a puisée dans sa source n’est pas sujet à ces inconvénients.

Deux autres témoins ont déposé qu’un soldat de Rochefort passant par Artigues fut surpris que l’accusé se dît Martin Guerre : il dit tout haut qu’il était un imposteur, que Martin Guerre était en Flandres ; qu’il avait une jambe de bois à la place de celle qui lui avait été emportée d’un coup de boulet devant Saint-Quentin, à la bataille de Saint Laurent.

On employait contre l’accusé le rapport dont on a parlé, qui constate que Sanxi Guerre n’a aucune ressemblance avec lui.

On ajoutait que Martin Guerre était de Biscaye, où le langage Basque qu’on y parle est bien différent du Français et du Gascon. L’accusé ignore le Basque, et n’en sait tout au plus que quelques mots qu’il place de temps en temps par affectation dans son discours.

Plusieurs témoins ont déposé qu’Arnaud du Tilh dès son enfance a eu les plus mauvaises inclinations ; qu’il a depuis été consommé dans le crime, que le larcin lui était familier. C’était un jureur, un renieur de Dieu et un blasphémateur. D’où il s’en suivait qu’il était bien capable de jouer le rôle d’un imposteur, et que l’impudence qu’il témoignait était dans son caractère.

Voilà les sortes de raisons qui découvraient l’imposture. Mais elles étaient obscurcies par les raisons suivantes.

Trente ou quarante témoins affirmaient qu’il était Martin Guerre, et appuyaient leur témoignage, en disant qu’ils avaient eu des liaisons avec lui dès son bas âge ; qu’ils avaient souvent bu et mangé ensemble.

Parmi ces témoins, il fallait considérer les quatre sœurs de Martin Guerre, qui avaient été élevées avec lui, dont la sagesse était dans une très bonne odeur. Elles ont toujours assuré constamment que l’accusé était Martin Guerre leur frère ; les deux beaux-frères de Martin Guerre, mariés chacun à une de ses soeurs, rendaient le même témoignage. Pouvait-on penser que quatre sœurs élevées avec Martin Guerre se trompassent ensemble. Si l’imposteur avait quelque différence, même la moins remarquable, ne l’auraient elles pas saisie ?

Des témoins qui ont assisté aux noces de Martin Guerre et de Bertrande de Rols ont déposé en faveur de 1’accusé. Catherine Boere a dit que sur le minuit elle apporta aux nouveaux mariés la collation qu’on appelle Media noche, ou le réveillon, et que 1’accusé était bien l’époux qu’elle trouva couché avec Bertrande de Rols. La plus grande partie des témoins qui parlèrent en faveur de l’accusé apportent, pour preuve de leurs témoignages, que Martin Guerre avait deux soubredents à la mâchoire de dessus, une goutte de sang extravasé à l’oeil gauche, l’ongle du premier doigt enfoncé, trois verrues à la main droite, une autre au petit doigt : toutes ces marques l’accusé les avait. Par quel jeu la Nature, qui les avait données à Martin Guerre, les aurait-elle imitées si précisément dans une autre personne ?

D’autres témoins ont déposé qu’il y avait partie liée entre Pierre Guerre et ses gendres pour perdre l’accusé ; qu’ils avaient sondé Jean Loze, Consul de Palhos, pour savoir s’il voudrait leur fournir de l’argent pour conduite cette trame à sa fin ; qu’il les avait refusés, en leur disant que Martin Guerre était son parent ; qu’il donnerait plutôt de l’argent pour le sauver que pour le perdre. Ils ajoutent que le bruit commun à Artigues est que Pierre Guerre et sa cabale poursuivent l’accusé contre la volonté de sa femme, et que plusieurs personnes ont souvent ouï dire à Pierre Guerre que l’accusé était Martin Guerre son neveu.

Presque tous les témoins qui ont été ouïs assurent que lorsque l’accusé arriva à Artigues il saluait, et appelait de leurs noms, tous ceux qui étaient de la connaissance et de l’intime familiarité de Martin Guerre ; qu’il rappelait à ceux qui avaient peine à le reconnaître la mémoire des lieux où ils avaient été, des parties de plaisir qu’ils avaient faites, des conversations qu’ils avaient eues depuis dix ans, quinze ans, vingt ans ; comme si toutes ces choses avaient été faites fraîchement : et ce qui est de plus remarquable, c’est qu’il se fit connaître à Bertrande de Rols en lui retraçant des mystères du lit nuptial, et les circonstances des événements les plus secrets ; il lui dit même, après les premières caresses qu’il lui fit, va me chercher ma culotte blanche, doublée de taffetas blanc, que j’ai laissée dans un coffre. Bertrande de Rols est convenue de ce fait, et elle a dit qu’elle trouva la culotte dans le lieu indiqué, où elle ne la savait pas.

Pasquier dit que l’accusé s’attribua une aventure que Martin Guerre avait eue dans une campagne où il était allé avec sa femme. Il n’y avait que deux lits pour Martin Guerre et sa femme, un frère et une sœur, les deux femmes couchèrent ensemble, et les deux hommes dans l’autre lit ; Martin Guerre, pendant le sommeil de son camarade de couche, conduit par l’amour conjugal qui s’irrite des obstacles ainsi qu’un autre amour, alla fort doucement chercher sa femme qu’il trouva éveillée ; il revint à son lit avant le jour : dès cette nuit-là il était devenu père. L’accusé nomma le prêtre qui avait baptisé l’enfant, le parrain et la marraine.

De là il s’ensuit que Martin Guerre seul pouvait avoir ces idées, et qu’il n’y avait que son cerveau qui put être rempli de toutes ces traces ; qu’un autre ne pouvait pas les rassembler en si grand nombre. Qu’on suppose un imposteur, qui n’a connu aucune personne dans un lieu où il voudra représenter un homme qui y aura demeuré ; qui y aura eu une infinité de liaisons, où il aura joué pendant l’espace de plusieurs années bien des scènes, qui se sera communiqué à des parents, des amis, des gens indifférents, des gens de toute espèce ; qui aura une femme, c’est-à-dire une personne sous les yeux de laquelle il est plus des deux tiers de la vie, une personne qui l’étudie continuellement, avec qui il multiplie les conversations à l’infini sur tous les tons imaginables. Comment cet imposteur pourra-t-il tenir son rôle devant tous ces gens-là, sans que sa mémoire soit jamais en défaut ?

Disons plutôt, comment aura-t-il pu mettre dans sa mémoire tant d’espèces ? En supposant qu’il les y ait pu mettre, comment se réveilleront-elles quand il le faudra à point nommé ? Et pour les y pouvoir mettre, combien de conversations a-t-il dû avoir avec celui dont il veut jouer le rôle ? Celui-ci peut-il jamais lui tout dire, lui tout développer ? Il faut donc supposer, pour que le véritable Martin Guerre ait eu cette complaisance, qu’il s’est accordé avec le faux, dont il a voulu être supplanté. De l’impossibilité morale, et même physique à un imposteur de si bien jouer son rôle, il s’ensuit que l’accusé est le véritable Martin Guerre.

Il faut encore observer qu’il résulte du rapport de la ressemblance entre l’accusé et les sœurs de Martin Guerre, qu’il ne peut pas y en avoir une plus parfaite entre leurs airs et leurs traits de visage. Ceux qui ont fait le rapport disent que deux œufs ne sont pas plus semblables.

La conduite de Bertrande de Rols, femme de Martin Guerre

Ce qui ne doit pas laisser le moindre doute, et mettre dans tout son jour la fraude et la calomnie qui ont été machinées contre l’Accusé, c’est la conduite que Bertrande de Rols a tenue avec lui dans ce procès. Quand elle lui fut confrontée, l’accusé l’interpella par la religion du serment de le reconnaître, il la fit juge de sa cause, il lui dit qu’il se soumettait à une peine capitale, si elle jurait qu’il ne fût pas Martin Guerre : l’imposture se serait-elle soumise à une pareille épreuve ? Il n’y avait que l’assurance que donne la vérité qui pût obliger l’accusé à se livrer ainsi à celle qui le poursuivait. Que répondit-elle ? qu’elle ne voulait ni jurer, ni le croire. N’était-ce pas comme si elle disait, quoique je ne puisse pas trahir la vérité qui me condamne et qui parle pour vous, je ne veux pourtant point la reconnaître dans le temps même qu’elle m’échappe malgré moi ; parce que j’ai fait trop de progrès pour retourner en arrière.

Voyons la conduite qu’elle a tenue avec l’accusé avant le procès. Elle a vécu trois ou quatre ans avec lui sans se plaindre : elle s’est livrée à lui comme une femme à son mari, et a vécu tout ce temps là avec lui sous les douces lois du mariage. Est-ce que l’accusé a un rapport si parfait avec Martin Guerre, qu’il n’y ait pas la moindre différence que sa femme ait pu apercevoir ? La nature s’est-elle tellement attachée à les faire ressembler, qu’elle ait voulu que la femme de Martin Guerre ne pût reconnaître l’erreur ? Dans un corps si semblable a-t-elle voulu loger une âme du même caractère ? Car Bertrande de Rols ne cite là-dessus aucune différence. Quand quelqu’un lui disait que l’accusé n’était pas Martin Guerre, ne le démentait-elle pas en prenant un ton aigre et choquant ? Ne lui a-t-on pas ouï dire qu’elle le reconnaissait mieux que personne, et qu’elle ferait mourir ceux qui diraient le contraire ? Et pour faire voir qu’il n’était pas possible que l’accusé ne fût Martin Guerre, ne disait-elle pas que c’était lui, ou un Diable en sa peau ?

Combien de fois s’est-elle plainte de Pierre Guerre et de sa femme, qui est sa mère, parce qu’ils voulaient l’obliger à poursuivre l’accusé comme un imposteur ? Ils la menaçaient même de la chasser de sa maison, si elle ne prenait ce parti. Il est évident qu’elle est à présent séduite et esclave de la passion de Pierre Guerre et de sa mère.

On rapporte que l’accusé ayant été constitué prisonnier pour une autre affaire, de l’autorité du Sénéchal de Toulouse, à la requête de Jean d’Escornebeuf le cadet, et Pierre Guerre étant sa secrète partie adverse, on lui soutint qu’il n’était pas Martin Guerre. Bertrande de Rols se plaignit de ce que Pierre Guerre et sa femme la sollicitait continuellement de faire un procès à l’accusé sur son nom et sur son état, afin de le faire condamner à une peine capitale.

Quand il fut élargi en vertu du jugement du Sénéchal qui prononça entre les parties un appointement de contrariété, Bertrande de Rols le reçut avec des démonstrations de joie, le caressa, lui donna une chemise blanche, s’abaissa jusqu’à lui laver les pieds. Après qu’elle lui eut rendu ce service, il usa de tous les privilèges de mari. Cependant dès le lendemain Pierre Guerre, comme procureur de Bertrande de Rols, accompagné de ses gendres, eut l’inhumanité de le faire conduire en prison. Il est certain que la procuration qu’il alléguait ne fut passée que fort tard sur le soir. Qui ne voit que Bertrande de Rols n’eut pas la force de résister à l’ascendant tyrannique que Pierre Guerre avait pris sur elle ? Ce qui confirme cette vérité, c’est qu’elle envoya à l’accusé, prisonnier, de l’argent pour sa nourriture et un habit.

Il s’ensuit évidemment que, puisque Bertrande de Rols l’a connu pendant un long temps pour son mari, et qu’à présent on fait violence à ses sentiments et à ses lumières, il est incontestablement Martin Guerre. Si un ancien a dit qu’il n’appartenait qu’à un mari de bien connaître sa femme, par la même raison on peut dire qu’il n’appartient qu’à une femme de bien connaître son mari.

Bilan de la seconde instruction

Après tant de raisons convaincantes, la Cour n’était elle pas obligée de reconnaître l’accusé pour Martin Guerre, puisque dans le doute même elle devait prendre ce parti qui favorisait le mariage, et l’état de l’enfant qui en était issu ? Suivant la loi civile et les interprètes, quand bien même on ne considérerait que l’accusé, on se déterminerait toujours à ce jugement ; parce qu’il vaut mieux dans le doute s’exposer à laisser un coupable impuni qu’à perdre un innocent.

Il ne sert de rien d’alléguer que si l’accusé a plusieurs témoins qui déposent en sa faveur, il y en a encore un plus grand nombre qui déposent contre lui ; parce que les dépositions de ceux qui se déclarent pour lui doivent prévaloir, étant plus vraisemblables, et étant en outre en faveur du mariage et de l’état des enfants. C’est une règle constante, qu’on ajoute plus de foi à deux témoins qui affirment qu’à mille témoins qui nient. Aristote, dans son troisième livre de métaphysique, en rapporte la raison : celui, dit-il, qui affirme a une raison de créance plus certaine que celui qui nie. II faut ajouter que ce qui fait prévaloir une affirmation, c’est qu’elle est précise et circonstanciée ; au lieu qu’une dénégation est vague et indéfinie.

A l’égard du témoignage de Carbon Barreau et des autres, qui ont rapporté des faits particuliers et spécieux, ils ont été valablement reprochés, et les objets bien prouvés. Le langage du soldat qu’on rapporte n’est d’aucune considération, puisqu’il n’a point été ouï : ce n’est donc qu’un ouï dire qui ne fait aucun foi en justice.

Quant aux signalements de Martin Guerre qu’on oppose, ils se trouvent dans l’accusé, si on excepte sa grosseur qu’on dénie à Martin Guerre, et la hauteur de la taille qu’on attribue à celui-ci. Il n’est pas étrange que Martin Guerre, qui était grêle et menu, si l’on veut, étant extrêmement jeune, après une si longue absence paraisse plus gros et plus fourni. Combien d’exemples pareils pourrait-on citer ? Un homme qui devient gros semble aux yeux être devenu plus petit. La dissemblance de Sanxi Guerre avec l’accusé ne prouve rien. Combien de fils qui n’ont aucun rapport avec leur père ? Sa ressemblance avec ses sœurs est d’un plus grand poids, puisque c’est une ressemblance de personnes à peu près de même âge, parvenus dans un état où la nature ne fait plus de changement.

On ne doit faire aucun fonds sur ce qu’on allègue, que l’accusé ne parle point le Basque, qui est le langage du lieu de sa naissance. N’apprend-on pas, par les enquêtes qui ont été faites, que Martin Guerre est sorti de son pays à l’âge de deux ans, ou environ ?

Le caractère de libertin et de débauché qu’on donne à Arnaud du Tilh n’est pas un argument contre l’accusé, puisqu’on démontre qu’il est Martin Guerre. On ne l’a point accusé de débauche, ni de libertinage, dans les trois ou quatre années qu’il a vécu avec Bertrande de Rols. Ces plaidoyers pour et contre sont ceux que fit Monsieur Coras pour éclaircir la vérité, lorsqu’il rapporta le procès, si on excepte le style, et la manière de rendre les moyens. Voici ce qu’il répliqua contre l’accusé.

Les témoins qui déposent contre lui nient en affirmant ; puisqu’en disant qu’il n’est pas Martin Guerre, ils affirment qu’il est Arnaud du Tilh. Ainsi la règle n’a ici aucune application. D’ailleurs une dénégation qui est restreinte par les circonstances du temps, du lieu et des personnes, cesse d’être vague, et elle a autant de force qu’une affirmation.

A l’égard des marques et cicatrices qu’on voit dans l’accusé, et qu’on a reconnues dans Martin Guerre, ce fait n’est point prouvé par plusieurs témoins qui s’accordent ; mais chaque marque a un témoin singulier qui assure l’avoir vue dans Martin Guerre. C’est une règle, que mille témoins singuliers ne font aucune preuve ; on excepte l’usure, la concussion. Quant aux soubredents et aux traits et linéaments du visage, qu’on dit être les mêmes dans Martin Guerre que dans l’accusé, combien l’histoire cite-t-elle de ces sortes de ressemblances ? Sura, étant proconsul en Sicile, y rencontra un pauvre pêcheur qui avait précisément les mêmes traits de visage, et la même taille en grosseur et grandeur que lui ; les mêmes gestes que Sura avait accoutumé de faire étaient familiers à ce pêcheur ; il avait la même contenance, et ouvrait comme lui d’une façon particulière la bouche en riant et en parlant. Ils étaient tous deux bègues : ce qui donna lieu à Sura de dire qu’il était surpris d’une si parfaite ressemblance, puisque son père n’avait jamais été en Sicile. « Que votre surprise cesse, lui dit le pêcheur, ma mère a été plusieurs fois à Rome ». Pline rapporte ce fait (livre VII, chap. XXIII) ; et Valère, cuisinier du grand Pompée, ne lui ressemblait-il pas parfaitement ? Combien d’autres exemples ne pourrait-on pas alléguer ? Si la ressemblance était un argument invincible, tant de célèbres imposteurs, qui ont voulu s’en prévaloir, n’auraient jamais été confondus.

On ne doit point se laisser imposer par tous les traits qu’a rapportés l’accusé dans ses conversations. Il a, dit-on, dans le cerveau précisément les mêmes traces que doit avoir Martin Guerre, il connaît les mêmes personnes, il rappelle exactement les époques, les circonstances des événements qu’a eus celui qu’il représente. C’est un habile comédien, qui n’est monté sur le théâtre pour y jouer son rôle qu’après l’avoir bien étudié : c’est un fourbe ingénieux qui a bien ourdi sa trame, qui a eu l’art d’habiller le mensonge des vêtements de la vérité, et qui couvre du voile de l’impudence les méprises qu’il fait, et empêche par là qu’elles ne fassent leur impression. Monsieur Coras allègue qu’Arnaud du Tilh était soupçonné de magie, et il insinue que par cette voie il avait acquis les connaissances qu’il faisait valoir. Cette raison, qui pouvait faire quelque effet dans ce temps là, n’en ferait point à présent.

L’accusé ne doit tirer aucun avantage du refus que Bertrande de Rols a fait de jurer qu’il n’était pas Martin Guerre. Un serment en matière criminelle n’étant pas une preuve, le refus n’en doit pas faire une contraire. Il y a d’ailleurs des personnes timides, superstitieuses, qui, effrayées par les impressions que leur inspire le serment, ne veulent pas même jurer pour la vérité.

Il ne faut point s’arrêter à l’erreur où a été Bertrande de Rols pendant plus de trois ans, et à la répugnance qu’elle a pu avoir de poursuivre l’imposteur, et aux démarches qu’elle a faites qui ont démenti son accusation. Cette conduite est le tableau d’une personne timide, incapable de prendre une résolution violente, et qui étant d’un caractère plein de bonté ne saurait se déterminer à tramer la perte de quelqu’un, particulièrement d’une personne avec qui elle n’a rien eu de réservé, et qu’elle a regardée comme un autre elle-même. Quand on est de ce naturel bon et craintif, on souffre si l’on est poussé à poursuivre une vengeance qui a pour objet une peine capitale, on a le cœur déchiré ; on se repent de s’être engagé si avant, on tâche de retourner en arrière, et si l’on revient sur ses pas on recule encore. Tel est l’état de Bertrande de Rols, qui a plus d’humanité pour un imposteur que d’indignation contre lui.

Tels étaient les moyens de l’accusé et des accusateurs, et telles étaient leurs réponses et leurs répliques, mises en oeuvre par Monsieur Coras. Dans ce conflit de raisons qui révélaient et obscurcissaient la vérité, et n’en laissaient voir que des éclairs auxquels les ténèbres succédaient, la cause de l’accusé allait prévaloir, en faveur du mariage et de l’état de l’enfant.

Le retour de Martin Guerre

Mais voici le véritable Martin Guerre qui se présente, comme s’il fût descendu du Ciel dans une machine. Monsieur Coras dit que son retour fut un miracle de la Providence, qui ne voulut pas permettre le triomphe de l’imposteur. Il vient, dit-il, d’Espagne, il a une jambe de bois, comme l’avait raconté un soldat, suivant la déposition d’un témoin. Il présente sa requête à la Cour, il fait l’histoire de l’imposteur, il demande à être interrogé. La Cour ordonne qu’il sera arrêté, qu’il subira l’interrogatoire, et qu’il sera confronté à l’accusé, à Bertrande de Rols, à ses sœurs et aux principaux témoins qui ont affirmé opiniâtrement que l’accusé était Martin Guerre.

Il est interrogé sur les mêmes faits qu’on avait demandés à l’accusé : il donne les marques, les enseignes auxquelles on peut le reconnaître ; mais les indices qu’il administre ne sont pas si certains, ni en si grand nombre que ceux que l’accusé à fournis. On les confronte ensemble ; Arnaud du Tilh, qui a armé son front de l’effronterie même, traite Martin Guerre d’imposteur, de maraud, d’homme aposté par Pierre Guerre ; et déclare en élevant sa voix qu’il consent à être pendu, s’il ne prouve pas la fourberie et la machination, et ne couvre pas de confusion ses ennemis. Et sur le ton sur lequel il a commencé, il interroge Martin Guerre sur plusieurs faits passés dans sa maison qu’il devait savoir. Martin Guerre ne répond point avec la même fermeté et la même assurance qu’avait répondu Arnaud du Tilh. De sorte qu’on pouvait dire que le tableau que présentait l’imposteur était plus ressemblant à la vérité, que celui qu’en offrait la vérité elle-même.

Les commissaires, ayant fait retirer Arnaud du Tilh, interrogèrent Martin Guerre sur plusieurs faits secrets et particuliers qu’il devait savoir, et sur lesquels ni l’un ni l’autre n’avaient pas été encore interrogés. On vérifia que Martin Guerre avait répondu juste. On interrogea ensuite en particulier Arnaud du Tilh : il répondit sur dix ou douze demandes qu’on lui fit avec la même justesse ; ce qui le fit soupçonner de magie, dit Monsieur Coras, suivant l’opinion qu’on en avait à Artigues et dans les lieux circonvoisins.

La Cour, pour s’éclaircir parfaitement de la vérité, et dissiper jusqu’au moindre nuage, ordonna que les quatre sœurs de Martin Guerre, chaque mari de chacune des deux sœurs, Pierre Guerre, les frères d’Arnaud du Tilh, et les principaux témoins qui s’étaient obstinés à le reconnaître pour Martin Guerre, comparaîtraient pour choisir entre les deux le véritable. Tous se présentèrent, excepté les frères d’Arnaud du Tilh, que les injonctions de la Cour et les peines dont ils furent menacés ne furent point obliger de venir. La Cour jugea qu’il y aurait de l’inhumanité à les contraindre à déposer contre leur frère ; leur refus de comparaître déposait d’ailleurs contre lui.

La sœur aînée vint la première, et après s’être arrêtée un instant à considérer Martin Guerre, elle le reconnut et l’embrassa en pleurant ; et s’adressant aux Commissaires : voici, leur dit-elle, mon frère Martin Guerre : j’avoue l’erreur où ce traître abominable, poursuivit-elle en montrant Arnaud du Tilh, m’a jetée et entretenue pendant si longtemps, aussi bien que tous les habitants d’Artigues. Martin Guerre mêla ses larmes avec celles de sa sœur en recevant ses embrassements.

Les autres le reconnurent de même, aussi bien que les témoins qui avaient été les plus obstinés à reconnaître Arnaud du Tilh pour Martin Guerre.

Après toutes ces reconnaissances, on appela Bertrande de Rols, qui n’eut pas plutôt jeté les yeux sur Martin Guerre, que toute éplorée et fondant en larmes, tremblante comme une feuille agitée par le vent, pour me servir de la comparaison de Monsieur Coras, elle accourut l’embrasser, lui demandant pardon de la faute qu’elle avait faite en se laissant séduire et abuser par les artifices et les impostures d’un misérable. Elle fit alors pour se justifier un petit plaidoyer que la nature ennemie de l’art lui suggéra. Elle dit qu’elle avoir été entraînée par ses belles-sœurs trop crédules, qui avaient reconnu que l’imposteur était son mari ; que la grande passion qu’elle avait de le revoir aida à la tromper ; qu’elle avait été confirmée dans son erreur par les indice que ce traître lui avait donnés, et par des récits de faits si particuliers qu’ils ne pouvaient être connus que de son véritable mari ; que dès qu’elle avait ouvert les yeux, elle avait souhaité que l’horreur de la mort cachât l’horreur de sa faute, et que, si la crainte de Dieu ne l’eût retenue, elle n’aurait pas hésité à se tuer elle-même ; que ne pouvant soutenir l’affreuse idée d’avoir perdu son honneur et la réputation d’être chaste, elle avait eu recours à la vengeance, et avait mis l’imposteur entre les mains de la Justice, et l’avait poursuivi si vivement qu’elle l’avait fait condamner par le premier Juge à perdre la tête, et son corps après sa mort à être mis en quatre quartiers ; que son ardeur à le poursuivre n’avait point été ralentie, après qu’il eut interjeté appel de la sentence. L’air touchant dont parlait Bertrande de Rols, ses larmes et sa beauté étaient bien plus éloquents que son plaidoyer : l’expression de sa douleur, répandue sur son visage consterné, plaida merveilleusement pour elle.

Le seul Martin Guerre, qui avait été si sensible aux témoignages d’amitié de ses sœurs, parut insensible à ceux de sa femme ; et après l’avoir écoutée sans l’interrompre, il la regarda d’un air farouche, et, prenant un maintien sévère, il lui dit d’un ton méprisant : cessez de pleurer, je ne puis et ne dois point me laisser émouvoir par vos larmes : c’est en vain que vous cherchez à vous excuser par l’exemple de mes sœurs et de mon oncle. Une femme a plus de discernement pour connaître un mari, qu’un père, une mère et tous ses parents les plus proches ; et elle ne se trompe que parce qu’elle aime son erreur. Vous êtes la seule cause du désastre de ma maison ; je ne l’imputerai jamais qu’à vous.

Les Commissaires alors s’efforcèrent de persuader Martin Guerre de l’innocence de Bertrande de Rols, confondue par les foudroyantes paroles de son mari ; mais ils ne purent amollir son cœur, ni fléchir sa sévérité ; le temps seul lui fit changer de sentiment.

Monsieur Coras ne dit point quelle contenance tint Arnaud du Tilh, présent à toutes ces reconnaissances. Il y a apparence qu’il ne se déconcerta point : s’il se fût troublé, Monsieur Coras n’aurait pas oublié cette circonstance. Arnaud du Tilh était un de ces scélérats déterminés, qui bravent la foudre dans le temps qu’elle les écrase. Mais les grands motifs de la Religion l’ébranlèrent, lorsqu’il fut à la veille de subir le dernier supplice. L’imposture n’eut plus aucun retranchement où elle pût se réfugier, et fût entièrement démasquée ; et la vérité se leva sur l’horizon de la Justice avec un grand éclat.

La condamnation d’Arnaud du Tilh

La Cour, après une mûre délibération, prononça l’Arrêt qui suit.

Vu le procès fait par le Juge de Rieux à Arnaud du Tilh, dit Pansette, soi disant Martin Guerre, prisonnier à la Conciergerie, appelant dudit Juge, etc.

Dit a été que la Cour a mis et met l’appellation dudit du Tilh, et ce dont a été appelé, au néant ;

Et pour punition et réparation de l’imposture, fausseté, supposition de nom et de personne, adultère, rapt, sacrilège, plagiat, larcin et autres cas par ledit du Tilh commis, résultants dudit procès :

La Cour l’a condamné et condamne à faire amende honorable au devant de l’Église du lieu d’Artigues, et icelui à genoux, en chemise, tête et pieds nus, ayant la hart au col, et tenant en ses mains une torche de cire ardente, demandant pardon à Dieu, au Roi et à la Justice, auxdits Martin Guerre et Bertrande de Rols mariés ; et ce fait sera ledit du Tilh délivré ès mains de l’Exécuteur de la haute Justice, qui lui fera faire les tours par les rues et carrefours accoutumés dudit lieu d’Artigues ; et la hart au col, l’amènera au devant de la maison dudit Martin Guerre, pour icelui, en une potence qui à ces fins y sera dressée, être pendu et étranglé, et après son corps brûlé.

Et pour certaines causes et considérations à ce mouvant la Cour, celle-ci a adjugé et adjuge les biens dudit du Tilh à la fille procréée de ses œuvres et de ladite de Rols, sous prétexte de mariage par lui faussement prétendu, supposant le nom et personne dudit Martin Guerre, et par ce moyen décevant ladite de Rols ; distraits les frais de Justice ;

et en outre a mis et met hors de procès et instance lesdits Martin Guerre et Bertrande de Rols ; ensemble ledit Pierre Guerre oncle dudit Martin ;

et a renvoyé et renvoie ledit Arnaud du Tilh audit Juge de Rieux, pour faire mettre le présent Arrêt à exécution selon sa forme et teneur.

Prononcé judiciellement le 12ème jour de Septembre 1560.

Monsieur Coras observe que la sentence du Juge de Rieux fut infirmée dans la peine qu’il avait ordonnée ; parce que la décapitation, à laquelle il avait condamné Arnaud du Tilh, est la peine des criminels nobles. Un larcin, une trahison insigne qui mériteraient une peine capitale, commis par une personne d’une extraction noble, seraient pourtant punis du supplice de la potence : mais le gibet serait plus haut et plus élevé qu’il ne l’est d’ordinaire. Monsieur Coras cite là-dessus Balde.

Arnaud du Tilh a été condamné pour avoir commis sept grands crimes : fausseté de nom, supposition de personne, adultère, rapt, sacrilège, larcin, plagiat (ce dernier crime est celui qu’on commet en retenant une personne qui est en puissance d’autrui ; on est encore coupable de ce crime, suivant le droit civil, lorsqu’on dispose d’une personne libre, en la vendant, ou l’achetant comme un esclave).

Il faut remarquer la disposition de cet Arrêt, qui adjuge les biens d’Arnaud du Tilh à la fille qu’il a eue de Bertrande de Rols, à cause de la bonne foi de la mère. Cet Arrêt est conforme à un Arrêt du 5 mars 1547, rapporté par Chopin. Voici l’espèce : Un homme marié épousa une seconde femme qui ignorait ce mariage ; l’arrêt adjugea la succession du père à leurs enfants.

« Met hors de procès et d’instance Martin Guerre et Bertrande de Rols ». Monsieur Coras nous apprend dans ces termes « que les plus grandes difficultés du procès, auxquelles la Cour travailla le plus, furent si Martin Guerre et Bertrande de Rols étaient en voie de condamnation ». Martin Guerre paraissait coupable, parce qu’en abandonnant sa femme il était la cause du désordre qui était arrivé ; mais son plus grand crime était d’avoir porté les armes contre son Prince à la bataille de saint Laurent, où il avait eu une jambe emportée d’un coup de canon. M. Coras dit que la Cour considéra qu’il y avait eu plus de légèreté que de malice dans la conduite de Martin Guerre ; que, s’il avait donné l’occasion de l’adultère qu’avait commis Bertrande de Rols, c’était une occasion éloignée ; qu’il ne pouvait par conséquent être coupable au tribunal des hommes ; qu’il n’avait pas eu un dessein formel de porter les armes contre son Prince ; qu’étant allé en Espagne, il avait été laquais du Cardinal de Burgos, et puis du frère de ce Cardinal, qui l’avait emmené en Flandres ; qu’il avait été obligé de suivre son maître à la bataille de saint Laurent, où il avait combattu malgré lui, ne pouvant pas se dérober aux yeux de son maître ; que d’ailleurs il avait, par la perte d’une jambe, expié la peine de ce crime qu’on lui imputait.

À l’égard de Bertrande de Rols, elle paraissait plus coupable que Martin Guerre. Pouvait-on comprendre qu’elle eût pu être abusée par l’imposteur, si elle n’eût pas voulu l’être, et si l’erreur n’eût pas eu pour elle des attraits ? Une femme à qui un mari s’est livré si longtemps n’en saisit-elle pas des traits distinctifs, que le plus habile imposteur ne peut jamais avoir ? Quand la nature se serait mise en frais de la ressemblance la plus parfaite, ne laisse-t-elle pas toujours, dans la copie qu’elle semble faire, des différences imperceptibles à tout le monde, à la vérité ; mais non pas à une épouse ? Ce qui prouve que l’erreur avait de grandes charmes pour elle, c’est que pendant plus de trois ans on a travaillé en vain à lui dessiller les yeux. Cependant la grande opinion qu’on avait de sa sagesse, et son excuse, soutenue de l’exemple des sœurs de Martin Guerre, et de tant de personnes abusées de la même erreur ; la ressemblance frappante de l’imposteur avec celui qu’il représentait ; les indices qu’il donnait, jusqu’à rapporter les circonstances les plus mystérieuses, les époques les plus précises des événements qui n’avaient été confiés qu’au Dieu Hymen ; la crainte qu’elle avait de se déshonorer si elle poursuivait l’imposteur, et de succomber dans l’accusation, n’étant pas certaine de son erreur ; toutes ces raisons, jointes à la règle qui veut que dans le doute l’innocence se présume, firent pencher la Cour en faveur de Bertrande de Rols.

« Et a renvoyé et renvoie ledit du Tilh audit Juge de Rieux, pour faire mettre ce présent Arrêt à exécution selon sa forme et teneur ». M. Coras remarque qu’il était convenable de renvoyer l’exécution de l’arrêt au Juge de Rieux, lequel avait tout mis en usage pour rechercher la vérité et rendre une bonne justice. Il ajoute qu’il est de la dignité des Cours souveraines de maintenir et conserver l’autorité des Juges inférieurs, et que le Bien public exige qu’elles les fassent révérer ; que les Lois le leur commandent. Je dirai que leur propre intérêt les y engage ; parce que les juges subalternes sont l’image des juges supérieurs. Une autre raison qui les oblige à renvoyer l’exécution des jugements par devant les juges inférieurs, c’est que les crimes ayant été commis.


dans le ressort de ces derniers, il est important pour le Bien public que l’exemple de la punition du crime se fasse dans le lieu où il a été commis, afin d’y imprimer la crainte de la Justice.

Les aveux d’Arnaud du Tilh

Pour mettre l’arrêt en exécution, Arnaud du Tilh fut ramené à Artigues ; il fut ouï dans la prison par le Juge de Rieux : il confessa fort au long son imposture, le 16 septembre 1560. Il avoua qu’il s’était déterminé à commettre ce crime, parce qu’étant de retour du camp de Picardie, quelques amis intimes de Martin Guerre le prirent pour lui. Il s’informa d’eux de l’état de Martin Guerre, de ce qui concernait son père, sa femme, ses sœurs, son oncle et ses autres parents ; de ce qu’il avait fait avant qu’il quittât le pays. Ces nouvelles lumières, se réunissant à celles qu’il avait acquises dans les conversations qu’il avait eues avec Martin Guerre, le mirent parfaitement en état de faire face à tous ceux qui voulurent l’éprouver. Il nia de s’être servi de charmes, d’enchantement, et d’aucune espèce de magie. Il confessa encore divers autres crimes ; et il persista dans sa confession toutes les fois qu’il fut interrogé là-dessus.

Étant au pied de la potence dressée devant la maison de Martin Guerre, il lui demanda pardon et à sa femme, il parut pénétré d’une vive douleur et d’un repentir amer et douloureux, et il implora toujours la miséricorde de Dieu par son Fils Jésus-Christ, jusqu’à ce qu’il fût exécuté : son corps ensuite fut brûlé.

 

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19 août 2013

TRAITE DES PYRENEES

7

FRANCE et ESPAGNE

TRAITE DES PYRENEES       I

 

Traité pour déterminer la frontière depuis l'embouchure de la Bidassoa jusqu'au point où confinent le Département des Basses-Pyrénées, l'Aragon et la Navarre. Signé à Bayonne le 2 décembre 1856

Convention additionnelle au Traité susmentionné. Signée à Bayonne le 28 décembre 1858

Textes authentiques : français et espagnol.

Classés et inscrits au répertoire à la demande de la France le 3l juillet'

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Ceux de ces propriétaires qui laisseraient passer le délai qui vient d'être fixé sans demander leurs titres seront censés renoncer aux droits que leur donnent les stipulations du présent Traité.

Art. 20. La navigation dans tout le cours de la Bidassoa, depuis Chapite- lacoarria jusqu'à son embouchure dans la mer, sera entièrement libre pour les sujets des deux Pays, et ne pourra, sous le rapport du commerce, être interdite à personne, tout en exigeant cependant la soumission aux règlements en vigueur dans les lieux où les opérations commerciales seront faites.

Art. 21. Les habitants de la rive droite, comme les habitants de la rive gauche, pourront librement passer et naviguer, avec toute sorte d'embarcations à quille ou sans quille, sur la rivière, à son embouchure et dans la rade du Figuier.

Art. 22. Ils pourront également, les uns et les autres, et en se servant de toute espèce d'embarcations, pêcher avec des filets ou de toute autre manière, dans la rivière, à son embouchure et dans la rade, mais en se conformant aux règlements qui seront établis d'un commun accord et avec l'approbation des

Autorités supérieures entre les délégués des municipalités des deux rives, dans le but de prévenir la destruction du poisson dans la rivière et de donner aux frontaliers respectifs des droits identiques et des garanties pour le maintien du bon ordre et de leurs bonnes relations.

Art. 23. Tout barrage quelconque fixe ou mobile, qui serait de nature à gêner la navigation dans la Bidassoa, est interdit dans le cours principal de la rivière où se trouve la limite des deux Pays.La nasse qui existe aujourd'hui en amont du pont de Béhobie, sera enlevée au moment où le présent Traité sera mis à exécution.

Art. 24. Le Gouvernement de S. M. Impériale s'engage à faire remettre à la municipalité de Fontarabie qui jouit de la nasse dont il est question dans l'article précédent, une somme, une fois payée, représentant, à cinq pour cent d'intérêt, le capital du prix moyen qui lui a été payé pendant les dix dernières années pour le fermage de cette nasse. Le payement de ce capital précédera l'enlèvement du barrage de la nasse prescrit par l'article précédent : cet enlèvement devra avoir lieu immédiatement après le payement effectué.

Art. 25. Toute embarcation naviguant, passant ou péchant dans la Bidassoa, demeurera soumise exclusivement à lajuridiction du Pays auquel elle appartiendra,et ce ne sera que sur les îles et sur le territoire ferme, soumis à leur juridiction, que les Autorités de chaque Etat pourront poursuivre les délits de fraude, de contravention aux règlements ou de toute autre nature que commettraient les habitants de l'autre Pays; mais pour prévenir les abus et les difficultés qui pourraient résulter de l'application de cette clause, il est convenu que toute embarcation touchant à l'une des rives, y étant amarrée ou s'en trouvant assez rapprochée pour qu'il soit possible d'y entrer directement du rivage, sera considérée comme se trouvant déjà sur le territoire du Pays auquel appartient cette rive.

Art. 26. Le pont de Béhobie, sur la Bidassoa, construit moitié par la France et moitié par l'Espagne, appartient aux deux Puissances, et chacune d'elles restera chargée de l'entretien de la moitié qui lui appartient.Il sera placé aux deux extrémités de la ligne où se rejoignent les travaux exécutés de part et d'autre, un poteau aux armes des deux Nations pour indiquer la limite de chacune des Souverainetés.

Vol, 1142, 11-838324______United Nations — Treaty Series • Nations Unies — Recueil des Traités 1979

Art. 27. L'île des Faisans, connue aussi sous le nom d'île de la Conférence, à laquelle se rattachent tant de souvenirs historiques communs aux deux Nations, appartiendra, par indivis, à la France et à l'Espagne.Les autorités respectives de la frontière s'entendront pour la répression de tout délit qui serait commis sur le sol de cette île.Les deux Gouvernements prendront, d'un commun accord, toutes les

mesures qui leur paraîtront convenables pour préserver cette île de la destruction qui la menace, et pour l'exécution, à frais communs, des travaux qu'ils jugeront utiles à sa conservation ou à son embellissement.

Art. 28. Les Traités, les Conventions et les Sentences arbitrales, ayant rapport à l'abornement de la frontière comprise entre le sommet d'Analarra et l'embouchure de la Bidassoa, sont annulés de fait et de droit dans tout ce qui est contraire aux clauses stipulées dans les articles précédents, à dater du jour où le

présent Traité sera mis à exécution.

Art. 29 et dernier. Le présent Traité sera ratifié le plus tôt possible par LL. MM. l'Empereur des Français et la Reine des Espagnes, et les ratifications en seront échangées à Paris, dans le délai d'un mois, ou plus tôt, si faire se peut.Il sera mis à exécution quinze jours après la clôture des procès-verbaux qui, en vertu de ce qui a été convenu dans l'article 10, constateront la pose des bornes et des signaux de reconnaissance dont l'établissement aura été jugé nécessaire pour déterminer la frontière avec précision, et pour relier ensemble les sommets et les cours d'eau dont le Traité fait mention, comme formant les points principaux

de la ligne divisoire entre les deux Etats.EN FOI DE QUOI les Plénipotentiaires respectifs ont signé le présent Traité, fait en double à Bayonne le 2 décembre 1856 et y ont apposé le sceau de leurs

armes

1 Signé par Baron Gros — .2 par Général Callier — •' Signé par Francisco M, Marin —

4 Signé par Manuel de Monteverde —

Vol. 1142,11-83

On a vu qu'une fois de plus les Hendayais ne recueillirent de ce traité d'autres avantages que le souvenir des fastes historiques qui se déroulèrent sur leur territoire et qu'ils durent attendre vingt ans encore la reconnaissance du droit de libre navigation sur la Bidassoa.

ll aura fallu attendre les traités de Bayonne en 1856 - 1858

pour que la paix entre Hendaye et Fontarrabie soit définitive

soit pendant 653 ans

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19 août 2013

URTUBIE

7

URTUBIE    I

 les Tartas d'Urtubie

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C'est en 1341 que Martin de Tartas reçoit du roi d'Angleterre, l'autorisation de construire un château de pierres avec murailles et fossés, parce qu'il n'en existe pas d'autre à trois lieues de là.

Les lettres patentes en faveur de Martin de Tartas, Seigneur d'Urtubie, sont signées par le roi Édouard III d'Angleterre à Westminster, le 4 mai 1341.

Mais Martin mourut tragiquement à Bayonne en 1343, sans postérité, et c'est son frère Auger de Tartas qui achève la construction d'Urtubie.

Il prête serment de fidélité et hommage féodal à Edouard III au Palais de l'Archevêché de Bordeaux.

Après lui, la propriété passe à son fils Adam, capitaine des gardes de l'Infant Don Carlos, héritier du trône de Navarre, puis, en 1377, à son petit-fils, Pierre Arnaud et ensuite à son arrière-petit-fils, Esteban d'Urtubie, qui meurt sans postérité en 1437

.XVe siècle : les Sault et les Montréal

C'est la fille du frère d'Esteban, Domilia Martinez d'Urtubie qui hérita du château.

Elle avait épousé vers 1415, Saubat de Sault. 1609

Après elle, la seigneurie d'Urtubie, avec le château, passe à son fils Jean de Sault, qui épousa vers 1445, Maria Tereza de Lazcano, dont il eut une fille, Marie, héritière de Sault et d'Urtubie.1789. Abolition du Biltzar du Labourd dans le cadre de la construction de l’état-nation. Simon Amespil maire-abbé de Hendaye sera le dernier représentant hendayais dans la dernière réunion de cette institution abolie en 1790 quand l’Assemblée Nationale approuve la division de la France en 83 départements, dont celui qui réunit le Labourd, La Basse Navarre et la Soule avec le Béarn.

En 1448, Jean de Sault alla combattre les Gamboa, en Guipuzcoa, avec le seigneur de Lazcano, son beau-père, qui était le chef du parti des "onazinos".

Peu de temps après, Jean de Sault mourut et sa veuve, Maria-Tereza se remaria en 1456 avec Jean de Montréal, conseiller du roi d'Aragon et trésorier général de Navarre, veuf de Dona Maria de Larraya.

Jean de Montréal passa dans le camp de l'infant Don Carlos, qui le nomma son conseiller, ce qui entraîna la confiscation de ses biens espagnols au profit d'un gentilhomme navarrais.

La guerre se poursuivit jusqu'à ce qu'un pacte fût signé le 23 janvier 1460 : Jean de Montréal fut réintégré dans ses biens et dignités, et il s'installa à Urtubie auprès de sa femme, Maria-Tereza de Lazcano.

Jean II de Montréal, fils aîné de Jean, avait environ dix-sept ans lorsqu'il épousa Marie d'Urtubie, fille du premier lit de sa marâtre.

En Janvier1609 ce fut le sieur d'Urtubie, soutenu par le sieur d'Amou qui s'adressant au roi Henri IV lui même le supplia d'envoyer des commissaires pour '' nettoyer le Labourd de ses sorciers '' p.30 Car en plus de son assistancs aux procés, le roi avait le président d'Espagnet de régler les vives querelles que se faisaient Français et Espagnols, d'une rive à l'autre de la Bidassoa, querelles qui s'envenimaient facilement

Il eut l'honneur de recevoir en 1463 le roi Louis XI qui séjourna à Urtubie lorsqu'il fut appelé comme médiateur par les rois de Castille et d'Aragon.

C'est ainsi que l'on peut lire dans les chroniques de Philippe de Commynes que le roi visita " un petit château nommé Heurtebise..." Louis XI, lors de son départ emmena Jean II avec lui comme chambellan ; ce dernier devait participer en 1494 à la conquête du royaume de Naples avec Charles VIII.

Jean II de Montréal et Marie d'Urtubie ont eu deux enfants : Louise, qui épousa en 1480 Jean de Beaumont-Navarre, petit fils de Charles III, roi de Navarre, et Louis, connu sous le seul nom d'Urtubie, élevé comme enfant d'honneur à la cour de Charles VIII, qui devint, en 1496, écuyer tranchant.

Mais pendant l'absence de Jean II d'Urtubie, qui guerroyait sous le ciel d'Italie, Marie d'Urtubie, sa légitime épouse, se jugeant sans doute déjà veuve, épousa, en 1469, Rodrigo de Gamboa d'Alzate en Navarre et de Renteria en Guipuzcoa.

Le couple reçut la bénédiction nuptiale en l'église Saint- Vincent d'Urrugne et eut six enfants.

L'aîné, Jean, dit "Ochoa", va revendiquer l'héritage d'Urtubie, ce qui entraînera une longue querelle successorale, qui se terminera en 1574
En effet, Jean II de Montréal revendique ses droits après la mort de Rodrigo d'Alzate et, par arrêt du parlement de Bordeaux en date du 13 juin 1497, est réintégré en la jouissance de la personne et des biens de Marie d'Urtubie, sa femme légitime.

Mais cette dernière, une femme de caractère, déjà surnommée "la bigaine", refuse de se soumettre à cet arrêt et emploie des moyens expéditifs : elle fait brûler le château d'Urtubie et se retire en Navarre chez les Gamboa d'Alzate, où elle meurt en 1503.

Le roi Louis XII, par lettres datées de Bourges du 20 avril 1505, permet à Jean II de Montréal de "réédifier et fortifier la dite place d'Urtubie de telles grandes et puissantes fortifications qu'il pourra faire et que bon lui semblera". Louis de Montréal, fils de Jean II, ne fut mis en possession de tout l'héritage de Marie d'Urtubie qu'après l'intervention du gouverneur de Guyenne, agissant sur l'ordre du roi, après de nombreuses difficultés et bagarres avec Jean d'Alzate, dit "Ochoa".

Louis de Montréal fut nommé "bailli de Labourd", le 17 octobre 1511, et fit reconstruire le château, son père, Jean II de Montréal s'étant retiré au château de Sault.

On ne connaît pas exactement la date à laquelle fut reconstruit le château détruit par Marie d'Urtubie.

En fait, le château ne fut pas entièrement détruit puisque subsistèrent le donjon, le chemin de ronde et la porterie, qui permettent encore aujourd'hui d'imaginer ce que devait être le premier château fort.

Le château fût donc "agrandi" entre 1506 et 1540 par Louis de Montréal, mort en 1517 dans un combat contre les Guipuzcoanos, et par son fils Jean III.

Aux constructions antérieures fût adjoint un corps de bâtiment correspondant au grand salon actuel et la grosse tour avec l'escalier de pierres à vis suspendu.

, par le mariage de Jean II d'Alzate d'Urtubie, petit-fils du second mariage, avec sa cousine issue de germains, Aimée de Montréal d'Urtubie, petite fille du premier mariage.

Entre-temps, l'histoire de la succession allait connaître bien des rebondissements.

3a - XVIe et XVIIe siècles : les d'Alzaté d'Urtubie

La propriété d'Urtubie alla par mariage à Aimée de Montréal, fille de Jean III, qui épousa en 1574 Jean d'Alzate qui comme nous l'avons vu plus haut descendait lui aussi de Marie d'Urtubie et dont le père avait obtenu des maîtres des requêtes du roi la propriété de la seigneurie d'Urtubie en 1563.

Leur petit fils, Salvat d'Alzate d'Urtubie, obtint en 1654 que Louis XIV érige la terre d'Urtubie en vicomte et confirme la charge de bailli d'épée du Labourd qu'il avait accordée aux d'Urtubie.

C'est Salvat qui à la suite de son père André modifiera la toiture du château et construira la chapelle.

Ces travaux avaient pour objet de rendre le château digne des fonctions du Vicomte d'Urtubie qui fut entre autre, gouverneur du Labourd

. C'est également Salvat qui installa à Urtubie la très belle collection de tapisseries de Bruxelles du XVIème siècle encore en place de nos jours.

La propriété d'Urtubie passa ensuite aux héritiers de Salvat, nés de son premier mariage, c'est à dire André, puis Henri et Ursule, sa fille, qui en 1733 avait épousé Pierre de Lalande-Gayon.

3b -XVIIIe siècle : les Lalande d'Urtubie

Ce sont Pierre de Lalande et son épouse, Ursule d'Alzate d'Urtubie, qui réalisèrent les travaux qui ont donné au château et au parc leur physionomie actuelle.

Les travaux furent achevés en 1745 et comprenaient le corps de bâtiment correspondant au petit salon actuel, la terrasse, l'escalier Louis XY une partie importante du Châtelet d'entrée et l'Orangerie.

C'est Pierre-Eloi de Lalande, arrière petit-fils d'Ursule, qui, en 1830 a cédé les domaines d'Urtubie et de Fagosse à François III de Larralde-Diustéguy, son cousin et cinquième descendant de Salvat d'Urtubie et de sa seconde épouse, Jeanne-Marie de Garro. Un échange de lettres entre Pierre-Eloi de Lalande et François III de Larralde-Diustéguy, témoigne de la satisfaction du vendeur de voir la propriété demeurer dans la même famille.

4a - XIXe siècle : les Larralde-Diusteguy

François III de Larralde, maire d'Urrugne, marié en 1819 avec Maria Antonia de Polio y Sagasti, a transmis la propriété au plus jeune de ses fils, Henri de Larralde-Diustéguy, maire d'Urrugne pendant 56 ans et conseiller général des Basses Pyrénées pendant 40 ans. Henri demeura célibataire et laissa Urtubie à sa soeur Gabrielle, mariée à Jules Labat, maire de Bayonne et député des Basses Pyrénées qui eut l'honneur de recevoir en séjour chez lui à Biarritz l'Empereur Napoléon III et son épouse venus en 1854 suivre les travaux du Palais Impérial.

4b - XXe siècle : les Comtes de Coral

Henri de Larralde Diustéguy a vécu les dernières années de sa vie dans la partie du château construite en 1745. A sa mort, survenue en 1911, la Comtesse Paul de Coral, fille de Gabrielle de Larralde Diustéguy a aménagé différentes pièces du château, dont la salle chasse, pour les rendre plus habitables et conformes à une vie de famille agréable.

Après elle, c'est son fils aîné, le Comte Bernard de Coral et sa femme Hélène qui se sont installés à Urtubie. Continuant la tradition familiale, Bernard de Coral a été maire d'Urrugne de 1929 à 1945 et de 1947 à 1965. Il a été aussi député des Basses-Pyrénées de 1934 à 1941 et conseiller général de Saint-Jean-de-Luz de 1951 à 1963. Le Comte de Coral et son épouse ont obtenu en 1974, l'inscription de la propriété à l'inventaire supplémentaire des Monuments Historiques,

Leur fils unique le Comte Paul-Philippe de Coral et son épouse ont ouvert le château à la visite et ont décidé d'y aménager des chambres d'hôtes pour faire découvrir à un large public les charmes de la côte basque et la richesse de son passé.

Comte de Coral

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                             KEPA ORDOKI

Pedro Esteban Ordoqui Vazquez (Kepa) 

Nationaliste basque

 

« Toda guerra es cruel en si misma, y si es civil, todavia mas. »)

Défenseur d’Irun, futur commandant du Bataillon Gernika.

(Libération de la France, 1944/1945)

 

Pedro Esteban Ordoqui (Kepa) est né le 3 août 1912 à Irun, quartier Meaca, dans la ferme Ibarla. En poursuivant ses études, il pratique divers métiers, en particulier dans le bâtiment. Il milite tout jeune au syndicat S.T.V., puis à l’organisation nationaliste de gauche A.N.V. Son service militaire terminé, il se marie au mois de mai 1936. Autant dire que le soulèvement franquiste du 18 juillet le surprend en pleine lune de miel.

Dès le premier jour, Kepa (c’est ainsi que l’appellent ses camarades basques), se jette pleinement dans le combat. Quoique nationaliste, il sera l’un des proches du lieutenant Ortega et de Manuel Cristóbal Errandonea. Dès les premières heures, c’est lui qu’Antonio Ortega charge d’apporter une lettre à son homologue, le lieutenant des cabineros de Vera de Bidasoa, afin qu’il affirme, avec ses hommes, son engagement dans le camp de la République, ce qu’il obtient. Kepa Ordoqui fait partie du groupe de volontaires civils qui, pratiquement dépourvu d’armes de guerre, se trouve pris à Lesaca, dans le premier engagement avec les avant-gardes rebelles. Il sera par la suite de tous les combats, en particulier San Martial, lors des journées héroïques de fin août et début septembre 1936.

Irun perdu, il n’abandonne pas le combat. Il ne passe pas en France, mais fait retraite avec les derniers combattants par le Jaizquibel. Après la chute de San Sébastien, il est blessé lors des durs combats du Sollube. En mars 1937, sa famille est capturée par le tristement célèbre navire « Galdames ». En juin, Pedro Ordoqui est nommé commandant du bataillon San Andres. Fait prisonnier, il est successivement interné aux prisons de Santo

ňa, Larriňaga et Burgos, et le 3 septembre il est condamné à mort. Son exécution est reportée plusieurs fois. Le 28 juillet 1939 il s’évade de prison. Après un mois de marche clandestine, il réussit à atteindre Biriatou. Arrêté par la gendarmerie française, interné au camp de Gurs, il s’évade à nouveau et passe alors dans la clandestinité. Mais une nouvelle arrestation survient, Kepa est cette fois arrêté avec des journaux interdits déclarés subversifs.

Lors de l’invasion allemande de 1940, il passe en zone non occupée (jusqu’au 11 novembre 1942). Après cette date, à Luchon (Haute-Garonne) la Gestapo l’arrête. Torturé, il doit être conduit à Peyresourde pour y être exécuté. Et là encore, miraculeusement, Kepa réussit à s’enfuir. Repéré et intercepté dans un village, lors de fêtes locales, il trompe une fois de plus ses poursuivants par sa promptitude dans sa fuite.

En 1944, Kepa met sur pied le bataillon Gernika, lequel avec 130 combattants volontaires d’Euskadi, mènera les durs combats pour éliminer les réduits bétonnés des poches allemandes de l’Atlantique. Du 14 avril 1945, jour du déclenchement de l’offensive, au 20 avril, le bataillon Gernika participe à ces combats, écrivant une nouvelle page de la lutte des basques contre les ennemis de la démocratie et de la liberté, contre ceux-là même qui, il y a huit ans, presque jour pour jour, écrasaient sous les bombes la ville symbole de leur liberté. Près d’un tiers des gudaris basques seront ou tués ou blessés

La guerre terminée, Kepa Ordiqui se retire à Hendaye. Entre-temps, en son absence d’Irun, une juridiction militaire l’a condamné à la peine de mort.

En mars 1960, il préside les funérailles du Lehendakari Aguirre.

Puis, à son tour, meurtri à la fois par le cancer et par les douloureuses divisions du peuple basque, il s’éteint à l’âge de 81 ans, à l’hôpital de Bayonne, le 28 novembre 1993.

 

 

 

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19 août 2013

Croisic

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SUHIGARAYCHIPI

était il Bayonnais ou Hendayais   

Etait-il natif de Bayonne, Joannis de SUHIGARAYCHIPI dit Coursic, dit Croisic, ce grand marin, qui peut être considéré comme l'un des plus prestigieux capitaine des ports de Bayonne et du pays du Labourd et dont le ministre de Pontchartrain avait dit à Madame de Gramont qu'il était meilleur corsaire que bon sujet de Sa Majesté .

Capitaine de navire marchand et en son temps capitaine de corsaire, il devint capitaine de frégate du roi comme Louis de Harismendy, natif de Bidart, qui peut être considéré comme son égal.

Plusieurs auteurs ont confirmé son origine bayonnaise dans leurs ouvrages.

Il est vrai que certaines archives municipales de Bayonne permettaient de supposer que ce glorieux capitaine était né dans cette ville.

Dans certains registres est signalée la maison de Croisic à la rue de la Galuperie.

En outre dans un registre paroissial, est mentionné , à la date du 24 novembre 1638, le baptême dans l'église cathédrale, de Jehan, fils de Joannis de Suhigaraychipy et de Magdeleine de Sopite.

Mais cette famille était-elle de Bayonne, ou bien ce qui est probable, s'y était elle réfugiée comme beaucoup d'autres familles, lors de l'invasion en octobre 1636, par les troupes espagnoles de certaines paroisses frontalières du Pays de Labourd, et avait-elle prolongé son séjour après le départ en octobre 1637 des envahisseurs, sa maison ayant peut-être été pillée et brûlée comme beaucoup d 'autres maisons de ces paroisses et principalement de Hendaye et de Ciboure ?

Par ailleurs, ce baptême, concernait-il celui qui devait être connu sous le nom de Croisic, nom que portera une partie de sa descendance ?

ORIGINE HENDAYAISE DE COURSIC

Il peut être affirmé que Coursic était natif de

Hendaye. Sa date de naissance et celle de son baptême sont inconnues, car en 1793, les Espagnols entrés dans le territoire de Hendaye, avaient emportés les registres de cette paroisse

En outre, bien que cette période ne soit pas concernée il y a lieu de préciser que les registres d'état civil de cette ville pour la période 1793-1813 , avaient été brûlés par les '' alliés '' lors de leur arrivée en France en 1813

Cependant, les archives des notaires d'Urrugne, de Ciboure et Saint Jean de Luz afférentes aux 17eme et 18eme siècles, conservées par les Archives Départementales des Pyrenées Atlantiques permettent de retrouver trace de certaines familles de Hendaye.

Parmi ces minutes notariales, se trouve le contrat de mariage, établi à Hendaye le 23 janvier 1679 par Me de Bereau, notaire royal de Ciboure, de ce fameux Joannis de Suhigaraychipy, qualifié de marinier, et de Saubadine de Haramboure , les deux habitant Hendaye.

Le futur époux était assisté de son beau-frère Joannis de Morcoitz, époux de Marie de Suhigaraychipy La future épouse était la fille de Miguel de Haramboure et de Marie de Hiriart sieur et dame de la maison de Sansignene de Hendaye.

Elle était assistée de Joanissona Detcheverry et de Marie de Haramboure, conjoints sieur et dame de la même maison, son beau-frère et sa soeur .

Un des témoins était Martin de Haramboure, capitaine de navires, ancien jurat de la paroisse de Hendaye, oncle de la future épouse ( et beau-frère de l'époux car marié à Jeanne de Suhigaraychipy

Précédemment, le 24 février 1675 , en la paroisse de Biriatou et par le même notaire, avait été établi le même contrat de mariage d'un autre Joannis de Suhigarachipy , aussi marinier habitant aussi à Hendaye, et de Domindigne Daspicoetta, fille de Gracianne de Chanchic, veuve du premier lit de feu Martin de Daspicoetta de Biriatou et veuve en deuxième noces de Joannis de Haramboure, sieur de la maison d'Arroupea de Biriatou.

Le futur époux était assisté de ses beau-frères, Martin de Haramboure et de Joannis de Morcoitz, maîtres de navires de Hendaye ..

Il est précisé dans ce dernier contrat, que la mère de Joannis de Suhigaraychipy était Marie de Margerie. Par ailleurs, divers actes notariés prouvent que les deux futurs époux, concernés par ces deux contrats de mariage, étaient deux frères

.Ils avaient tous deux comme beau-frères Joannis de Morcoitz.

Ce dernier a été, en 1691, troisième lieutenant sur la frégate La Légère commandée par Croisic dont le frère, l'autre Joannis s'y trouvait embarqué en qualité de deuxième lieutenant.

En 1690 , Coursic résidait encore à Hendaye , selon les mentions figurant sur un acte notarié daté du 12 septembre 1690 Cet acte était établi à la demande de André Darretche , capitaine de navires de Saint jean de Luz pour être notifié à Joannis de Suigaraychipy di Coursic habitant Hendaye en vue d'obtenir conformément à la décision du Conseil d'Etat du 21 juillet 1690 la main levée des trois quarts du vaisseau le Saint Antoine de Saint Jean de Luz et de l'ensemble de la cargaison de morue.

Ce navirre venant de Terre-Neuve avait été pris par Coursic, car 1/4 appartenait à des Espagnols.

Par ailleurs, sur le registre paroissial, Coursic capitaine de frégate du Roi, parrain à un baptême célébré à Bayonne le 6 janvier 1691 est porté comme résidant à Hendaye.

Sur le même registre, de nouveau parrain à Bayonne le 16 janvier 1691 , est porté comme résident à Hendaye

Il est probable que c'est vers 1691 que Croisic et sa famille s'est installé à Bayonne achetant la maison qui sera nommée la maison de Croisic, à la rue de la Galuperie .

A ce sujet il y a lieu de préciser que les noms des maisons n'étaient pas fixées suivant les mêmes règles selon qu'elles étaient situées en milieu rural ou en milieu urbain.

En milieu rural basque selon l'usage ou la coutume, il était attribué aux maisons, un nom compte tenu, soit de la situation par rapport au voisinage ou à la nature environnante, soit de leur forme, de couleur, de leur ancienneté, ce nom n'étant pas modifié par le temps.

Au centre de Bayonne, les maisons étaient nommées par le nom de leur propriétaire.

Le nom se modifiait donc lorsque il y avait un changement de propriétaire.

La maison de Croisic a été ainsi nommée après son achat par Croisic.

Après le décès de ce dernier, sa veuve Saubadine de Haramboure a acheté une maison située rue Pannecau ; un Procès Verbal de prise de possession par elle de cette maison a été établi le 5 décembre 1696 par Me de Laborde notaire royal de Bayonne ( 7 )

ASCENDANCE DE CROISIC .

Joannis de Suigaraychipy était le fils de Joannes de Suhigaraychipy et de Marie de Margerie résidant à Hendaye.

Ces derniers s'étaient mariés en février 1640. Un acte notarié daté du 28 février 1642 cite en effet leur contrat de mariage établi en février 1640

La date de naissance de leur fils '' Coursic ''devait se situer entre 1640 et 1646

Il peut être affirmé sans crainte d'erreur, que l'enfant Jehan de Suigaraychipy Baptisé à Bayonne le 24 novembre 1638 n'était pas celui qui allait devenir Croisic .

Les noms et prénoms sont en effet différents , s'agissant de la mère Marie de Margerie, mère de Croisic, était la fille unique de Esteben de Margerie, marchand de Hendaye, et de Marie d'Agorette sieur et dame de la maison de Péricorena de Hendaye.

Veuf Esteben de Margerie avait épousé en deuxième noces Marie Daguerre. a testé le 6 avril 1654 devant Me Diharce notaire royal

LE PERE DE CROISIC CAPITAINE DE NAVIRE.

Un acte daté du 31 décembre 1641 cite le navire la Marie de Saint Vincent de Ciboure, de 180 tx.armé de 6 pièces de canon, 2 pétards, 20 mousquets navire qui doit partir pour la pêche et chasse des baleines sous la conduite de Joannes de Suhugaraychipy, marchand marinier de Hendaye.

Un autre acte daté du 17 novembre 1665 cite le navire le Saint André de 150 TX qui est revenu de la pêche aux baleines, et dont le maître postif était Joannes de Suhigaraychipy dit Guichona, habitant la paroisse de Hendaye .

Il est probable qu'il s'agissait du père de Croisic.

ORIGINE DU NOM DE SUHIGARAYCHIPY

Ce nom est celui d'une maison d'Urrugne, citée dans divers actes, et notamment dans un acte notarié daté du 20 juin 1647, le maître de cette maison étant alors Pascoal de Suhigaraychipy .

Dans plusieurs paroisses du pays du Labourd et de Basse-Navarre, il existait une maison nommée Suhigaray. Mais il semble qu'une maison appelée Suhigaraychipy ne se trouvait qu'à Urrugne , où, par ailleurs, existait et existe encore la maison Suhigaray.

Durant les 17 eme et 18eme siècles, diverses personnes vivant dans la paroisse d'Urrugne ont continué à porter ce nom qu'elles devaient à un ancêtre né dans la maison de Suhigaraychipy .

Croisic né à Hendaye, paroisse voisine d'Urrugne, devait avoir son père, ou son grand-père né dans cette même maison.

CONCLUSION

Il est certain que Joannis Suhigaraychipy dit Coursic, dit par la suite et généralement Croisic n'était pas natif de Bayonne .

Les informationsqui ressortent de ces documents de son époque tendent à prouver qu'il était de la paroisse de Hendaye.

Pour terminer, il y a lieu de rappeler qu'a Terre-Neuve, en l'église de Placentia , se trouve la tombe de Croisic décédé au cours d'une de ses croisières.

Sur la pierre tombale ont été gravées les mentions suivantes :'' CY GIS IOANNES DE SUIGARAICHIPI DIT CROISIC CAPITAINE DE FREGATE DU ROY 1694 '' ENVIEUX POUR L'HONNEUR ' DE ) MON ( Sr LE ? ) PRINCE J' ALLAIS

NE SUIVANT SA CARRIERE ATTAQUER LES ENNEMIS EN LEUR MESME ( PAYS )

Décédé à Plaisance TERRE NEUVE en 1694

(Bulletin Sté Sciences Lettres et Arts de Bayonne

DUCERE un corsaire basque sous Louis XIV

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19 août 2013

SUHIGARAYCHIPI

5

 UN CORSAIRE HENDAYAIS Coursic

SUHIGARAYCHIPI          I

dit COURSIC

CORSAIRE HENDAYAIS

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ÉDOUARD DUCÉRÉ


 

Il est vraiment, surprenant que les brillants corsaires qui combattirent et luttèrent contre les ennemis de la France à toutes les époques, et principalement sous l'ancien régime, n'aient pas laissé plus de traces de leurs hauts faits.

Nous ne croyons pas cependant, ainsi que l'affirment plusieurs écrivains, qu'il faut eu accuser la paresse de ces braves marins plus prompts à manier le sabre que la plume. Quelques-uns d'entre eux ont laissé des souvenirs et même des journaux de bord qui ont été publiés et dont l'intérêt est des plus vifs.

Mais c'est là l'exception et pour la presque totalité d'entr'eux on ne trouve dans les écrits du temps qu'un nom auquel est joint un (aitd'armes puis la plus pénible obscurité.

Les marins de notre région si fertile en célébrités de ce genre, n'échappent guère à cette règle, nous connaissons bien les noms de la plupart d'entr'eux, mais les détails de leur vie aventureuse nous échappent complètement.

Heureusement que quelques documents miraculeusement sauvés les ont préservé de l'éternel oubli.Et cependant les pièces relatant leurs croisières et leurs combats ont existé. Le doute n'est pas possible à cet égard. Mais que sont devenues les anciennes archives de l'Amirauté de Rayonne, et celles non moins précieuses de l'Inscription maritime de notre ville ? M. Goyetche, dans son histoire de Saint-Jean de-Luz assure avoir vu les comptes d'armement d'une des plus puissantes maisons de cette ville sous Louis XIV, et nous-mème avons eu entre les mains, le répertoire des documents de ce genre conservé au siècle dernier à l'arsenal maritime de Bayonne.

Mais toutes ces pièces qui auraient pu éclairer d'une vive lumière les exploits de nos marins ont disparu, sans qu'on puisse dire si elles ont été détruites où si, reléguées dans quelque réduit ignoré, elles reparaîtront quelque jour pour la plus grande joie de nos érudits.

Parmi ces marins nés dans notre ville, un surtout mérite une étude particulière. Sur celui-ci, il semble que le voile de l'oubli se soit quelque peu soulevé, et nous permette d'entrevoir non sa puissante personnalité, mais quelques-unes de ses actions de guerre. Nous allons dire sur ce personnage ce que nous avons appris d'autant plus volontiers qu'une figure semblable honore le pays dans lequel il a vu le jour,

Nous avons choisi ce vaillant parce que, après lui avoir consacré quelques pages clans un de nos ouvrages précédemment publiés, le savant D' Hamy à eu la bonne fortune de trouver aux archives nationales, un document de grand prix qui jette une vive lumière sur une de ses plus aventureuses expéditions. Le savant membre de l'Institut, a fait précéder la pièce trouvée par lui d'un savant commentaire et a même eu l'obligeance de nous envoyer quelques pièces dont il n'avait pu taire usage. Nous lui en exprimons ici toute notre reconnaissance.

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Au milieu des corsaires Savonnais qui se firent le plus remarquer sous le règne de Louis XIV, Johannis de Suhigaraychipis, dit Croisic le plus souvent Coursic, c'est-à-dire le petit corsaire, dans le langage familier du pays, mérite certainement d'occuper l'un des premiers rangs (1).

Malheureusement., pour celui-ci, comme pour beaucoup d'autres, on ne sait rien de .son commencement. Il est certain qu'il ne s'éleva pas jusqu'au commandement d'un navire aussi important qu'une frégate légère sans avoir acquis une double réputation de vaillant militaire et de prudent marin.

Nous savons cependant qu'après avoir longtemps navigué à bord de navires marchands et fait de nombreux voyages aux îles d'Amérique, le capitaine Coursic, aidé de quelques amis, équipa en 1691, la frégate la Légère ; admis à faire la course contre les ennemis de l'Etat, il devint bientôt, grâce à son audace, un sujet de terreur pour les Espagnols, aussi bien que pour les Hollandais. L'enthousiasme excité par son succès devint si grand, que le duc de Gramont, gouverneur de Bayonne (2), sollicita la faveur d'entrer de moitié dans l'armement de la Légère.

Cette association fut des plus fructueuses, car en moins de six ans, le capitaine Coursic captura plus de cent navires marchands. C'était, à un point tel, écrivait M. de Préchac, conseiller au Parlement de Navarre, au ministre Pontchartrain, que les gens du duc cle Gramont, qui sans doute avaient suivi l'exemple de leur maître, s'enrichissaient par les prises des armateurs, ainsi que l'on appelait les corsaires à cette époque. Le secrétaire du duc venait d'acheter une terre cle cinq mille écus. que M. cle Lons lui avait vendu pour payer sa charge de lieutenant de roi (1).

On aurait aimé à savoir par le menu le détail des croisières de Coursic mais, nous l'avons dit, tous les documents composant les anciennes archives de l'amirauté de Bayonne ont disparu et il est a craindre que ceux qui existent encore ne subissent le même sort.. Quoi qu'il en soit,, nous ne savons rien de ces premières années de Coursic, et seule une correspondance du duc de Gramont, nous signale quelques-uns de ses plus brillants faits d'armes, racontés d'ailleurs avec une sécheresse désespérante.

Au mois de septembre 1691, le capitaine Coursic suivait à la piste une escadre ennemie où il fit, dit le duc de Gramont, la plus jolie action du monde. Ayant manœuvré avec la plus grande audace, il captura entre un galion et deux frégates de quarante pièces de canon, une des flûtes hollandaises qui suivaient le convoi et la ramena à Saint-Jean-cle-Luz. Ce navire, chargé de fer, de piques, d'armes et de safran, iuL estimé plus de cent mille francs.

Au mois d'octobre, nouvelle prise à bord de laquelle se trouvait un Espagnol de qualité, nommé le marquis de Tabernicad le los Vallès. D'ailleurs pas cle détails plus circonstanciés.

Cependant une des actions du brave capitaine Hendayais est un peu mieux expliquée dans une longue lettre adressée par le duc de Gramont au ministre Pontchartrain. L'affaire paraît avoir eu lieu au mois d'octobre 1691, et montre jusqu'à quel degré pouvait se déployer l'audace de l'aventureux marin.

Ayant presque achevé sa croisière, et consommé la presque totalité des vivres qu'il avait sur son bord, le capitaine Coursic faisait voile de !a côte de Portugal à la rade de Saint Jean-de-Luz où il devait aller se ravitailler en eau et en biscuit. Dans la nuit, du 3 au 4, il fut tout à coup surpris par un si gros temps qu'il lui fut de toute impossibilité de continuer sa route, ni même de tirer quelque secours de sa conserve dont il se trouvait à ce moment à une portée de canon, et dont la violence de la tempête le sépara immédiatement. Il ne devait plus la rejoindre pendant le reste de cette navigation. Il se trouvait fort embarrassé, par le manque presque complet de vivres, et il en était réduit à l'eau-de-vie, pour toute boisson. Dans une circonstance aussi critique, il réunit ses officiers en conseil, et il prit le parti en homme sage et résolu de relâcher au premier endroit possible de la côte d'Espagne, afin d'essayer de se procurer des vivres de gré ou de force.

Il arriva ainsi à la hauteur du cap Ortigueso, à l'est, duquel se trouvait situé un très gros village, nommé Barios, et où se trouvait une sorte de rade. Ce fut là qu'il se résolut d'aborder. Il découvrit de loin un navire qui tenait la même route que sa frégate, et auquel il donna la chasse le croyant espagnol. Lorsqu'il se fut assez rapproché pour savoir qui il était, il reconnut que c'était sa conserve l'Embuscade, dont il avait été séparé pendant la tempête. Elle s'était, trouvée clans l'obligation de relâcher comme lui, car elle faisait de l'eau à couler bas, ce qui ne l'avait pas empêché d'ailleurs de faire deux prises anglaises, qui étaient mouillées à côté d'elle dans cette même rade et sous son canon.

Cependant le capitaine Coursic était fort pressé de terminer son affaire et le lendemain matin de bonne heure, il envoya faire ses compliments aux alcades de Banios, et demanda qu' il lui fût permis de faire quelques barriques d'eau. Cela fait, il leur promettait « foi de basque », qu'il lèverait l'ancre et se retirerait sans leur faire aucun mal. Les autorités de Barios répondirent avec la plus grande politesse, qu'il n'avait qu'à envoyer ses chaloupes à terre et qu'on leur ferait donner toute l'eau qui serait nécessaire pour l'alimentation de ses équipages.

Coursic se confiant à celle réponse, fit monter un canot par 25 hommes et les envoya à terre avec les barriques vides. Mais en y arrivant, le canot, fut accueilli par une décharge de cinq cents coups de mousquet que les Espagnols lui adressèrent. Ceux-ci étaient rangés en bon ordre derrière des retranchements qui régnaient le long du rivage.

On pense quel fut l'étonnement de Coursic en voyant un accueil semblable, auquel il était si loin de s'attendre. Mais il était un homme trop déterminé pour s'en émouvoir outre mesure. Il se hâta cependant de rappeler son canot par un coup de canon, et fit aussitôt ses préparatifs pour tirer vengeance du manque de foi des Espagnols et de deux de ses matelots basques qui avaient été blessés.

Il envoya emprunter la chaloupe de l'Embuscade, mit 80 hommes seules deux embarcations, s'embarqua avec eux et alla débarquer sous la protection de son canon. Il rangea son monde en bataille sur la plage, et. se dirigea droit au retranchement de l'ennemi avec ordre absolu à se marins basques de ne tirer qu'à bout portant. Il y avait dans le retranchement espagnol, au moins trois cents hommes et une trentaine de cavalleros commandant la milice du pays, qui, au son du tocsin, s'étaient rendus à leurs postes désignés d'avance pour donner les ordres nécessaires à une forte résistance.

Aussitôt qu'il fut arrivé à portée du retranchement., le capitaine Coursic prit toutes ses dispositions en homme de guerre consommé,fit plusieurs détachements pour l'attaquer à droite et à gauche, et après avoir essuyé une décharge générale des Espagnols, comme la fortification qu'il voulait enlever n'était pas dans un état parfait et que les Basques qui composaient sa troupe. « sont naturellement ingambes » il y entra avec ses hommes, tua roide 24 espagnols qui restèrent sur place, en blessa 30,dont le moindre avait un coup de poignard dans le ventre et fit 40 prisonniers. L'assaut, fut vivement poussée

Cependant l'action était Unie, car dit, le duc de Gramont, toute la canaille espagnole et les alfiérez s'étaient retirés sur le sommet, des montagnes, et les troupes de débarquement se chargèrent, de demi- piques, de mousquetons, d'épées et.de rondaclies, en un mot. de toutes les armes qui servaient. « à l'équipement de jacquemart», qui était ordinairement en usage chez les Espagnols.Ils reprirent leurs rangs, et se dirigèrent droit au village afin de s'assurer si les habitants étaient tranquilles.

Ils n'y laissèrent ni un mouton, ni un cochon, ni une poule, ni un meuble dans une seule maison, et pour couronner le tout, le capitaine Coursic se disposait à y faire mettre le feu pour leur faire ses adieux et, leur laisser un souvenir de leur mauvaise foi.

En ce moment, le curé, le crucifix à la main, les femmes éplorées et les enfants criant, le supplièrent à genoux de les préserver de l'incendie, « ce qu'il leur accorda pris de compassion, quoique corsaire. » Il fit un traité avec le curé et. les principaux notables du lieu, dans lequel il était dit que malgré toutes tes défenses du roi d'Espagne, de donner aucune assistance à un Français, chaque fois qu'à cause du mauvais temps où pour toute autre raison, il se trouverait dans la rade de Barios, tout ce qu'il demanderait pour sa subsistance et celle de ses équipages lui serait délivré, ((agréablement ».

Voilà, ajoute le duc de Gramont, quelle fut la fin de la bataille et les formes du traité entre le corsaire et les Espagnols.

Cela fait, le capitaine Coursic regagna son bord avec toutes ses dépouilles et mit aussitôt à la voile avec l’Embuscade, qui avait fait quatre bonnes prises pour le roi. Quant au duc, la campagne avait été pour lui moins fructueuse que les autres, car il n’avait de part qu’aux vieilles selles des caballeros espagnols. Quant aux poules et autres victuailles, elles avaient été digérées depuis longtemps. Cependant le gouverneur de Bayonne disait que l'action était, glorieuse pour Sa Majesté et qu'elle faisait plus d'éclat en Galice que si la citadelle d'Anvers avait été prise. Ce qui lui suffisait.

Les encouragements du noble duc et des gens riches du pays furent si efficaces que les corsaires basques et bayonnais firent rage.

Le grand nombre de frégates qui furent armées pour la course, ruinèrent le commerce des Espagnols. Les deux seuls vaisseaux de guerre qu'ils possédaient sur cette côte furent désarmés, pour qu'on n'eût pas la douleur et l'humiliation de les voir capturer.

Pas un seul bâtiment de Fontarabie, de Saint-Sébastien ou de Bilbao, ne pouvait se risquer hors du port, sans être pris aussitôt. L'audace des corsaires devenait extrême et les vaisseaux anglais et hollandais éprouvaient un pareil sort.

Dans moins de huit mois, les corsaires aidés par les frégates légères du roi, avaient pris 125 vaisseaux marchands et, au moment où le duc de Gramont donnait ces détails à Sa Majesté , il y avait un si grand nombre de navires capturés à Saint-Jean-de-Luz « que l'on passe de la maison où logeait votre Majesté à Ciboure, sur un pont de vaisseaux attachés les uns aux autres ».

L'effroi et le tumulte régnaient dans les provinces espagnoles et le monde y criait misère.

Mais le capitaine Coursic n'était pas au bout de ses exploits, et le 15 février 1692, la Gazette de France enregistrait la curieuse relation suivante :

« Le capitaine Coursic, commandant la Légère, frégate de 24 canons, étant à la hauteur du port de San Antonio, en Biscaye, découvrit deux vaisseaux hollandais qui faisaient route vers Saint-Sébastien, et leur donna la chasse deux jours, et le 16, il aperçut un des deux vaisseaux, qui était de 500 tonneaux, de 36 pièces de canon et de 100 hommes d'équipage.

Le 17, il le rejoignit sur les neuf heures, et après la première décharge, il l'aborda, nonobstant l'inégalité de son vaisseau. Mais il fut repoussé deux fois, et obligé de s'éloigner par le grand feu des ennemis.

En arrivant derrière, il reçut un coup de mousquet à l'épaule, ce qui ne l'empêcha pas de demeurer sur le pont pour encourager ses Basques. Mais au troisième abordage, ils firent de si grands efforts qu'ils se rendirent maîtres du pont. Les Hollandais avaient préparé des coffres à poudre qui enlevèrent deux matelots et s'étaient retranchés dans les chateaux d'arrière et d'avant et entre deux ponts, d'où ils faisaient un feu extraordinaire. Néanmoins, ils y furent forcés et le vaisseau pris après trois quarts d'heure d'un combatsi sanglant que de tout équipage il ne reste que dix-huit hommes, la plupart blessés dangereusemenl. On trouva le capitaine hollandais qui, quoique blessé à mort, s'était traîné jusqu'à Sainte-Barbe pour mettre le feu aux poudres et faire sauter les deux vaisseaux. On l'en empêcha, et il mourut presque aussitôt.

Ce vaisseau était chargé de cordages, de voiles, de mâts, de poudre et de toutes les munitions nécessaires pour un galion neuf, construit au port de Passages, près de Saint-Sébastien, qui servit d'amiral à la flotte d'Espagne. C'est la troisième lois que les agrès de ce galion ont été perdus. Le premier vaisseau qui les apportait fut pris par le sieur du Vigneau. Le second fut coulé à fond par un vaisseau armé de Brest, et enfin ce dernier a été amené au port de Bayonne. Il y a eu 35 basques blessés et cinq tués en cette occasion, qui a duré cinq heures, à la vue de Saint-Sébastien.

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Quelques jours après, notre capitaine se remettait en course. A peine avait-il franchi l'embouchure de l'Adour, qu'un navire de guerre de la marine anglaise, la Princesse, montée par 120 hommes d'équipage et armée de 64 canons, en croisière dans le golfe de Gascogne, l'attaquait sans lui donner le temps de se reconnaître. Malgré son infériorité, Coursic se hâta de riposter ; commencé à huit heures du matin, le combat ne cessa qu'à trois heures de l'après-midi. De la plage du Boucau, une partie de la population bayonnaise avait assisté à cette lutte émouvante, qui devait se terminer par le triomphe du brave commandant de la Légère. Aussi, lorsque celui-ci, après avoir amariné sa prise et viré de bord, fit son entrée dans l'Adour, il fut accueilli par les applaudissements frénétiques de ses compatriotes. Le duc de Gramont, son associé, écrivit aussitôt au ministre pour lui annoncer ce nouveau succès ; son enthousiasme était si grand, sa croyance en Coursic si profonde qu'il suppliait M. de Pontchartrain de l'autoriser à équiper quelques nouveaux corsaires, sous la conduite de Coursic, afin de les envoyer détruire la flotte nouvelle que l'Espagne s'apprêtait à mettre à la mer. Le duc demandait encore que le roi fît délivrer au vaillant capitaine une médaille rappelant la prise de la Princesse (1).

Les deux lettres suivantes adressées par M. de Pontchartrain au gouverneur de Bayonne, achèveront d'édifier nos lecteurs sur l'importance du nouveau service rendu à l'Etat par le brave corsaire.

« A Paris, le 5 mars 1693.

« A M. le Duc de Gramont,

« MONSIEUR,

« La cargaison de la Princesse, prise par le sieur Coursic estant toute composée de munitions destinées aux vaisseaux du Roy, j'éscris au sieur de Laboulaye (1) de la faire passer sous votre bon plaisir àRochefort, où Sa Majesté en fera payer la valeur à qui de droit. Nous avons aussy besoin du bastiment que ie Roy achètera pareillement ou frétera comme vous le jugerez plus à propos ; le bastiment pris et laplupart des munitions de son chargement sont d'une nature à ne pouvoir estre acheptées que par Sa Majesté, et rien ne peut mieux convenirque cela dessus dit.« Je viens de recevoir la lettre que vous m'avez fait l'honneur de m'écrire du 27 du mois passé ; je connois de quelque importance il est de tascher de vous rendre maîtres de la flotte qui doit sortir des ports d'Espagne, et je feray pour cela tout ce qui sera praticable, sans traverserles autres projets de Sa Majesté ; mais nous ne sommes guère enestât de faire des entreprises de ce costé. Cependant, lorsque les vaisseauxde Rochefort sortiront, Sa Majesté pourra leur ordonner d'allerfaire un tour sur la coste d'Espagne avant d'aller à Brest, ainsy je vous supplie de continuer à m'informer de tout ce que vous apprendrez de la navigation des ennemis sur vos costes, affîn que j'accomode à cela celle des vaisseaux de Sa Majesté, autant qu'il se pourra (2). »

La seconde lettre du puissant ministre de Louis XIV, annonçait au gouverneur de Bayonne, la brillante récompense que Sa Majesté venait de délivrer au brave corsaire, en le faisant entrer de plain-pied dans les rangs de la marine royale, qui ne pouvait qu'être honorée par une telle recrue :

« A Versailles, le 22 mars 1692.

« A M. le Duc de Gramont,

« MONSIEUR,

« J'ay rendu compte au Roy de ce que vous m'avez fait l'honneur de m'escrire par votre lettre du 12. Sa Majesté a eu pour agréable d'accorder(1) Commissaire général de la marine du Ponant au département de la Guyenne.(Arch. de Bayonne, CC. 805).(2) Dépêches de la marine de Ponant. Archives de la Marine, B2. — A. 75, f° 446.au sieur Coursic un brevet de capitaine de frégate légère, et je vous l'envoyerais incessamment. Sa Majesté a estimé que cela lui convenoit mieux et hiy feroit plus de plaisir qu'une médaille.« A l'esgard de l'armement eu course dont je vous aye déjà escript, Sa Majesté voudra bien vous y donner intérest aussy bien qu'à M. Plassèque, lorsqu'il conviendra à son service de faire cet armement. Mais elle n'estime pas que ce soit à présent, luy paraissant que l'envie de la course fait fuir son service aux matelots basques ; ainsy Sa Majesté ne veut pas qu'on travaille à la liste des matelots nécessaires pour lesquels elle a fait remettre des fonds, qu'ils ne soient partis pour Rochefort ; elle est persuadée que cet avancement feroit un bon effet, pour son service ; mais elle est encore plus pressée du vaisseau de guerre, qu'elle a fait armer en ce port

« J'ay eu l'honneur de vous escrire que M. de Réols devait aller avec 4 vaisseaux sur les costes d'Espagne et qu'il a voit ordre de suivre ce que vous prescririez (1). »

Investi de ce nouveau grade, le capitaine Coursic sentit son audace grandir, et la campagne suivante devait montrer au roi que la récompense qu'il venait de lui accorder avait été bien placée.

Une nouvelle expédition allait suivre, plus audacieuse encore que les précédentes, mais, pour l'intelligence de notre récit, il convient de revenir quelque peu en arrière. Notre tâche est d'ailleurs rendue facile, car c'est au savant Dr Hamy que l'on doit la découverte et la publication des documents qui jettent clartés sur une campagne que nous n'avons déjà que très sommairement racontée

Aussi est ce à ce travail que nous empruntons l'essentiel de notre étude sur l'un des plus beaux faits d'armes du capitaine Coursic

Depuis 1688, la lutte devenait chaque jour plus violente et plus acharnée entre Louis XIV el les alliés de la ligue d'Augsbourg. Particulièrement après les batailles de Beachen-Head et de la Hougue, on ne s'attachait plus à détruire seulement la flotte de guerre des ennemis, mais on s'efforçait encore de ruiner leur commerce, « en brûlant et anéantissant les navires marchands, en bombardant les ports ouverts, etc., afin d'atteindre dans leurs sources les plus profondes la fortune publique et privée. Dès lors plus cle batailles rangées, la course en escadre ou par navire isolé. Tourville à Lagos ; Jean Bart un peu partout, dans la Manche et ailleurs; et, d'autre part, les attaques anglaises de Saint-Malo, du Camaret, de Dunkerque et l'affreux bombardement de Dunkerque (1).

En même temps, la France songeait à renouveler les attaquesd de la baleine si fructueusement exercée par cette nation.

Personne n'ignorait en France l'importance cle ces produits qui enrichissaient le commerce des ennemis. En 1636, il y avait déjà seize vaisseaux baleiniers hollandais et les profits annuels étaient évalués à environ 800.000 livres. En France, on avait pensé à diverses reprises à prendre part à ces bénéfices, en créant une Compagnie de pêche.

Ce fut en 1621, que la « Royale et Générale Compagnie de commerce pour les voyages de long cours et Indes orientales » avait été fondée, par François du Nerps, sieur de Saint-Martin. Elle devait aussi entreprendre la pêche des baleines. En 1632, une autre Compagnie destinée à exploiter seulement cette pêche, fut aussi formée par l'association de quelques marins basques et de quelques marchands cle Rouen. Elle arma quelques navires qui furent placés sous le commandement du capitaine basque Joanis Vrolicq, qui toutefois ne put réussir au Spitzberg contre les Hollandais. Une nouvelle Compagnie se forma plus riche et plus puissante encore que la précédente, mais sans plus de succès. Vingt-cinq grands navires furent armés en guerre, et la Compagnie dite du Nord exploita son privilège. Mais le succès dut être peu profitable, car à partir de 1671, il n'est plus fait que de vagues mentions de la présence de bâtiments français dans les eaux de la mer Glaciale.

« Les Hollandais y sont demeurés seuls, et lorsque Panetié, achevant sa croisière cle '1674, pousse jusqu'au 77° degré, il ne rencontre devant lui que le pavillon des Etats.

« Avec ses trois frégates, le marin boulonnais se rend maître de dix navires de Hollande, en charge deux avec le contenu des autres, « qui était lard des baleines et quelques fanons », en brûle sept et fait servir le dernier à « reporter les équipages clans leur pays ».

Nous allons voir maintenant quel fut le résultat de la campagne de 1693, à laquelle le capitaine Coursic devait prendre une part si active et quoique le chef de la petite escadre fût notoirement insuffisant.

« Comme on n'avait pas sous la main d'officiers supérieurs connaissant les mers polaires, on dut se contenter de donner le commandement à l'un des capitaines de vaisseau attachés pour l'instant au port cle Bayonne, le seul du littoral où l'on put réunir aisément un équipage expérimenté. Ce fut M. de la Varenne, nommé capitaine du Pélican, depuis le 28 janvier 1693, mais on adjoignit à ce chef improvisé tout un corps d'officiers basques, parmi lesquels brillait au premier rang Johannis de Suhigaraychipi », plus connu sous le nom de Croisic ou de Coursic, et qui devait commander la frégate légère l'Aigle. Le commandant du Favory était Louis de Harismendy, de Bidart, qui avait le même grade que Coursic (1). Il avait Larréguy comme capitaine en second; Etchebehere enseigne, et un certain nombre d'officiers mariniers, également basques, qui allaient prêter un précieux concours à l'expédition.

Le commandant La Varenne, qui était rentré à Bayonne avec le Bizarre, met ce bâtiment en état d'aller à l'île d'Aix, et recrute sur place 250 hommes d'équipage: On lui envoie cle Rochefort un certain nombre d'officiers mariniers et un peu plus tard les soldats qui devaient compléter son équipage. Il y eut de longs retards causés par la lenteur de l'armement, et un peu plus tard, par l'échouage et la sortie du port du Pélican (2). Enfin, il alla rejoindre dans la rade de Saint-Jean-de-Luz l'Aigle et le Favory, auxquels s'était joint le Prudent cle Saint-Malo, commandé par Jacques Gouin de Beaucherie, qui devait plus tard s'illustrer dans la mer du Sud.

Voici donc la petite escadre rassemblée et prête à prendre la mer pour une expédition aussi longue que dangereuse. Examinons maintenant ce qu'étaient ces frégates légères qui furent, pendant le règne de Louis XIV, la terreur du commerce ennemi. Rien ne nous est resté sur cet armement fait à Bayonne en 1693, et les comptes établis ont disparu probablement à tout jamais. Les frégates légères étaient des navires de 100 à 300 tonneaux, celles qui nous occupent devaient être de ce dernier tonnage. En 1680, d'après Dostériac, la frégate légère de 200 tonneaux avait 84 pieds de quille (27m28), 95 pieds de longueur totale (30m85), 24 pieds de largeur au maître ban (7m 79}, 10 pieds (3m24) cle creux. Les frégates légères de Coursic et de ses compagnons étaient de 26 canons, et devaient avoir de 220 à 250 hommes d'équipage.

Tout était prêt, les équipages au complet, les vivres faits, et le chef de l'expédition avait reçu un ordre du roi. L'instruction très détaillée qui était datée du Quesnoy, le 2 juin 1693, était adressée au sieur de la Varenne, commandant le vaisseau du Roi le Pélican. Il y était dit, que Sa Majesté ayant résolu de détruire les vaisseaux ennemis qui faisaient la pèche de la baleine en Groenland, elle avait, fait choix du sieur de la Varenne pour le commandement de cette expédition. Le roi était persuadé qu'il s'en acquitterait avec entière satisfaction, mais on verra plus loin qu'on aurait pu faire un meilleur choix. Le sieur de la Boulaye, intendant de la marine à Bayonne, devait lui donner les pilotes pratiques des mers dans lesquelles il devait opérer, ainsi que les officiers mariniers qui connaissaient les ennemis du roi qui faisaient ordinairement la pèche.

L'intendant de la marine à Bayonne avait écrit, qu'il y avait dans ce port un vaisseau de Saint-Malo, armé en course et monté de 50 pièces de canons, qui pouvait être employé à cette expédition. Sa Majesté était persuadée, qu'avec ce navire, le Pélican, monté par le sieur de la Varenne et les frégates l'Aigle et le Favory il devait être à même d'exécuter celte entreprise avec succès. Cependant on lui permettait de mener avec lui d'autres corsaires de Bayonne et de Saint-Jean-de-Luz, s'ils voulaient, se joindre à l'expédition (1).

L'intention du roi était que la petite escadre se mît en route le 20 juin 1093 au plus lard, et qu'elle se dirigeât directement, vers les endroits où les pilotes que le sieur de la Boulaye devait lui donner lui indiqueraient où se faisait cette pèche.


Le commandant devait prendre ses mesures pour que la nouvelle de son arrivée dans ces parages ne donnât pas le temps à aucun de ces vaisseaux de s'enfuir, et pour cela il devait faire garder les passages par quelques-uns des vaisseaux qu'il commandait et exécuter l'expédition avec les autres.

Il était en outre averti que celle pêche était faite par les Anglais, les Hollandais et les Hambourgeois, et que la plupart de ces derniers et une partie des Hollandais avaient arboré le pavillon de Danemark.

Le roi lui ordonnait de brûler ou de couler à fond sans quartier, tous ceux qui auraient le pavillon anglais, hollandais ou Hambourgeois. Quant à ceux qui se couvriraient de la bannière danoise, le commandant devait examiner s'ils étaient effectivement danois ou bien s'ils étaient masqués. Il devait laisser continuer la pêche à ceux qui appartiendraient à cette dernière nation, et même leur fournir tous les secours qui dépendraient de lui. Quant à ceux qui lui paraîtraient suspects et que les Basques reconnaîtraient pour Hambourgeois et hollandais, il devait les amariner, faire achever leur cargaison avec celles du vaisseau qu'il aurait brûlé ou coulé à fond si cela se pouvait sans trop de retard et de difficulté, et les envoyer en France sous l'escorte de deux des bâtiments de son escadre, avec ordre à celui qui commanderait de venir atterrir au cap Finistère, pour y savoir des nouvelles de la flotte ennemie et pouvoir l'éviter. Il devait faire mettre sur ces vaisseaux les équipages de ceux qui auraient été brûlés ou coulés à fond, mais dans le cas où il aurait eu trop de monde, le roi lui permettait de conserver quatre ou cinq vaisseaux, d'y faire embarquer les équipages et de les renvoyer clans leur pays, mais après leur avoir enlevé les marchandises et les engins de pêche, et les avoir gardés jusqu'après le départ des vaisseaux qu'il devait expédier pour la France.

Après avoir expédié ce convoi, il devait, avec les vaisseaux qui lui resteraient, aller croiser vers les Orcades, où il trouverait quatre vaisseaux cle Saint-Malo, auxquels il devait se joindre et croiser avec eux dans ces parages, tant que les vivres qu'il aurait pourraient le lui permettre.

Si ces vaisseaux faisaient quelques prises considérables, il devait les faire amariner et les expédier ainsi que cela lui avait été déjà expliqué, c'est-à-dire en ne manquant pas de reconnaître le cap Finistère ; quant aux prises qui seraient de peu de valeur, il devait les faire brûler ou couler à fond et en faire mettre les équipages à terre, soit aux Orcades, soit sur les côtes d'Ecosse.

Comme le roi pouvait avoir de nouveaux ordres à donner à M. de la Varenne pendant cette croisière, il voulait qu'il envoyât de temps à autre une frégate aux iles Feroë qui reconnaissent le roi du Danemark et où on pourrait lui envoyer des ordres, et comme, dans ce cas, il pourrait avoir besoin des corsaires de Saint-Malo, dont il était question, on lui envoyait un ordre du Roi, pour les obliger à le suivre.

S'il ne recevait pas d'ordres nouveaux, et lorsqu'il ne resterait plus de vivres que pour revenir en France, il devait quitter sa croisière pour se rendre à Bayonne, mais il devait faire en sorte de ne partir qu'en même temps que les corsaires cle Saint-Malo.

Il devait suivre le plus possible la route des vaisseaux de Hollandelors qu'ils reviennent des Indes, dans le cas où ils ne seraient pas encore passés. S'il venait à les rencontrer, le Roi s'en rapporterait à lui pour la manière de les combattre, mais en tout cas il voulait qu'ils fussent attaqués. S'il était assez heureux pour en prendre quelques-uns, il devait les amener en France en prenant les précautions qui avaient été déjà indiquées.

En attendant le jour indiqué pour son expédition du Groenland, le Roi voulait qu'il allât croiser sur les côtes d'Espagne, pour tâcher d'enlever quelques-uns des vaisseaux anglais et hollandais qui y étaient attendus,

Sa Majesté donnait ordre en même temps au duc de Gramont de lui faire part des avis qu'il pourrait avoir pour l'arrivée de ces vaisseaux, et qu'il eût à se conformer à ce que le gouverneur de Bayonne lui dirait à ce sujet.

Armé d'instructions aussi explicites, M. de la Varenne sortit de la rade de Saint-Jean-de-Luz le 30 juin au matin. Nous avons vu que la petite escadre se composait du Pélican, monté par le commandant de l'expédition, l'Aigle, par le capitaine Croisic, le Favory, par le capitaine de Harismendy, et le Prudent, corsaire de Saint-Malo, commandé par le sieur de Beauchesne.

Ce même jour et se trouvant à environ deux lieues en mer, les trois capitaines se rendirent à bord du commandant en chef. M. de la Varenne leur donna à chacun une lettre du duc de Gramont, par laquelle il leur donnait ordre d'obéir au commandant pendant cette expédition, ainsi que cela lui avait été ordonné par le Roi. De plus, il ordonnait aux deux capitaines de lui donner deux pilotes chacun, qui fussent au courant de la pêche de la baleine, ainsi que le sieur de Larreguy, capitaine en second à bord du Favory, ce qui fut aussitôt exécuté (1).

Le temps ne fut guère favorable car les vents contrarièrent la marche de la petite escadre ; le 5 juillet, c'est-à-dire au bout de six jours, elle était encore en vue de Santona à l'est de Santander, où ils aperçurent trois vaisseaux tenant la route du Nord. A midi, le vent ayant porté au Nord-Est, les frégates continuèrent leur route. Dans la même journée, le commandant de la Varenne communiqua à ses capitaines les ordres du Roi, et une instruction de M. de Gramont, relativement à l'expédition.

Le 20 juillet, l'escadre était parvenue au 63° parallèle, et ce même jour, vers neuf heures du matin, le capitaine Croisic se rendit à bord du commandant, pour lui représenter l'importance qu'il y avait à ne pas perdre un moment pour tâcher de se rendre au plus tôt au lieu de destination. Cette démarche obligea le sieur de la Varenne à faire arborer le pavillon du conseil, auquel obéirent aussitôt les capitaines de Harismendy et de Beauchesne. Le commandant demanda aux officiers réunis si l'on trouvait à propos de continuer la route pour le Spitzberg, quoi qu'il croyait que le temps était déjà bien avancé pour pouvoir réussir. Ainsi se manifestait chez M. de la Varenne, cet esprit d'indécision qui faillit compromettre gravement le succès de l'expédition. Il ajouta qu'il vaudrait peut-être mieux se rendre vers les îles Feroë ou les Orcades, pour y croiser, ce qui, comme on l'a vu, n'était que la deuxième partie du programme dicté par le Roi. Toutefois, ne voulant rien ordonner sans avoir l'avis de ses capitaines, ceux-ci conférèrent entre eux et avec le capitaine Larréguy, ils décidèrent qu'il fallait poursuivre leur route pour le Spitzberg, car le vent était favorable, et on pouvait encore y arriver assez à temps pour nuire aux ennemis, se conformant ainsi aux ordres du Roi. Le commandant se rangea à cet avis. Le procès-verbal de cette décision fut aussitôt rédigé et signé par M. delà Varenne et ses officiers commandants.

'On suivit donc la même route, jusqu'au 28 au matin, où l'escadre eut connaissance de la terre de Spitzberg. Le 29, on aperçut un navire venant des glaces, et l'ayant chassé, le Prudent qui le joignit le premier, s'assura que c'était un Danois n'ayant capturé aucune baleine et qui se retirait dans quelque baie. L'escadre le retint avec elle de crainte qu'il n'allât donner l'alarme, et s'étant approchée de la terre en la côtoyant un peu, on aperçut deux navires à l'ancre dans la baie de la Madeleine où les opérations militaires durent commencer aussitôt. C'étaient encore des navires Danois qu'on fit appareiller et qui suivirent l'escadre.

Mais il en fui empêché par le calme et aussitôt après par le vent contraire qui survint et qui favorisait les vaisseaux qui étaient dans la baie du Nord. Il en sortit en effet trois à la vue des Français, car ils avaient reçu de la baie du Sud, l'avis de l'arrivée des frégates ; il n'y avait par terre qu'une demi-heure de chemin de l'une à l'autre baie.

La fuite de ces trois vaisseaux fit craindre aux Français qu'ils n'avertissent de leur présence tous ceux qu'ils pourraient rencontrer, et par conséquent créer un grand obstacle pour la réussite de l'expédition.

Le même jour, dans la soirée, les trois navires étant encore en vue, l'ardent Croisic qui revenait de la baie du Sud, où il avait bien fait son devoir, rejoignit le Favory. Le commandant et le Prudent restèrent dans la baie, avec quatre navires hollandais et les Danois ; il y avait encore dans cette baie quatre .autres navires, parmi lesquels s'en trouvaient deux hollandais qui s'enfuirent par un passage inconnu au commandant. Aussitôt que M. de la Varenne en eut avis, il envoya sa grande chaloupe commandée par un lieutenant, mais celui-ci fut obligé de revenir ayant trouvé une résistance supérieure à ses forces.

Le 30 ,1e Favory prit une pinasse hollandaise neuve, avec 10 pièces de canon, mais n'ayant aucune baleine, elle même jour, la frégate l'Aigle, forma sa sortie après avoir pris une flûte hollandaise. Le 31, le Favory capturait encore deux flûtes hollandaises et une danoise et, escorté par ces prises, il se rendit vers minuit à la baie du Sud où se trouvaille commandant. Ici, le rédacteur de notre relation nous apprend que : « Il est à remarquer que dans la saison que nous avons été en Groenland, le soleil y éclaire aussy bien la nuit que le jour, jusqu'à la tin d'août, sans quoy ces endroits seroient. impraticables tant à cause des glaces que. de la rigueur du climat. »

Le ler août,

l'Aigle arriva de la baie du Sud à trois heures du matin, avec deux flûtes hollandaises qu'il avait prises parmi les glaces et en brûla une troisième. Il avait vu environ 30 navires de la même nation. 11 se rendit à bord du vaisseau du commandant avec le capitaine de Harismendy et lui lit la relation de ce qu'il avait découvert. Il l'assura que ces navires ne pourraient demeurer longtemps au même endroit, à cause du danger qu'ils couraient en étant pris par les glaces, ainsi que cela leur était arrivé plusieurs fois. Ainsi, il regardait comme infaillible la capture de la plupart de ces navires, soit en les attendant le long des glaces, soit en pénétrant dans la baie si on en trouvait quelque occasion favorable.

. M. de la Varenne répondit qu'il louait fort son zèle et qu'il consentait que Croisic fît cette expédition avec le Favory et l'Aigle et que lorsque le Prudent, qui en ce moment était en mer, serait de retour, il l'enverrait pour le rejoindre. Quant à lui, il allait rester dans la petite baie pour garder les vaisseaux hollandais et danois qui avaient été pris. Il ne manqua pas cependant de recommander au capitaine Croisic. de revenir le plus tôt possible, car il avait le dessein de repartir immédiatement.

Aussitôt el sans perdre un moment, l'Aigle et le Favory appareillèrent et firent route vers le Nord. Mais le calme et un vent faible les empêchèrent de rien découvrir jusqu'au i"' août. Enfin, ils rencontrèrent la banquise, ayant environ deux lieues en latitude, et s'étendan à perte de vue. Ayant remarqué quelques ouvertures, les frégates se disposèrent à les traverser et s'y engagèrent résolument. Ils aperçurent aussitôt quelques vaisseaux et. la mer libre, et le 3 août, ils se trouvèrent à l'entrée de la baie aux Ours, où ils virent neuf vaisseaux mouillés près de la terre. Les capitaines Croisic el de Harismendy, après avoir tenu conseil, se résolurent à les attaquer, malgré les difficultés qu'ils éprouvèrent, de la part de quelques glaces. Mais après une heure de marche, ils furent contraints de mettre au plus près du vent une petite voilure afin d'éviter les glaces. Une de ces brumes si fréquentes clans ces parages s'étant élevée, les incommoda beaucoup.

Le 6 août vers minuit, le temps devint clair, on ne vit. plus que trois vaisseaux qui étaient à l'embouchure de Beerbay, ou baie aux Ours, là où le jour auparavant on en avait vu neuf. Ils virent en. même temps quatre autres vaisseaux entrant dans cette même baie, et les Français pensèrent aussitôt; qu'on y trouverait les ennemis en très grand nombre. On considéra cette occasion comme très favorable à un bon coup de main, et les frégates se mirent aussitôt en route. Le calme qui survint encore, obligea chaque frégate d'armer quatre chaloupes pour chacune d'elles, car ils avaient eu soin de s'en pourvoir en les empruntant aux vaisseaux déjà capturés. Ils s'approchèrent de la baie la sonde à la main, et trouvèrent à son embouchure une langue de terre surmontée d'une petite hauteur, sur laquelle avait été arboré le pavillon hollandais au- dessus d'un retranchement anné de canons.

Les équipages ne doutèrent pas que cette précaution prise par les ennemis ne fût pour eux de quelque embarras, mais cela n'arrêta en rien leur détermination, et. ils continuèrent à s'approcher de l'entrée de la baie. Lorsqu'ils parvinrent devant la batterie, ils furent salués de quelques coups de canon qui ne leur firent aucun mal, et de ce point, ils découvrirent le fond de la baie, où se trouvaient rangés quarante navires hollandais parmi lesqu'els on distinguait les pavillons d'amiral , vice-amiral et contre-amiral, qu'ils avaient sans doute choisi pour cette occasion. Tous les vaisseaux étaient rangés en bon ordre par la bataille, et leur ligne affectait la forme d'un croissant. Cependant les frégates françaises, toujours remorquées , s'approchèrent des ennemis à demi-portée d'un canon de trois tirs de balles, ce qui fut tout ce qu'elles purent faire à cause du calme du courant. Elles mouillèrent sur une ancre et présentèrent le travers moyen de croupières. En ce moment les ennemis poussèrent le cri de Vive le Roi, suivi cle beaucoup de « hurlements ».que les Français ne purent comprendre. Cependant les frégates étaient en ordre, et les équipages, impatients de commencer le feu, témoignaient assez par la joie générale qu'on allait remporter une victoire complète. « Le nombre des vaisseaux ennemis les ayant plus tot animes et causé la moindre appréhension, comme ils ont fait connaissance pendant le plus grand feu et jusqu'au combat fini. »

Tout étant ainsi disposé, le capitaine Croisic envoya une chaloupe à bord du Favory, afin que le capitaine cle Harismendy se rendîtà bord . Croisic lui proposa d'envoyer une chaloupe aux Hollandais pour les inviter à se rendre. Ce projet ayant été adopté, une embarcation de Aigle fut aussitôt équipée ; elle arbora le pavillon blanc et fut commandée par d'Etchebéhère, un des enseignes de l'Aigle, qui parlait bien la ciguë hollandaise. Les conditions étaient, conformément aux ordres , qu'on leur fournirait les vaisseaux et les vivres nécessaires pour venir en Hollande ; et qu'à faute par eux d'accepter ces propositions ils devait s'en remettre à la force des armes.

La chaloupe partit au même moment et comme elle s'approchait du vaisseau faisant la fonction d'amiral, la chaloupe des Hollandais, escortée cle plusieurs autres, vint au-devant des Français, et après que les capitaines hollandais eurent entendu la sommation faite par l'enseigne, répondirent seulement qu'ils étaient surpris de la témérité des Français puisqu'ils se disposaient à les attaquer lorsqu'ils étaient en si grand nombre et surtout dans un endroit aussi dangereux. Qu'ils ne le connaissent sans doute pas, puisqu'ils s'y exposaient, qu'eux-mêmes ne s'étaien réfugiés que clans la dernière extrémité et afin d'y rassembler toutes leurs forces, et le considérant en quelque sorte comme impraticable à ceux qui n'en avaient pas une connaissance parfaite. Puis ajoutèrent que les Français les prenaient sans doute pour les plus grands coquins du monde de les sommer de se rendre « à deux moyennes frégates , qu'ils en étaient bien éloignés et qu'ils n'avaient qu'à faire tous leurs efforts, que pour eux ils s'acquitteraient de leur devoir. Telle fut leur réponse.Puis, comme la chaloupe française revenait et se trouvait à moitié du trajet à parcourir, les Hollandais tirèrent plusieurs coups de canon, tant sur les frégates que sur la chaloupe, qui fut atteinte, mais sans avoir eu personne cle blessé. Un autre coup aussi heureux atteignit la chaloupe du capitaine de Harismendy comme il revenait sur son bord, ayant attendu sur l'Aigle, la réponse des Hollandais.

Le 6 août 1693, entre 8 et 9 heures du matin, le combat commença de la manière la plus acharnée. La grande canonnade des vaisseaux hollandais dura jusqu'à une heure cle l'après-midi, et celle des français y .répondit sans cesse, et se continua même après que celle des'ennemis se fut éteinte. D'ailleurs les Hollandais étaient très nombreux el. la plupart, de leurs navires étaient armés de 10, 12, 14 et même 20 canons. Ils avaient environ 45 hommes par navire, tous bons matelots, aussi leur artillerie était-elle bien servie, et la canonnade était aussi nourrie qu'une mousqueterie. Du côté des Français le feu était tout aussi pressé, et, il faut le dire, beaucoup mieux ajusté. Chaque frégate tira au moins 1600 coups, et si la mer n' « eut esté tant soit peu agitée, au lieu qu'elle estoit aussy tranquille que clans une fontaine » la plupart des vaisseaux auraient coulé à fond. Il n'était pasdouteux cependant, que quelquesuns d ' e n t re eux n'aient eu ce sort pour peu qu'ils aient trouvé la mer agitée.

Après cinq heures de ce rude combat, les ennemis ralentirent insensiblement leur feu tandis que les frégates continuaient avec la même vigueur, ce qui leur faisait espérer de voir les Hollandais arborer le pavillon blanc, pour demander quartier, car ils ne tiraient plus qu'à intervalles fort éloignés. Mais pendant ce temps, les Français aperçurent divers vaisseaux ennemis qui, ayant coupé leurs câbles, se faisaient remorquer par des chaloupes. Chacun d'entre eux en avait au moins six, et ils faisaient tout leur possible pour sortir de la baie à la faveur de ces embarcations et du courant. Il ne restait plus qu'une seule chaloupe à chaque frégate, les autres ayant été coulées pendant le combat, et on ne put faire autre chose que de faire porter des ancres à louer sur le passage, pour se haler dessus, et s'approcher, ce qui fut fait avec toute la diligence possible. Pour ne point perdre de temps, on coupa les câbles, mais ils ne réussirent pas entièrement, et ils ne purent réussir à se saisir que de seize vaisseaux, les autres remorqués par leurs chaloupes échappèrent par la fuite; parmi les navires capturés, et qui d'ailleurs étaient très maltraités, deux furent brûlés dans la baie, comme ne pouvant plus naviguer.

Les vaisseaux attaqués par les deux frégates avaient au moins entre tous 300 canons et 1500 hommes. Cependant il s'en serait échappé bien peu sans le secours de leurs chaloupes et le temps qui les favorisa. Et, . l'auteur de la relation, s'il y avait eu une troisième frégate, pour super plus d'espace dans la baie, qui était très large, non seulement perte des vaisseaux ennemis était infaillible, mais encore ils ne se -aient pas mis en défense. D'ailleurs ce qui les avait excité à faire une forte résistance, c'était la croyance que les. frégates françaises n'étaient que de 24 pièces de canon, et qu'elles seraient faciles à réduire. Si au contraire le commandant la Varenne ou le capitaine Beauchesne s'étaient nivés là, il n'en aurait pas coûté un coup de canon, ce fut du moins ce l'assurèrent les capitaines des navires hollandais capturés. Pendant ce combat, l'Aigle et le Favory avaient reçu de nombreux coups de canon, tant dans la coque des frégates que dans la mâture et gréement. L'Aigle avait été obligé de changer son mât de misaine et jumeler ses basses vergues. Le Favory avait eu un mât de hune et sa rague d'artimon rompus, un canon crevé et deux de démontés. Cependant, il était étonnant qu'il n'y eût pas eu plus d'avaries au cours d'un combat si long et si acharné.

Le monde qui fut perdu par l'Aigle dans cette occasion resta ignoré. Favory eut deux hommes tués, parmi lesquels se trouvait le sieur de Larreguy, capitaine en second cle cette frégate, qui avait été embarqué sur le Pélican par ordre du duc de Gramont.

Le capitaine Larreguy avait prié le commandant de la Varenne de lui permettre de s'embarquer sur le Favory pour aller à cette expédition, et il ne croyait pas être nécessaire dans la baie du Sud. Il mourut glorieusement d'un coup de canon à la cuisse après avoir donné de grandes marques de sa valeur et de son expérience. La frégate le Favory eut encore plusieurs blessés, « desquels il en restera d'estropiés. » Le dommage reçu par les Hollandais avait été très grand, car en outre es navires capturés, la pêche avait été interrompue, et ils n'avaient pu prendre de baleines dans cet endroit où elles étaient en grand nombre, le jour même où ils furent aperçus par les frégates françaises, ils avaient toutes leurs chaloupes à la mer. On avait même trouvé dans cette même baie, 5 grosses baleines de (30 à 70 pieds que les Hollandais n'avaient pas encore eu le temps de dépecer. Quand aux vaisseaux pris,il en avaient presque tous en pièces dans les entreponts et à fond de cale, qui avaient été récemment tuées, et dont une bonne partie était détruite par la corruption.

D'ailleurs cette année, la pêche n'a vait guère été heureuse. Les Hollandais aussi bien que les Danois, avaient quitté les grandes glaces sans avoir presque pris de baleines, et il n'y avait eu qu'une pinasse hollandaise qui eut le bonheur d'en prendre douze et était partie pour la Hollande avant l'arrivée des Français. Selon les rapports des capitaines, les Hollandais avaient perdlu clans les glaces 8 vaisseaux et les Danois 11. Les uns et. les autres se plaignaient de la rareté des baleines dans les glaces, ce qui les avait obligés de se rendre dans la baie de Beerbay, où l'expérience leur apprit que la pêche était quelquefois très fructueuse pendant l'arrière-saison. Ils ne se seraient pas trompés cette même année sans l'interruption qui avait été causée par l'arrivée des Français. Il y avait même un vaisseau qui étant, revenu des glaces sans aucune baleine, avait terminé entièrement sa cargaison. Aussi pouvait-on considérer cette perte comme beaucuup plus grande que celles des vaisseaux qui avaient été pris.

« Le dit Beerbay, dit 1' enseigne Etchebéhère, qui, nous l'avons vu, est. l'auteur supposé de cette intéressante relation, est un endroit très dangereux. puisqu'il y a des années qu'on ne peut en approcher à cause des continuelles glaces en empêchent l'accès,, et si parfois elles donnent quelque intervalle pour y entrer, les vaisseaux qui y vont sont souvent surpris par lesdites glaces sans pouvoir en sortir, comme il advint mi l'année 1683, que 13 vaisseaux hollandais y restèrent entièrement, les équipages desquels eurent le bonheur de se sauver ayant laissé des chaloupes par dessus les dites glaces pour aller dans d'autres baies plus au sud dans lesquelles ils rencontrèrent des vaisseaux pour passer en Hollande. »

 L'enseigne ajoutait, que l'Aigle et le Favory étaient les premiers vaisseaux français qui fussent entrés dans cette baie, car même les vaisseaux basques qui avaient autrefois fait le voyage du Groenland, n'y avaient jamais été, et seulement les Hollandais s'y rendaient pour compléter leur pêche quand elle n'avait pas été fructueuse dans les parages acoutumés. Encore, le lieu était-il très dangereux, et les frégates françaises purent voir à deux portées cle canon les glaces qui se rapprochaient avec une grande vitesse et si le vent eût soufflé du Nord ou du Nord-Est, elles eussent été probablement enfermées, aussi bien que leurs ennemis. Mais heureusement, le peu cle vent qu'il y eut le soir après le combat, venait du Sud, ce qui éloigna les glaces et favorisa la sortie du lendemain.

Les Français ne restèrent dans cette baie que le moins qu'il leur fut possible, craignant d'y être enfermés et. ayant les glaces toujours en vue. Les Hollandais mêmes leur faisaient voir par leurs craintes qu'il n'y avait pas un moment à perdre. Aussi les frégates quittèrent-elles ces parages le 7 au soir avec onze navires, et elles arrivèrent le 10 dans la baie du Sud. Le 9, elles avaient rencontré M. de Beauchesne qui avait pris le même jour cleux flûtes hollandaises, l'une de 16 pièces cle canon et l'autre de 14 avec lesquelles il entra dans cette baie.

Ils y trouvèrent le commandant de l'expédition. M. de la Varenne, , pendant son séjour dans la baie du Sud, avait pris deux navires Hollandais qui se trouvaient en vue. Le 12, le commandant appareilla vers les Orcades, avec le Pélican et le prudent, y laissa l'Aigle et le Favory, avec ordre au capitaine Croisic d'expédier les flutes qui avaient été prises et de brûler les autres, ce qui fut immédiatement exécuté

Le 14, Y Aigle et le Favory, escortant il vaisseaux hollandais appareillèrent, et n'étant qu'à peu de distance de la baie du Sud, il survint une pluie tellement épaisse qu'il fut impossible de s'entrevoir, ce qui obligea le capitaine Croisic de mettre en panne ainsi que le Favory, et de ne point trop s'écarter des flûtes, et on tira des coups de canon a intervalle pour faire savoir où se trouvaient les frégates, afin de s' approcher. On resta 8 heures environ dans le même état, et une petite éclaircie étant survenue, on n'aperçut plus que cinq des navires,comme le vent était devenu favorable pour la route, et jugeant que trois autres avaient plus avant, et qu'on les retrouvait bientôt il fit partir le matin du 15

jusqu'à midi, mettant de temps en temps en panne car le temps n'était pas très clair, et tirant encore le canon de temps à autre. Dans la soirée du même jour, le temps étant devenu assez air, on n'aperçut encore aucun des navires, ce qui força le capitaineCroisic s'écarter et à forcer de voile de côté et d'autre pour tacher de s découvrir, mais en vain.

11 revint donc sur ses pas pour rejoindre l'autre frégate, et continua m voyage vers Bayonne en escortant, les cinq vaisseaux qui restaient, mformément à l'ordre écrit que lui avait donné M. de Varenne et qu'il jmmuniqua au capitaine de Harismendy. Aussitôt après Croisic conti- ua sa route pour aller aux Orcades ou aux Féroé, où il devait se joindre j commandant La Varenne ainsi que celui-ci lui en avait donné l'ordre vant son départ.

Malgré tout dans cette expédition des frégates françaises, les ennemis avaient perdu 28 vaisseaux en y comprenant les quatre qui furent, rencontrés dans la baie du Sud. il seulement furent conservés pour lâcher de les ramener en France. Les autres furent incendiés soit peu dant le séjour de M. de la Varenne dans la baie du Sud, soit après son départ, et par l'ordre du capitaine Croisic.

Ce dernier, par son courage, son énergie et son audace, avait été le véritable auteur des dommages soufferts par les ennemis dans la baie de Beerbay, ainsi que de la perte éprouvée par leur pêche dans ces quartiers. En effet, quoiqu'il eût été parfaitement secondé par le Favory et par son ami le capitaine de Harismendy, il est évident que l'expédition n'aurait pas été entreprise, si par sa vigilance Croisic n'eût découvert les ennemis, et qu'en ayant fait le rapport au commandant, il ne lui fil comprendre en même temps l'importance d'aller les attaquer si l'on trouvait une occasion favorable. On a vu comment l'Aigle et le Favory, partant pour cette dangereuse expédition, parvinrent jusqu'au 81° degré et demi de latitude, « endroit rarement fréquenté, » dit l'auteur de cette relation, et quelle réussite couronna leur audace et leur bravoure.

Le retour en France fut aussi heureux que rapide. Le Favory arrivait le premier entre Biarritz et Capbreton, avec les cinq flûtes qu'il escortait, et l'intendant de marine La Boulaye s'empressait de le faire rentrer à Bayonne, pour le remettre aussitôt en état de reprendre la mer. L'Aigle le suivait de près, et le 21 du même mois, il ne manquait plus qu'un seul des bâtiments capturés qui arrivait bientôt sous la conduite de Hacquette.

M. de la Varenne qui avait été retardé par des ordres qu'il avait reçus pendant sa route, mouillait clans la rade de Belle-Isle dans les premiers jours du mois d'octobre. Il fut blâmé pour son inertie. Par une lettre datée de Versailles le 16 septembre, il lui était vivement reproché de n'avoir pas fait plus de mal aux ennemis, ce qui n'eût pas manqué d'arriver, s'il s'était trouvé avec l'Aigle et le Favory, lorsqu'ils rencontrèrent les 44 bâtiments qu'ils avaient combattus. Cependanton lui donnait l'ordre d'aller croiser avec son escadre le long des côtes d'Espagne. En même temps Croisic recevait une lettre cle félicitations pour le courage qu'il avait déployé. Le 6 octobre, M. de la Varenne remettait par ordre le commandement duPélican au capitaine de frégate du Vigneau, qui en prit le commandement avec les trois enseignes, le sieur de Neuilles, le sieur cle la Frégonnière, le sieur de Goureul et le capitaine cle flûte de Lescolle.

Le plan de l'expédition avait été remis au duc de Gramont qui le fit passer sous les yeux du roi. « Sa Majesté, écrivait le m i n i s t r e de la marine au gouverneur de Bayonne, Sa Majesté a vu avec plaisir le plan que vous lui avez envoyé de la baye ou le sieur Croisic et Harismendy ont attaqué les pêcheurs hollandais. Sa Majesté a été très satisfaite de ce que ces deux officiers et leurs équipages ont fait en cette occasion et vous pouvez les assurer qu'Elle se souviendra quand il y aura lieu de leur faire plaisir. » Croisic et Harismendy reprirent bientôt la mer pour proléger le retour des terreneuviers français et essayer cle capturer ceux des anglais. La carrière du marin bayonnais qui s'annonçait si brillante, fut brusquement interrompue. L'année suivante il fut tué à Terre-Neuve, et son corps fut enseveli dans le cimetière cle Plaisance, où une pierre tombale rappelle encore aujourd'hui son nom et la date de sa mort E . DUCÉRÉ.

Bayonne, le 17 décembre 1907,

Mort de Coursic. — Terre-Neuve était la porte d'entrée du Canada, la base de nos chasseurs de baleine et de nos pêcheurs de morue. Aussi Canadiens, Basques, Malouins s'employèrent-ils à en déloger l'adversaire. Malheureusement .ils opérèrent en ordre dispersé. Les baleiniers basques furent les premiers à s'en apercevoir au retour du Spitzberg, en 1694. Les forts de Saint-John's Harbour, à pied d'œuvre, leur parurent impossible à enlever. Dans la baie du Forillon, le 10 septembre 1694, l'Aigle, au moment d'attaquer, s'échoua. Quatre batteries et un parti de mousquetaires le maltraitèrent au point que « le lieutenant et l'enseigne bleus » Tipitto d'Azpilcueta, d'Hendaye et d'Etcheverry, de Bidart, s'enfuirent en chaloupe. Le vaillant Coursic était blessé. Il ne devait plus revoir Bayonne et le pays basque. Le capitaine Duvignau demeuré sur le pont avec les officiers bayonnais Pierre de Vergés, Léon de Lanne, Miquito, le capitaine des soldats François Labeyrie se battirent pendant huit heures dans cette position désastreuse avant d'être remorqué par leFavori de Louis Harismendy.

 

 

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14 août 2013

de 1946 à aujourd'hui

guerre d'indochine

 

La guerre d’Indochine est un conflit armé s'étant déroulé de 1946 à 1954 en Indochine française, et ayant abouti à la fin de cette fédération ainsi qu'à la sortie de l'Empire colonial français des pays la composant. Ce conflit fit environ plus de 500 000 victimes

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Saigon

 

quatrieme republique

 

Les origines de la Quatrième République

Après la Libération, le régime politique de la Troisième République ainsi que de nombreux politiciens sont discrédités pour avoir été incapables de mener la guerre contre l'Allemagne. Pour beaucoup d'autres, et en particulier de Gaulle, l'homme du 18 juin 1940, dont la popularité est immense, de nouvelles institutions s'imposent. À la question des institutions, se pose le problème de la représentativité et de la légitimité du pouvoir, car aucun de ces hommes qui aspirent au changement n'est élu.

 

PHILIPPE 

 

labourdette

 

1948. Ouverture de la frontière franco-espagnole.

 

 

 

etchenausia

 

1951. Le tennis club Hendayais, nouvelle association sportive à Hendaye.

 

   Aménagement du fronton de Gaztelu Zahar, un mur lisse - permet le dévelopement de l'aire de jeux - lors de la construction de la nouvelle Poste-

 

 

 

pardo

 

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guerre algerie

 


 

La guerre d’Algérie se déroule de 1954 à 1962 principalement sur le territoire des départements français d'Algérie, avec également des répercussions en France métropolitaine. Elle oppose l'État français à des indépendantistes algériens, principalement réunis sous la bannière du Front de libération nationale (FLN)1.

Veme republique

 

 

 

errecart

HENDAYE D'AUTREFOIS
pour le 25ème anniversaire de la Société

PEPITO et le Gaztelu-Zahar

 

 

1972  Fête des 25 ans de GAZTELU ZAHAR

 

 


HENDAYE d'AUTREFOIS

 

 

 

 

lassallette

Ce fut un triste jour pour Hendaye que ce 1er janvier 1993 qui vit la disparition des frontières et donc de toute l'activité économique liée au transit de marchandises. Un choc, se souvient le maire, 64 ans - un des deux seuls édiles socialistes du Pays basque.
 En bon gestionnaire, il avait cependant anticipé l'événement en lançant les travaux d'aménagement de la pointe Sokoburu pour organiser- autour du tourisme, de la plaisance et de la thalassothérapie - une activité de substitution aujourd'hui prometteuse.
 L'année 1998 fut une autre année marquante, avec la naissance du Consorcio de Txingudi, Hendaye-Irun-Fontarrabie, le premier exemple dans l'histoire européenne d'une communauté transfrontalière. Un acte pionnier qui se concrétisera cette année avec la réalisation d'un parc des expositions. M.-P. B.

 

1982. La Floride ensemble portuaire. Des travaux récents ont doté la zone de la Floride d’installations pou la navigation de plaisance et pour la pêche (criée et ateliers compris).
1992. Suppression de la douane entre l’Espagne et la France en application de l’Acte Unique Européen qui culmine le marché unique européen à travers les  quatre libertés: de circulation des marchandises et des services, des prestations et des installation d’entreprises, des capitaux, des personnes.

1992. Suppression de la douane entre l’Espagne et la France en application de l’Acte Unique Européen qui culmine le marché unique européen à travers les  quatre libertés: de circulation des marchandises et des services, des prestations et des installation d’entreprises, des capitaux, des personnes.
1993. Inauguration du port de plaisance de Hendaye.

1997. L’Observatoire Transfrontalier Bayonne-Saint Sébastien est crée à l’initiative conjointe de la Communauté d’agglomération de Bayonne-Anglet-Biarritz et la Diputacion Foral de Guipúzcoa. 

1998. Le Consorcio Bidassoa-Txingudi réunit les communes de Hendaye, Irun et Fontarabie pour harmoniser le développement économique, le tourisme et les activités sociales et culturelles. Il est régi par le droit espagnol.

 

 

ecenarro

 

2001. L’Eurocité Basque Bayonne Saint Sébastien. Il s’agit d’un groupement européen d’intérêt économique qui agit à travers l’Agence transfrontalière pour le développement de l’eurocité basque Bayonne-Saint Sébastien 

 

 

 

sallaberry

2010. Projet d’Euro région Aquitaine-Euskadi.
 Hendaye serait le siège de la nouvelle structure qui se régirait par le droit français.

 

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BIBLIOGRAPHIE

 Gabriel et Jean-Raoul Olphe-Galliard  : Hendaye
Abbé Michelena  :Hendaye son histoire
Jean Fourcade :  Urrugne 
Jean Fourcade : Trois cents ans au Pays Basque d'histoire
 ( le livre d'histoire Paris )
Joseph Nogaret  : Hendaye  ( 1811/1890 )
Joseph Nogaret : Saint jean de Luz
Claude Choubac : La Bidassoa
 Théodoric Legrand : Essai sur les différents de Fontarrabie avec le Labourd
Georges Langlois)La véritable histoire de Hendaye-Plage
Duvoisin: le Corsaire Pellot
Ducéré Edouard (1849 )
Thierry Sandre :  le corsaire Pellot
Alfred Lassus : Hendaye ses marins ses corsaires
Lauburu : Histoire et civilisation  Basques

Narbaitz  : le Matin Basque
Eugène Goyheneche  : le Pays Basque
Manex Goyeneche Histoire Pays Basque T : 1.2.3.4
Philippe Veyrin : les Basques
Rectoran : Corsaires Basques et Bayonnais
Thierry du Pasquier : les Baleiniers Basques
Josane Charpentier : La sorcellerie  au Pays Basque ( Ed . Guénégaud Paris )
Jean-Claude Lorblanches: les soldats de Napoléon en Espagne 1837
 ( Edition l'Harmattant )
Louis de Marcillac  : Histoire de la guerre entre la France et l'Espagne 1793/1795
Correspondance d'Escoubleau de Sourdis : 1636
Oiasso  : 4 siècles de présence romaine
 Gipuzkoakultura
Le Journal du Pays Basque
Supery
Regis Boyer   Heros et dieux du Nord  Ed.Tout l'Art
Internet
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Société des Sciences, Lettres & Arts de Bayonne (Bulletin, et notamment : J. de Jaurgain, E. Ducéré, J.-B. Daranatz, M. Degros...)
Musée Basque de Bayonne (Bulletin, et notamment : P. Arné, Pierre de Lancre...) Cardaillac (X. de) : Fontarabie.
Langlois (G.) : La véritable histoire de Hendaye-Plage.
Legrand (T.) : Essai sur les différends de Fontarabie avec le Labourd.
Nogaret (J.) : Petite histoire du pays basque français.
Nogaret (J.) : Saint-Jean-de-Luz : des origines à nos jours.
Olphe-Gaillard (J. & J.-R.) : Hendaye : Son histoire.
Paquerie (Ch. de la) : Un coin du pays basque.
Sandre (Thierry) : Le corsaire Pellot.
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REMERCIEMENTS PARTICULIERS à Mme Jacqueline Sanchez pour son aide dans la traduction de l' écrit habituel en langage informatique

 

 

 

 

 

 

 

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